Co-fondatrice et présidente de l’association Adiila, Marie-José Mouysset-Larroque accueille des stagiaires, avec ses collègues, sous forme de relais inter-cabinets.
" En 2002, avec les infirmiers du secteur d’Albi, dans le Tarn, nous avons créé Adiila (Association des infirmières et infirmiers libéraux de l’Albigeois) dans le but de nous rencontrer et, ensemble, de faire reconnaître nos compétences en santé publique. À ce titre, nous remplissons notre rôle au niveau de la formation. Nous intervenons en Ifsi, collaborons à la correction de mémoires et accueillons des stagiaires dans nos cabinets – en ce qui me concerne, je prends un élève par an. Le tutorat constitue l’opportunité de promouvoir l’exercice libéral. Mais la démarche exige un engagement fort et une lourde implication personnelle. Huit et même dix semaines de stage depuis la réforme, c’est long. Avec Adiila, nous avons choisi d’alléger la formule et de faire jouer notre complémentarité : depuis dix ans, nous accueillons le stagiaire en binôme. Il partage son temps entre deux patientèles et deux infirmiers.
D’emblée, le domicile est un terrain de stage exigeant, par sa diversité et parce qu’il bouscule la relation avec le soigné – nous sommes chez lui. L’étudiant, qui manque de compétences de base, découvre qu’un soin ne se résume pas à des actes. La prise en charge est globale. Et, contrairement au stage hospitalier où l’étudiant peut tourner entre les membres de l’équipe du service, à domicile, il est constamment sous notre regard, chez le patient comme en voiture. Le débriefing est permanent. Pour nous qui travaillons de façon solitaire, la gestion d’une relation interpersonnelle avec un étudiant est une situation à double tranchant. L’exercice peut s’avérer être une catastrophe, si l’étudiant ne s’investit pas, si nos personnalités ne s’accordent pas ou si certains patients sont réfractaires. La venue d’un stagiaire peut se révéler à l’inverse très positive par le regard nouveau qu’il porte sur notre pratique et l’enseignement plus récent qu’il a reçu. C’est un échange de connaissances, une mise à jour en ce qui nous concerne. Toutefois, un même stagiaire pourra déclencher des comportements différents d’un cabinet à l’autre. C’est l’occasion d’amorcer une réflexion sur notre pratique : qu’est-ce que j’induis dans la relation au patient, pourquoi telle exigence dans la façon de procéder ? »
Ange-Dominique Secondi, vice-présidente chargée de la formation infirmière au Cefiec et cadre supérieur de santé de l’Ifsi de Meulan-Les Mureaux (Yvelines)
« On ne m’avait jamais rapporté ce type d’organisation. Elle peut inciter de nouveaux cabinets à recevoir des étudiants toujours plus nombreux à vouloir découvrir l’exercice libéral. Le domicile recèle une grande richesse, en termes de santé publique, mais aussi de travail d’équipe, bien qu’informel. Quant aux difficultés des relations interpersonnelles, la proximité étant d’autant plus forte à domicile, chacun doit rester centré sur son rôle – apprentissage pour l’un, encadrement et transmission pour l’autre. Il est important de désigner un tuteur, même si l’étudiant suit la tournée avec différents infirmiers d’un même cabinet. »