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FICHE PRATIQUE
Au-delà de son devoir d’information et de conseil, votre banquier (comme tout organisme de crédit) est astreint à un devoir de mise en garde si vous envisagez de souscrire toutes sortes de crédits.
Votre banquier doit vous informer, objectivement, des risques inhérents à votre projet. L’information doit être précise et tenir compte d’une part de vos capacités financières en tant que souscripteur et d’autre part des caractéristiques du crédit que vous envisagez de souscrire. Il doit ainsi attirer votre attention sur les risques de souscrire des crédits à taux variables ou révisables, des crédits renouvelables (au taux effectif global, TEG, souvent très élevé), etc.
Nous allons prendre appui sur un arrêt du 13 février 2014 (Cour d’appel de Limoges, Ch. Civ. 13/02/2014) pour mieux cerner l’obligation de mise en garde du banquier.
En 2007, une banque consent à Mme X., infirmière salariée, trois prêts pour l’achat d’une maison d’un montant total d’environ 110 000 euros sur vingt ans. Son salaire avoisine les 1 982 euros par mois et la mensualité pour son crédit s’élève à 753 euros, soit un taux d’endettement de 40 %. Quelques mois plus tard, Mme X. engage une action en responsabilité contre le banquier pour manquement au devoir de mise en garde. Par jugement du 11 septembre 2012, le tribunal de grande instance condamne la banque à verser à Mme X. 30 000 euros. La banque fait appel. Les juges d’appel soulignent que Mme X., qui avait 57 ans lors de la conclusion des prêts, allait vers la fin de son activité professionnelle. Avec un âge prévisible de départ à la retraite à 65 ans, elle avait tout au plus huit ans d’activité professionnelle avec un revenu dont rien ne permettait de prévoir une augmentation sensible. Il était au contraire plausible que Mme X. allait connaître une baisse de ses revenus à partir de 2015, augmentant ainsi de manière significative son taux d’endettement, situation prévisible dès la souscription des prêts.
Pour la Cour d’appel, cette souscription créait un endettement excessif, donc un fort risque de survenance d’une situation obérée et de surendettement. La banque n’ayant pas été en mesure de justifier qu’elle avait mis en garde Mme X., la Cour confirme le jugement en ce qu’il a retenu un manquement du banquier à son devoir de mise en garde à l’égard de sa cliente.
Cette notion a été précisée par la Cour de cassation dans un arrêt du 19 novembre 2009 dans lequel elle a jugé qu’il n’existait une obligation de mise en garde que s’il y avait « risque d’endettement excessif ».
Pour apprécier l’existence de ce risque, votre banquier doit prendre en compte vos revenus et l’ensemble de votre patrimoine afin de les comparer à vos charges financières. La jurisprudence considère qu’il y a endettement excessif lorsque la charge de remboursement des crédits ne permet plus de disposer d’une trésorerie suffisante pour faire face aux dépenses courantes avec les seuls revenus.
Ainsi, un endettement peut être qualifié d’excessif lorsque le taux des remboursements de crédit dépasse 30 % des revenus du foyer (35 % pour les revenus les plus élevés). Mais les banques – comme les organismes de crédit – pratiquent le “cas par cas” quant à l’évaluation du risque d’endettement.
Vous pourrez engager la responsabilité de votre banquier devant les tribunaux civils à la double condition de démontrer, d’une part, que vous êtes « un emprunteur non averti », à savoir que vous n’avez pas de compétences spécifiques en matière économique, commerciale ou financière, et, d’autre part, que votre banquier aurait dû attirer votre attention sur les risques présentés par le crédit, notamment quant à votre taux d’endettement. Mais si ce dernier démontre qu’il a satisfait à son obligation de mise en garde et que le crédit n’était pas excessif, il ne sera pas condamné. Par ailleurs, sa responsabilité ne saurait être engagée si vous avez été de mauvaise foi et lui avez caché des éléments qu’il n’était pas en mesure de détecter.
→ Juriste en droit pénal et droit de la santé
→ Formatrice en secteur libéral et hospitalier