L'infirmière Libérale Magazine n° 306 du 01/09/2014

 

ORGANISATION DES SOINS

Actualité

ANALYSES > Cour des comptes, IGF, Cnamts, HAS… Les Idels apparaissent dans plusieurs rapports rendus publics cet été. Des rapports pas toujours sans rapport entre eux, notamment sur la volonté de faire des économies…

L’IGF veut « libérer » le libéral

Avant que le président de la République n’annonce, le 21 août dans Le Monde, qu’un projet de loi sur le pouvoir d’achat serait déposé en septembre pour (entre autres) accroître la concurrence dans le domaine des professions réglementées, un rapport sur ce secteur, remis par l’Inspection générale des finances (IGF) au ministère de l’Économie et des Finances en 2013, a largement fuité dans la presse cet été(1).

Cette analyse économique concerne 37 professions et activités au « poids économique substantiel ». Leur « bénéfice net avant impôt représentait en 2010 19,2 % du chiffre d’affaires, soit 2,4 fois la rentabilité constatée dans le reste de l’économie »(2). Et certaines de ces professions apparaissent comme particulièrement gâtées par les réglementations (greffiers des tribunaux de commerce, mandataires et administrateurs judiciaires, etc.).

Concernant les infirmières, l’IGF formule cinq « options de modernisation ». La première consiste en la suppression du numerus clausus. Selon les inspecteurs, celui-ci incite les étudiants à se former à l’étranger (c’est déjà le cas de plus de la moitié des kinésithérapeutes ou des vétérinaires), ce qui augmente le coût de la formation.

Par ailleurs, la mission pointe « un niveau de qualification exigé disproportionné pour l’exercice de certaines activités » et recommande donc de confier plus largement aux Idels certaines missions telles que la vaccination ou le renouvellement des prescriptions antidouleur. Permettre aux IDE de poser des perfusions et d’injecter des analgésiques (à l’hôpital mais également à domicile) est aussi proposé.

L’IGF préconise ensuite l’ouverture sans restriction du capital des sociétés d’exercice libéral aux non-professionnels ainsi que l’autorisation pour les professionnels de santé d’investir dans plusieurs structures d’exercice (cabinets, maisons médicales de garde, etc.). Ces mesures seraient assorties d’un accroissement des pouvoirs de l’Ordre national des infirmiers en termes d’investigation et de sanction, pouvoirs qui pourraient s’étendre aux structures et à leurs actionnaires afin d’éviter que des pressions ne puissent remettre en cause l’indépendance des professionnels. Enfin, un contrôle quinquennal des tarifs pourrait être mis en place sous l’égide de l’Autorité de la concurrence.

L’Union nationale des professions libérales a annoncé un mouvement de contestation à la rentrée contre les réflexions de l’IGF.

SANDRA MIGNOT

La Cnamts prône un plus grand rôle des Idels dans la dialyse

Dans son rapport sur les charges et produits, adopté le 24 juillet et qui dresse chaque année le bilan des dépenses du régime général d’Assurance maladie et formule des propositions pour les pouvoirs publics, le conseil de la Caisse nationale d’Assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts) entend accroître la part des modalités alternatives à la dialyse en centre - dialyse péritonéale, hémodialyse en unité de dialyse médicalisée, autodialyse et hémodialyse à domicile - afin d’offrir un choix plus large aux patients, des soins les plus proches du domicile et la possibilité d’être plus autonomes. Ces objectifs de qualité des soins rejoignent des enjeux économiques, l’hémodialyse en centre étant la modalité de dialyse la plus chère et entraînant des coûts de transports très élevés.

Outre un ajustement des tarifs de la dialyse en centre, le conseil de la Cnamts propose de permettre la prise en charge d’une prestation réalisée par une infirmière libérale dans le cadre de la dialyse à domicile. Aujourd’hui, la facturation d’une infirmière n’est pas possible dès lors qu’un forfait est versé à l’établissement, alors que l’assistance d’une infirmière est parfois nécessaire pour certains patients. Il s’agirait de pouvoir faire appel à une infirmière libérale mais en ajustant le forfait versé à l’établissement. La Cnamts suggère aussi, entre autres, de permettre aux prestataires de service à domicile d’intervenir en dialyse à domicile, de mettre en place une meilleure information des patients pour leur donner le choix et de former les professionnels de santé à ces techniques de prise en charge à domicile.

Par ailleurs, la Cnamts estime nécessaire d’approfondir la réflexion sur les flux démographiques des professionnels de santé. « Depuis des années », le nombre d’Idels progresse de 5 % par an, et le volume des soins infirmiers de ville de 6 %. « La croissance rapide et continue des effectifs des professions paramédicales induit une pression sur les dépenses de soins correspondantes », lit-on dans le rapport. Les dispositifs conventionnels d’installation infirmière sur le territoire, quant à eux, portent leurs fruits : « l’inégalité de répartition se réduit progressivement » depuis 2007.

Au total, avec ses 25 propositions pour 2015, la Cnamts suggère presque 2,9?milliards d’euros d’économies.

LAURE MARTIN

La HAS évoque le maillage infirmier pour la chirurgie ambulatoire

Dans un rapport sur la chirurgie ambulatoire daté de mai et mis en ligne début juillet(3), la Haute Autorité de santé affirme le rôle des professionnels de ville et plus particulièrement celui des infirmières. Le document suggère ainsi de « s’appuyer sur le tissu des infirmières libérales » au maillage territorial très serré et pouvant assurer une continuité de soins sept jours sur sept et 24 heures sur 24 - une proposition avancée par la Fédération nationale des infirmiers.

Les professionnels de santé consultés évoquent également, pour suivre le patient, l’appel du lendemain, l’utilisation d’autres moyens de communication (Internet, télémédecine), une visite par les professionnels de santé de ville « dans certains cas ». « Le rôle important des professionnels de santé de ville questionne sur leur besoin en formation [concernant les] spécificités liées à la prise en charge en chirurgie ambulatoire », note la Haute Autorité de santé.

S’exprime, dans ce rapport d’évaluation technologique, le besoin de renforcer le partage d’informations entre l’hôpital et la ville, en pré- comme en post-opératoire, notamment en anticipant et en organisant les conduites à tenir avec le médecin traitant. En chirurgie ambulatoire, la continuité des soins, organisée par la structure ou, le cas échéant, par un autre établissement de santé, est une obligation.

Le rapport entend fournir aux professionnels de santé les éléments-clés pour apprécier l’éligibilité d’un patient à la chirurgie ambulatoire afin de garantir sa sortie le soir même de l’intervention sans risque surajouté. Ainsi, les risques liés à l’intervention chirurgicale doivent être connus et limités, les douleurs post-opératoires contrôlables, la prise alimentaire solide et liquide par voie orale doit pouvoir se faire rapidement et les soins post-opératoires être gérables par le patient et son entourage, ou éventuellement avec le soutien des soignants médicaux et paramédicaux à domicile.

L. M.

(1) Mis en ligne par Le Journal du dimanche : bit.ly/1ok0Qjx

(2) Le taux de rentabilité est calculé en fonction du nombre d’années d’études, de l’investissement financier que nécessite l’exercice et de la prise de risque économique qu’il représente. Le taux des Idels, situé à 55 %, s’avère être le plus élevé de ces professions.

(3) bit.ly/1pNroz2 en bref