L'infirmière Libérale Magazine n° 306 du 01/09/2014

 

PROFESSION

Actualité

M.H.  

AGRESSIONS > Le problème des violences contre les Idels n’est pas nouveau, et peu visible. Il vient d’être mis en lumière avec plusieurs faits divers survenus cet été.

À Strasbourg (Bas-Rhin), le 20 août, un mois jour pour jour après le meurtre de Mireille Schmitt, Idel de 63 ans, de deux coups de fusil, par l’un de ses patients, quelque 150 personnes ont défilé en son hommage, dans cette même ville, vêtues de blanc et une fleur blanche à la main, à l’initiative de l’Union régionale des professionnels de santé (URPS)-infirmiers d’Alsace et de l’Ordre national des infirmiers (ONI)(1). Le crime, selon les premiers éléments de l’enquête, aurait été commis par dépit amoureux : le patient, un septuagénaire habitant dans une résidence sociale, aurait vu l’infirmière parler à un autre résidant. Sur une page Internet dédiée, l’ONI a reçu 1 600 messages, dont un millier adressés à la famille de la victime.

Cet été, plusieurs faits divers ont frappé des Idels. Le 24 juillet à Toulouse (Haute-Garonne), à la sortie de chez un patient, Frédérique, 51 ans, est rouée de coups par quatre personnes cagoulées tentant (en vain) de lui voler son scooter(2). Trois jours plus tard, à Montpellier (Hérault), une Idel de 60 ans en tournée est molestée par « deux grands gaillards » pour voler sa voiture. Son « traumatisme psychologique » se double « d’une liste de galères dont elle se serait bien passée », avec le vol de son sac contenant ses papiers, sa carte bancaire, des clés de son domicile et de chez ses patients - « il a fallu changer toutes les serrures » - ou encore des factures de sa patientèle(3). L’énumération est non exhaustive : la presse a relaté cet été d’autres agressions à Maubeuge, Menton, Saint-Ouen-L’Aumône.

Le silence des tutelles

La profession s’émeut de ces actes commis dans l’exercice de leurs fonctions. Sur les réseaux sociaux, chez le collectif “Ni bonnes ni nonnes ni pigeonnes”, du côté syndical, à la tristesse s’ajoute la colère, suscitée par le silence des tutelles, interprété ici et là comme de l’indifférence ou du mépris(4). « La vie d’une infirmière aurait-elle moins de valeur que celle d’un autre de nos concitoyens ? », dénonce l’ONI, tandis qu’un hashtag (mot-clé) #MarisolMaTuée essaime sur le Net. Les médias d’habitude plus prompts à dénoncer les « “fraudeuses” de la Sécu » sont aussi critiqués.

Comment prévenir les violences, ou en limiter les effets, surtout pour des infirmières isolées, intervenant au domicile de tout patient ? En discutant avec des collègues, en cas de doute ou de difficulté. Ce qui peut être plus facile quand on travaille en groupe - l’infirmière tuée à Strasbourg travaillait seule, avec une remplaçante, indique la vice-présidente de l’URPS-infirmiers d’Alsace. Une autre piste(5) est de disposer de numéros à appeler en cas d’urgence. Ou encore de signaler toute agression auprès des autorités, dont l’ONI, qui permet de déclarer en ligne tout incident. Pour l’heure, les infirmières n’ont « pas trop la culture du signalement », selon Rita Kehrer, trésorière du Conseil départemental de l’Ordre départemental, à Strasbourg.

(1) Lire notre compte rendu sur www.espaceinfirmier.fr, à la date du 20 août.

(2) France 3 : bit.ly/1t2Jqj4.

(3) Le Midi-Libre du 30 juillet.

(4) Le ministère aurait toutefois contacté la famille de la victime strasbourgeoise, de façon privée. Le ministère n’a pas donné suite à notre sollicitation pour le confirmer ou l’infirmer.

(5) À lire aussi, notre article “Coup d’œil sur les violences” (n° 293, oct. 2013) et les guides téléchargeables sur le site de l’ONI (bit.ly/1BJbQRT).