L'infirmière Libérale Magazine n° 307 du 01/10/2014

 

IDEL ET HAD

L’exercice au quotidien

Sophie Magadoux  

Infirmier libéral depuis trente ans, Alain Maurel constate les bienfaits de la prise en charge de l’hospitalisation à domicile. Et ses travers, quand elle s’arrroge certains droits au mépris du travail des Idels.

Il y a environ cinq ans, les Idels du secteur n’ont pas bien vécu la mise en place des structures d’hospitalisation à domicile (HAD), perçues comme une concurrence de plus. Pour ma part, je considérais qu’il s’agissait d’une évolution logique. Cette interface entre l’hôpital et le domicile venait répondre à un besoin pour des prises en charge de soins trop lourds ou complexes en raison des techniques mises en œuvre. L’HAD devait intervenir pour optimiser la sortie d’hospitalisation de patients dont les soins en structure étaient à la frontière des compétences et du possible du domicile. Mais, concrètement, nous n’avons pas été consultés sur les modalités. Par exemple, l’HAD nous a appelés pour nous proposer de prendre en charge un patient après neuf mois d’hospitalisation. La sortie organisée, nous assurions les soins techniques (injections, perfusions, surveillance…) et l’HAD la toilette, la logistique du matériel nécessaire, la coordination avec les services médicaux et sociaux. En accord avec l’HAD, nous comptons les actes principaux à taux plein, un avantage lorsque les actes s’accumulent. Le suivi de l’HAD a duré un an, puis, l’état de la personne s’étant stabilisé, il a été interrompu brutalement. Pour la famille, notamment le conjoint lui-même atteint de pathologies, les heures d’aide ménagère étaient fortement diminuées, et, pour nous, la cotation changeait à la baisse. Nous avons dû trouver des solutions pour que le conjoint continue de bénéficier des aides primordiales pour le maintien à domicile et nous appuyer sur la nomenclature pour de pas trop dévaloriser notre travail. Humainement, il était hors de question de cesser la prise en charge. Sur un plan plus polémique, l’HAD a pris en charge l’une de nos patientes, âgée de 70 ans mais valide, ayant subi l’implantation d’une prothèse de hanche, pour un passage par jour : pansement, bain de pieds, injection d’anticoagulant. C’est le médecin traitant qui nous a prévenus. Mais que peut-on faire devant le fait accompli ? L’HAD devrait s’appuyer sur ce qui existe déjà et le respecter. »

Avis de l’expert

« Il y a de la place pour tout le monde »

Jean Ardeven, président de la fédération ADMR (aide à domicile en milieu rural) du Morbihan (56)

« J’entends dans le témoignage de cet infirmier un manque de communication entre les différents intervenants. Ici, dans le Morbihan, il y a douze ans, pour cette même raison, avec les hospitaliers et libéraux, médecins, pharmaciens, Idels, etc., nous nous sommes tous assis autour d’une table et nous avons dressé la liste des besoins et des problèmes des uns et des autres. Ensuite, pour rendre effective la collaboration, l’ADMR a rencontré les différentes Idels dans leur cabinet. Le retour à domicile est aujourd’hui organisé 48 heures à l’avance, permettant la mise en place des auxiliaires de vie, des aide-soignantes, etc., et l’intervention des Idels, dans le cadre de l’HAD ou en fin d’HAD. Travaillons en réseau, il y a de la place pour tout le monde. À condition de rester centré sur le bien-être du patient, ce qui passe par la qualité et la traçabilité. »