L'infirmière Libérale Magazine n° 308 du 01/11/2014

 

LIEU DE TRAVAIL

L’exercice au quotidien

MARIE FUKS  

Après avoir couru la ville, l’Idel Caroline Lelièvre s’est établie à la campagne, dans une petite commune appelée “Sonchamp”. Elle dresse un comparatif de l’exercice en ville et à la campagne.

« Travailler à la campagne n’était pas une évidence. Je me suis d’abord établie en ville, à Verrières-le-Buisson (Essonne), où, le temps de créer ma clientèle, j’ai fait des vacations en clinique et assuré des remplacements de collègues à Massy. Les soins se cantonnaient presqu’exclusivement aux pansements, prélèvements et injections, mais j’avais tant de patients à visiter chaque jour que, de toute façon, je n’aurais pas eu le temps de prendre en charge des soins réclamant du temps, de la présence et de l’accompagnement. Ce travail en flux tendu et impersonnel ne me satisfaisait pas. Notre famille s’agrandissant, la question du logement s’est posée, ce qui nous a conduits à quitter la proche banlieue pour poser nos valises et ma mallette au milieu des champs dans un petit village rural, Sonchamp, situé en lisière de la forêt de Rambouillet (Yvelines). Après quelques remplacements, j’ai rejoint le cabinet des collègues que je remplaçais, puis créé ma propre clientèle en 2008. Le travail à la campagne n’a rien à voir avec celui de la ville. Sonchamp est un village composé de hameaux constitués de maisons individuelles. ­L’accès est plus facile et l’accueil souvent plus chaleureux que dans les tours de Massy où les gens sont plus discrets, voire distants. À Sonchamp, on sait qui je suis, où j’habite, et que je suis dipsonible en cas de souci. Mes patients sont très reconnaissants et ont de petites attentions, comme me donner des chocolats à Noël. Je connais leur entourage familial et leurs voisins, et je suis proche de leurs médecins avec lesquels je communique beaucoup. Cette proximité me permet d’apprendre des informations utiles à la prise en charge et à la relation de soin. Parfois, quand je circule à travers champs entre deux visites à des patients, j’ai le sentiment que le vrai bonheur est là, à Sonchamp. Pas d’embouteillage ni de souci de stationnement, et, quand il fait beau, je profite du paysage et de la nature. J’arrive chez le patient l’esprit serein et totalement disponible. En revanche, je fais plus de kilomètres, ce qui occasionne davantage de frais, moins de temps en soins, donc au global moins de revenus. Mais peu importe, je ne changerais mes conditions de travail pour rien au monde. »

Avis de l’experte

Les Idels des villes et des champs partenaires

Anne-Françoise Gaillot, maire de La Boissière-École (Yvelines)

« L’installation d’une Idel dans une petite commune rurale est une aubaine pour la population et les élus, mais elle n’est pas toujours bien vue par les professionnels environnants car c’est autant de déplacements kilométriques, voire de patients, qui peuvent disparaître pour eux. Heureusement, chacun prend vite conscience que les besoins à pourvoir, sur les plans quantitatif et des amplitudes horaires à couvrir, permettent à chacun de trouver sa place. Dans notre cas, les relations avec les soignants de la grande ville proche se sont harmonisées à la suite de leur qualification en zone urbaine et donc de la suppression des indemnités kilométriques [hors zone de compétence] : un partenariat s’est instauré entre les Idels des villes et des champs,qui se recommandent des patients. »