L'infirmière Libérale Magazine n° 309 du 01/12/2014

 

AUTONOMIE

L’exercice au quotidien

GÉRALDINE LANGLOIS  

La prise en charge globale, on en parle souvent. Mais la pratique-t-on réellement ? Oui, témoigne Gisèle Gravier-Bujeau, Idel dans un pôlede santé à Loches (Indre-et-Loire), à propos des tout premiers parcours pour personnes âgées en risque de perte d’autonomie (Paerpa).

Avec le seul médecin expérimentateur, nous avons réalisé cet été une dizaine de plans personnalisés de santé (PPS), dont quatre que j’ai initiés. Pour ce test, nous avons choisi des patients en commun que nous considérions à risque de perte d’autonomie. Mais les critères d’appréciation de ce risque sont très larges, ce qui rend le repérage difficile. Nous avons réalisé les PPS à deux, chez nos patients. C’est important que le médecin vienne aussi chez les patients, qu’il se rende compte de la façon dont ils vivent. Nous avons testé la grille d’évaluation. Elle était très fouillée, trop probablement, mais elle sera simplifiée. Elle comprend trois volets : médical, paramédical, social. Certains problèmes médicaux demandent en effet des réponses sociales. La dénutrition, par exemple, est un problème médical, mais on peut y remédier de manière sociale en aidant à refaire un dentier et en organisant le portage des repas. Ce sont des actions très chronophages et ce n’est pas notre travail. Nous avons réalisé un PPS dans ce sens, mais ces actions n’ont pas encore pu être lancées car la CTA [coordination territoriale d’appui*] n’était pas encore mise en place. Cela ne saurait plus tarder. Grâce à cette CTA, des acteurs sociaux vont agir à partir de nos observations, c’est très positif ! Avec ces PPS, c’est la première fois que nous travaillons ensemble, le médecin traitant et moi, sur une prise en charge globale. C’est intéressant de croiser nos regards : celui du médecin est centré sur la pathologie et celui de l’infirmière est plus “pratique”. Si le Paerpa fonctionne, cela répondra à la frustration que nous pouvons ressentir face aux problèmes rencontrés chez les patients et auxquels nous ne pouvons pas répondre. C’est une réelle avancée, presque révolutionnaire, dans la façon d’aborder la personne âgée. Depuis trente ans, on nous parle de prendre en charge les personnes dans leur globalité, sans les découper par pathologie, mais on le fait quand même. Avec le Paerpa, non. Et je trouve ça génial. »

* L’interlocuteur unique des initiateurs de PPS et le coordinateur des actions. À lire, Paerpa : premiers pas dans la région Centre, sur notre site, à la date du 30 octobre.

Avis de l’expert

L’importance des systèmes d’information

Dr Jean-Pierre Peigné, médecin généraliste à Loches (Indre-et-Loire), responsable de la commission SI à l’URPS-ML, a réalisé les premiers PPS dans la région Centre

« Pour communiquer entre professionnels, les outils numériques sont très importants. Nous disposons d’outils plus matures pour échanger des données protégées, des documents et des messages, de manière sécurisée. Dans le Paerpa, nous disposons du DMP et de la MSS (messagerie sécurisée en santé). Chaque détenteur d’une carte de professionnel de santé peut créer son adresse. Quand on se connaît bien, ces outils optimisent le travail. Lorsque la situation d’un patient se complique et qu’il faut revoir sa prise en charge ou pour les nouveaux patients, il n’y a rien de plus efficace que l’évaluation conjointe au pied du malade. Mais, pour ceux que l’on connaît déjà, l’infirmière peut commencer à remplir le PPS à domicile et je peux le compléter au moment où je suis disponible. Une fois finalisé, il sera publié sur le DMP du patient et sur la plateforme de la CTA, où les partenaires du champ social pourront prendre connaissance des actions préconisées. »