Cahier de formation
Savoir
Le recours à des BZD nécessite une vigilance à laquelle l’Idel participe par sa présence auprès des patients et par ses conseils.
Selon l’ANSM (rapport d’expertise de janvier 2012), 20 % de la population française a consommé au moins une fois une BZD (ou apparenté) en 2010. La durée médiane du traitement est de sept mois, mais environ la moitié des sujets traités par une BZD le sont sur plus de deux ans (avec ou sans interruption de traitement). La surconsommation et le mésusage d’anxiolytiques (et/ou d’hypnotiques) justifie en France des recommandations récurrentes depuis la publication du rapport sur l’usage des BZD rédigé sous la direction du Pr Marcel Legrain en 1991.
L’usage d’une BZD, même sur une période de quelques semaines ou quelques mois, est associé à un risque important de développement d’une tolérance (besoin d’augmenter la dose utilisée), et de dépendance (difficultés à se priver du traitement).
La dépendance, particulièrement préoccupante, survient :
→ dans le contexte d’une prescription correcte mais prolongée (risque non négligeable après un an de consommation régulière). La référence médicale opposable n° 1993-IV précise que la prescription d’une BZD anxiolytique ne devrait pas excéder douze semaines (quatre semaines, voire moins, dans une indication hypnotique), qu’il n’y a pas lieu d’associer deux BZD anxiolytiques ni d’initier le traitement sans respecter les posologies recommandées ou sans débuter par la posologie la plus faible ;
→ dans le cadre d’une consommation abusive (tolérance parfois considérable avec des posologies multipliées par vingt, voire cinquante) ;
dans le cadre d’une association à l’alcool.
Cette dépendance peut devenir problématique, notamment chez le sujet âgé pour lequel l’imprégnation par anxiolytique a souvent d’importantes conséquences iatrogènes. De plus, des travaux méritant encore confirmation suggèrent que l’utilisation prolongée d’une BZD peut être associée à une augmentation du risque d’apparition ultérieur d’une démence d’origine neurologique (maladie d’Alzheimer ou analogue), sans qu’un lien de causalité soit encore prouvé.
L’arrêt brutal de la prise de BZD chez un patient devenu dépendant induit un syndrome de sevrage dont les symptômes, peu spécifiques, s’observent rapidement et se soldent notamment par un rebond anxieux poussant le patient à pérenniser la prise du médicament. De ce fait, exception faite du cas où l’usage de tranquillisants génère des effets indésirables ayant un retentissement social, familial ou médical, le patient ne sollicite guère de sevrage, car il ne ressent en général pas d’effets délétères et ne craint pas de complication majeure à terme.
L’arrêt du traitement est progressif : il est conduit, en ambulatoire, sur quatre à dix semaines au minimum – parfois sur plusieurs mois – avec une surveillance régulière réalisée grâce à des consultations dédiées à l’arrêt du traitement anxiolytique. Le suivi est poursuivi après sevrage. La mise en œuvre d’une TCC contribue à améliorer le résultat de l’arrêt. La conjonction de facteurs de risques d’échec peut justifier un sevrage avec hospitalisation ; inversement, une hospitalisation peut constituer l’occasion de réaliser un sevrage.
La prescription d’un anxiolytique à un sujet âgé fait l’objet d’une évaluation rigoureuse : la limitation du recours aux BZD dans la population d’âge supérieur à 65 ans constitue aujourd’hui un véritable enjeu de santé publique.
→ Dans l’Hexagone, environ 30 % des personnes de plus de 65 ans consomment des BZD contre 20 % au Canada et 15 % en Australie. Le niveau de consommation est trois à cinq fois plus élevé en France que dans les autres pays européens. Loin d’être ponctuelle, cette utilisation reste souvent chronique : les recommandations et la campagne d’information de l’ANSM auprès des personnels de la santé en 2012 (cf. notamment le lien bit.ly/1Fmej8a) ne font guère évoluer la situation.
→ Pourtant, des altérations cinétiques (ralentissement du catabolisme ou de l’excrétion) et une hypersensibilisation des récepteurs expliquent que l’âge rende le patient plus vulnérable à l’action de ces médicaments : risque de chute avec fracture, troubles mnésiques et cognitifs pouvant faire suspecter une démence, etc.
→ La dose de BZD, lorsque l’administration est indispensable, est divisée par deux, voire trois.
→ Le traitement de l’anxiété du sujet âgé repose sur la prescription d’un antidépresseur IRS à dose réduite, une fois éliminés toutes les causes organiques ou iatrogènes au trouble anxieux. Il faut éviter les antidépresseurs tricycliques (clomipramine, Anafranil) en raison des effets anticholinergiques et de la médiocre tolérance cardiaque. Venlafaxine ou mirtazapine exposent à un risque d’hypotension.
La cinétique de la buspirone n’est pas modifiée par l’âge si aucune pathologie ne s’y ajoute (insuffisance hépatique et/ou rénale). L’administration d’hydroxyzine (Atarax) expose à un risque d’effet anticholinergique (trouble de l’accommodation visuelle, rétention urinaire, constipation, sécheresse lacrymale, etc.) et son élimination est ralentie (réduire la posologie de moitié).
→ Le passage des BZD à travers le placenta explique que certains nourrissons présentent à la naissance une détresse respiratoire aiguë liée à l’imprégnation par ces médicaments si la mère en a fait usage : ces signes, rapidement régressifs, nécessitent une surveillance étroite, voire, parfois, des soins en urgence. Une imprégnation fœtale prolongée est à l’origine de troubles de l’adaptation néonatale.
→ L’administration de fortes doses d’une BZD dans les derniers moments de la grossesse peut s’associer à des troubles de la conscience du nouveau-né, des difficultés respiratoires, une hypothermie, une hypotonie et une difficulté à la succion ; tout ceci caractérise le syndrome de l’enfant “mou”, rapidement réversible en quelques heures à quelques jours selon la rémanence de la molécule dans l’organisme.
→ L’utilisation d’une BZD reste envisageable au cours de la grossesse, dans le respect des indications et des posologies, dans certaines situations dont, notamment, le stress post-traumatique (qui peut provoquer un accouchement prématuré). Mais l’usage d’une BZD pendant l’allaitement est déconseillé (risques de dépression respiratoire et d’effets paradoxaux du nourrisson).
→ L’usage de buspirone est déconseillé pendant la grossesse comme pendant l’allaitement. La prescription pendant la grossesse d’hydroxyzine, tératogène chez l’animal, doit être réfléchie et évitée au premier trimestre et est déconseillée pendant l’allaitement.
→ Il faut savoir affirmer clairement qu’il faut prohiber, sauf avis médical, tout usage de médicament tranquillisant ou hypnotique pendant la grossesse comme pendant l’allaitement.
Non, la prise d’un anxiolytique ne peut en aucun cas relever d’une auto-administration, même si ces médicaments sont largement utilisés autour de vous. Vous risquez des troubles de la mémoire mais surtout une somnolence qui peut poser problème pour conduire. De plus, l’habituation à ce type de médicament est rapide et conduit à une dépendance. Dans tous les cas, il faut s’en remettre à une prescription médicale. Mais vous pouvez cependant utiliser des méthodes plus douces, notamment des tisanes légèrement sédatives : aubépine, tilleul, passiflore, etc.