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Fiche pratique
L’article 223-6 du Code pénal punit celui qui, ayant connaissance d’un péril encouru par un tiers, ne lui apporte pas une assistance appropriée : c’est ce qu’on appelle la non-assistance à personne en péril.
L’article 223-6 du Code pénal, lequel s’applique à tout citoyen, dispose : « Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité corporelle de la personne, s’abstient volontairement de le faire, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende. Sera puni des mêmes peines quiconque s’abstient volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour luiou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours. »
Cette obligation est rappelée dans le Code de la santé publique, à l’article R. 4312-6, qui énonce : « L’infirmier ou l’infirmière est tenu de porter assistance aux malades ou blessés en péril. »
La Cour de cassation a maintes fois rappelé qu’une condamnation sur la base de la non-assistance en péril ne pouvait se concevoir que si le praticien dont l’assistance a été demandée a eu personnellement conscience du caractère d’imminente gravité du péril auquel se trouvait exposée la personne dont l’état requérait secours et qu’il n’ait pu mettre en doute la nécessité d’intervenir immédiatement en vuede conjurer ce péril (Cass. Crim. 6 mars 2012). Le péril doit non seulement être imminent mais également constant (Cass. Crim. 24 mars 2009).
Pour que l’infraction soit caractérisée, il faut un péril grave, imminent et constant ; la conscience, par le praticien, du péril et la possibilité matérielle d’intervenir ; une abstention, volontaire, de porter secours ; une intervention sans risque pour la personne qui intervient ou pour les tiers.
La notion de péril a été définie non pas par la loi mais par la jurisprudence : « situation par laquelle il pèse sur une personne un danger grave, imminent et constant, de nature à nécessiter une intervention immédiate » (Cass. Crim. 31 mai 1949). Il peut donc s’agir d’une agression physique, d’un accident, d’une maltraitance, d’une tentative de suicide, etc. Le danger doit être soudain et imprévisible. Les juges ne prennent pas en compte les constations ultérieures permettant de savoir a posteriori que le secours était illusoire.
Ainsi, dans l’arrêt du 6 mars 2012 évoqué précédemment, les juges ont estimé que le médecin, plusieurs fois appelé par l’infirmière de garde à se déplacer au chevet d’un patient, « compte tenu des circonstances de faits décrites et de sa qualification professionnelle, avait connaissance et conscience d’un péril imminent auquel était exposé le patient, péril dont, en raison de ses qualifications et compétences professionnelles, il ne pouvait mésestimer la gravité ni ignorer les conséquences graves sur le malade ». La Cour de cassation rejettera le pourvoi formé par le médecin et validera donc sa condamnation à dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve pendant dix-huit mois.
Dans l’affaire évoquée précédemment, le médecin a refusé, à plusieurs reprises, de se déplacer, déclarant même : « Je ne viendrai pas, je suis dans mon lit. » Les juges préciseront ainsi que « le docteur X s’est volontairement abstenu de venir au chevet du malade et, s’il a pu prescrire par téléphone des médications et bilans au bien-fondé non contesté, il a, en ne se déplaçant pas, privé le malade d’un examen médical qui était le seul moyen approprié de lui porter secours ou assistance ». Dans certaines situations, notamment si le médecin estime qu’il n’a pas les compétences nécessaires pour intervenir (un gastro-entérologue interpellé pour un problème pulmonaire par exemple), il peut se libérer de son obligation en provoquant un secours, à savoir en contactant soit un confrère, soit les services d’urgence.
Si la loi oblige les gens à être charitables, elle ne leur demande cependant pasde faire preuve d’héroïsme. L’intervention doit donc pouvoir se faire sans risque, non seulement pour le praticien qui intervient, mais également pour les tiers. Ainsi, si un professionnel de santé peut être poursuivi pour non-assistance à personne en péril pour ne pas s’être arrêté alors qu’il a été témoin d’un accident de la route, il ne sera pas poursuivi pour ne pas avoir tenté de sortir un accidenté d’une voiture en feu.
→ Juriste en droit pénal et droit de la santé
→ Formatrice en secteur libéral et hospitalier