Cahier de formation
Savoir
En 2009, le diabète concernait en France plus de 3,5 millions de personnes, dont plus 90 % de DT2, soit les statistiques attendues… pour 2016
Le diabète est une maladie métabolique, caractérisée par une hyperglycémie (HPG) chronique consécutive à une déficience, soit de la sécrétion de l’insuline, soit de l’action de l’insuline, soit des deux. Selon les critères retenus par la Haute Autorité de santé (HAS)
→ une glycémie (G) à jeun supérieure ou égale à 1,26 g/l (7 mmol/l) vérifiée à deux reprises sur des journées distinctes ;
→ ou une G supérieure ou égale à 2 g/l (11,1 mmol/l) à n’importe quel moment de la journée associée à des symptômes cliniques (polyurie, polydipsie, amaigrissement) ;
→ ou une G supérieure ou égale à 2 g/l (11,1 mmol/l), deux heures après une charge orale de 75 g de glucose.
À noter : un patient qui présente de manière régulière une G comprise entre 1,10 g/l et 1,26 g/l à jeun est en HPG et à risque de devenir diabétique. Dans ce cas, des mesures hygiéno-diététiques sont recommandées.
Les principales formes de diabète sont le diabète de type 1 (DT1) ou diabète insulinodépentant (DID) encore appelé diabète “maigre” ou “juvénile”, et le diabète de type 2 (DT2), également appelé “diabète non-insulinodépendant” (DNID) ou diabète “gras”. Si ces deux types de diabète résultent d’une HPG chronique, en revanche, leur étiologie ainsi que le contexte de survenue de la maladie et la population concernée sont très différents.
Il concerne 6 % des diabétiques
Le DT1 est consécutif à la destruction progressive des cellules bêta (ß) des îlots de Langerhans chargées de la production d’insuline. Cette destruction conduit à une carence absolue en insuline qui empêche la pénétration du glucose dans les cellules, provoque son accumulation dans le sang (HPG) et justifie la mise en place d’un traitement compensatoire par insuline à vie. Ses véritables causes restent à déterminer.
Il apparaît quand plus de 80 % des cellules ß ont été détruites
Le DT1 peut survenir à tous les âges, mais se déclare principalement chez l’enfant et le jeune adulte avant l’âge de 20 ans avec un pic d’incidence vers 12 ans puis vers 40 ans
Elle est estimée entre 3 et 4 % en moyenne
Il concerne un peu plus de 91 % des diabétiques
Le DT2 est provoqué par une perturbation du métabolisme glucidique qui se caractérise par deux mécanismes associés à des degrés variables :
→ une insulinorésistance favorisée par l’obésité et la sédentarité,
→ une insulinopénie consécutive au dysfonctionnement des cellules ß et à la diminution de l’insulinosécrétion. L’obésité et le manque d’activité physique engendrent un besoin accru en insuline pour réguler l’excès de sucre ingéré et non brûlé. Il en résulte une surproduction d’insuline qui épuise progressivement les cellules insulinosécrétrices du pancréas : la production d’insuline devient insuffisante par rapport à la quantité de sucre à assimiler, ce qui entraîne l’accumulation du glucose dans le sang et l’HPG. Simultanément, les cellules des organes (du foie en particulier), des muscles et des tissus adipeux deviennent résistantes à l’action de l’insuline et n’absorbent plus correctement le glucose, majorant ainsi l’HPG. Enfin, la néoglucogenèse ajoute au défaut de régulation du sucre et contribue à l’HPG matinale à jeun.
Le DT2 peut être révélé par des manifestations fonctionnelles et cliniques traduisant l’HPG : syndrome polyuropolydipsique, asthénie, voire amaigrissement plus occasionnel et moins marqué que pour le DT1. Son développement reste silencieux et asymptomatique pendant de nombreuses années (dix à vingt ans). Son diagnostic est généralement posé fortuitement à l’occasion d’un contrôle biologique ou de la survenue d’une complication (20 % des cas)
Le DT2 se manifeste principalement chez l’adulte après 40 ans, avec un âge moyen du diagnostic proche de 60 ans et une incidence maximale située entre 75 et 79 ans. Les personnes concernées présentent typiquement une surcharge pondérale de prédominance abdominale
À noter : le DT2 enregistre une progression constante et inquiétante dès l’enfance, ce qui invite les infirmières libérales à redoubler de vigilance quant aux messages de prévention hygiéno-diététique qu’elles peuvent dispenser auprès des familles.
Le risque de transmission à la descendance est de l’ordre de 40 % lorsque l’un des deux parents est DT2, et de 70 % si les deux parents sont atteints
Quelque 2 % des diabètes sont dits “spécifiques”. Leur étiologie mais aussi l’expression clinique et biologique sont différentes.
Ce diabète, plus fréquent dans la population d’origine africaine et indienne, apparaît entre 30 et 40 ans et se manifeste généralement de manière aiguë par une cétose. Il se soigne par insulinothérapie et présente la particularité d’être temporaire chez de nombreux patients. L’extinction du diabète se traduit par des hypoglycémies (HG) malgré la baisse du traitement, ce qui oblige à diminuer les doses d’insuline jusqu’à l’arrêt complet de l’insulinothérapie
Le diabète Mody (pour Maturity Onset Diabetes of the Young) se présente comme un DT2 mais sans surcharge pondérale associée et survient de manière beaucoup plus précoce, à la fin de l’adolescence ou chez l’adulte jeune (avant 25 ans). Il en existe cinq catégories dont la plus fréquente en France est le Mody II. Le pronostic de cette affection est identique à celui du DT2 “classique”, mais le risque de complications dégénératives dépend du type de mutations génétiques en cause.
Ils correspondent aux HPG provoquées par certains médicaments (corticoïdes, bêtabloquants noncardio-sélectifs, diurétiques hypokaliémiants, notamment).
Ils surviennent au décours de certaines maladies (cancer du pancréas, hémochromatose, pancréatite chronique, hyperthyroïdie…) et doivent être recherchés en cas de doute diagnostique (diabète n’ayant pas les caractéristiques habituelles du DT1 et du DT2).
→ En 2013, plus de 3 millions de Français étaient traités pour un diabète
→ Entre 600 000 et 700 000 personnes ignorent qu’elles sont diabétiques.
→ La prévalence du diabète a augmenté de 5,7 % par an entre 2006 et 2009 et de 2,4 % par an entre 2009 et 2013.
Chaque année, les complications du diabète sont responsables de :
→ 8 000 amputations,
→ 12 000 hospitalisations pour infarctus du myocarde,
→ 4 000 nouveaux cas d’insuffisance rénale chronique terminale,
→ environ 35 000 décès, soit plus de 6 % de l’ensemble des décès.
Le DT2 peut être associé à des complications aiguës (acidocétose, coma hyper-osmolaire, coma hypoglycémique) et chroniques (micro- et macrovasculaires) potentiellement graves, invalidantes, voire mortelles.
Elles atteignent les nerfs et les petits vaisseaux, notamment ceux de la rétine, des reins et des membres inférieurs.
Première cause de cécité avant 65 ans en France, la rétinopathie diabétique concerne plus de la moitié des diabétiques après quinze ans d’évolution déséquilibrée de la maladie
Longtemps asymptomatique, la néphropathie diabétique (NPD) est une complication lourde qui conduit à l’insuffisance rénale et à l’hémodialyse. Elle impose la plus grande prudence dans l’utilisation des médicaments, y compris ceux du diabète
Complication la plus fréquente du DT2, la neuropathie diabétique (ND) touche essentiellement les membres inférieurs mais peut aussi concerner des organes plus profonds comme le cœur, l’estomac, l’intestin, et devient dans ce cas beaucoup plus difficile à traiter. Au niveau des membres inférieurs, ces troubles peuvent être dépistés par un test au diapason (la vibration du diapason posé sur la jambe est mal ou non perçue par le patient) ou un test au monofilament de 10 g, considéré comme le test de dépistage le plus simple et le plus performant
Lorsque la neuropathie sensitive atteint le pied, la moindre petite plaie peut s’infecter et “dégénérer” car le patient ne sent ni douleur, ni gêne à la marche. Ce risque est majoré si la neuropathie est associée à une artériopathie des membres inférieurs. L’infirmière libérale doit inciter le patient à surveiller ses pieds quotidiennement à la recherche de la moindre petite lésion, rougeur, ampoule, déformation, etc., et en contrôlant d’autre part elle-même régulièrement les pieds de ses patients, en s’assurant qu’ils sont bien vaccinés contre le tétanos et en donnant des conseils d’hygiène podologique :
→ couper les ongles au carré, pas trop courts, et poncer la corne avec une pierre ponce douce ;
→ ne jamais marcher pieds nus ;
→ choisir des chaussures confortables et souples, ainsi que des chaussettes en fibre naturelle changées tous les jours ;
→ vérifier la semelle et l’intérieur des chaussures avant de les enfiler afin de s’assurer que rien ne risque de blesser le pied (clou, caillou…) ;
→ en cas de durillon, cor, ampoule et/ou déformation du pied, voir un pédicure-podologue ;
→ dès que le patient n’est plus en mesure d’entretenir ou de surveiller ses pieds, conseiller l’intervention d’un pédicure.
À savoir : après gradation des soins podologiques prescrits par le médecin et réalisés par lui-même ou par un podologue, des soins podologiques sont remboursés par l’Assurance maladie jusqu’à quatre séances par an pour les lésions de grades 2 et jusqu’à six séances par an pour les lésions de grade 3. Si le médecin le juge nécessaire, ces soins peuvent être réalisés à domicile.
La ND peut également atteindre les nerfs sexuels et engendrer des troubles de l’érection, complications à la fois micro- et macrovasculaires. Les hommes en parlent très peu mais il faut y être attentif car c’est un très bon indicateur. Plus la prise en charge est rapide, plus le traitement peut être efficace. L’infirmière aide le patient à verbaliser cette complication, et l’invite à consulter son médecin.
Si le diabète induit une altération des petites artères, il endommage également les grosses veines, majorant les effets de la micro-angiopathie sur le rein, les yeux et les membres inférieurs (artériopathie oblitérante des membres inférieurs, ou AOMI), causant de nombreuses complications cardiovasculaires.
En 1999, un décès sur deux chez les diabétiques était d’origine cardiovasculaire et un sur cinq se trouvait lié à une ischémie myocardique. Au-delà de l’équilibre glycémique, la prise en charge thérapeutique du DT2 doit impérativement rechercher l’amélioration, voire la normalisation tensionnelle et lipidique afin de réduire les risques obstructifs liés à l’artériosclérose.
L’AOMI se caractérise par une atteinte préférentielle des petites artères distales situées entre le genou et les orteils, entraînant une diminution de la lumière artérielle et de la perfusion des muscles et des tissus cutanés des extrémités, en particulier du pied, pouvant évoluer vers la gangrène et l’amputation. Cette atteinte d’évolution lente peut être accélérée par l’accumulation des facteurs de risque : tabagisme, HTA, hypercholestérolémie, surpoids, sédentarité, âge. Chez le diabétique, le risque d’artérite est deux à cinq fois supérieur.
À noter : l’Idel peut vérifier sur un patient en décubitus le délai de recoloration du gros orteil après sa pression (il doit être inférieur à 5 secondes) et, en cas de suspicion d’artériopathie, adresser le patient rapidement au diabétologue pour confirmer le diagnostic et mettre en place le traitement et les contrôles adaptés. Elle peut aussi surveiller les pouls pédieux ainsi que la température des extrémités.
Le traitement du DT2 a pour but d’équilibrer la G afin de prévenir les complications liées aux HPG tout en évitant la survenue d’HG. L’équilibre du diabète doit être évalué à partir du dosage de l’hémoglobine glyquée (HbA1c). Cet examen clé de la prise en charge thérapeutique reflète le taux de G moyen sur les trois derniers mois (lire le tableau indicatif p. 37) et donne une information plus pertinente que la G ponctuelle pour évaluer l’équilibre glycémique sur la période écoulée. Les nouvelles recommandations de la HAS et de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM)
Avant toute démarche de soin, il est important d’identifier à quel stade du “processus de changement” se trouve le patient. L’Idel peut s’appuyer sur la méthode de Prochaska qui permet d’adapter la prise en charge au niveau de motivation du patient. Un patient dans le déni n’est pas réceptif aux messages de changement. Le rôle des soignants consiste à apporter de l’information, de manière à l’amener progressivement à se poser des questions, à s’interroger sur ses habitudes pour que les réponses et les choix qui en découlent viennent de lui, rentrent dans ses habitudes et se consolident. Une démarche que les soignants doivent accompagner au cas par cas, en veillant à adapter la prise en charge hygiéno-diététique et médicamenteuse du patient à son contexte médico-social et à ses difficultés.
Contrairement au DT1 dont le traitement principal est l’insulinothérapie, la prise en charge thérapeutique du DT2 repose, avant toute introduction médicamenteuse, sur l’activité physique ainsi que l’équilibre alimentaire, premier traitement de la maladie.
L’alimentation détermine les apports en sucre et la manière dont ils sont assimilés en fonction de leur index glycémique (IG), notion qui remplace désormais celle de sucres lents (glucides complexes) et rapides (glucides simples). Les aliments à faible IG (< 55) ne nécessitent pas une grosse quantité d’insuline pour être assimilés, contrairement aux aliments à un IG élevé (> 70). Chez le diabétique, contrôler les apports alimentaires en sucre et en graisse permet de réguler la G malgré la production parfois insuffisante d’insuline. Ce contrôle favorise la réduction du poids, donc des graisses, ce qui améliore l’action de l’insuline résiduelle. L’activité physique diminue la résistance à l’insuline, améliore la perméabilité des cellules et des tissus à l’insuline résiduelle et permet une meilleure utilisation du sucre par les muscles. Alimentation et activité physique sont donc complémentaires pour contrôler l’équilibre glycémique et au-delà, pour améliorer les autres facteurs de risques cardiovasculaires du DT2 (dyslipidémie, HTA, surpoids, obésité) et prévenir ses complications
Souvent laborieuse, l’approche diététique du diabète impose d’emblée de bannir le mot “régime” du langage du DT2. « Il est important de faire entendre d’emblée aux patients qu’il n’existe aucun interdit alimentaire et qu’ils peuvent manger de tout raisonnablement, confirme le Dr Alamowitch. La seule réserve concerne le grignotage qu’il faut exclure car il perturbe les mécanismes de régulation de la glycémie. » L’objectif est d’amener le patient à changer durablement ses habitudes alimentaires en limitant la frustration engendrée par la privation pour éviter l’apparition de troubles du comportement alimentaire consécutifs aux restrictions cognitives. Selon Nancy Champalbert
→ normoglucidique (50 à 55 % de l’apport énergétique journalier) en privilégiant les glucides complexes et en limitant les sucres simples ajoutés ;
→ contrôlée en lipides (réduire les graisses saturées et privilégier les acides gras insaturés) ;
→ sans collation injustifiée (elle n’a de sens qu’en rapport avec une activité physique ou si elle est issue du fractionnement des repas) ;
→ modérée en alcool (deux unités par jour).
Bien entendu, ces “consignes” doivent être assorties d’une “négociation” avec les patients en surpoids ou obèses afin de fixer un objectif de perte de poids réaliste et individualisé. Dans ce cas, l’apport énergétique peut être réduit de 15 à 30 % par rapport à la ration habituelle consommée
Une activité physique d’intensité modérée (30 minutes par jour ou 150 minutes par semaine) associée à des conseils diététiques permet de réduire le risque d’apparition du DT2 de 58 % sur un suivi de trois ans
Conformément aux recommandations de la HAS
En dehors de ces prescriptions, les infirmières libérales doivent aussi encourager tous les patients à pratiquer une activité physique régulière, encadrée ou non. Celle-ci ne s’apparente pas forcément à du sport, qui relève plus de la compétition ou de la performance, mais doit venir compléter l’exercice que le patient fait déjà tous les jours en montant les escaliers au lieu de prendre l’ascenseur, par exemple. L’important, c’est que l’activité soit adaptée au patient, pratiquée avec plaisir, régulière, et qu’elle apporte un bénéfice réel. Elle commence à consommer du sucre et devient “thérapeutique” à partir du moment où une sensation de chaleur survient, soit après dix minutes de marche active.
La dimension du lien social est importante dans le processus d’acquisition de la motivation à faire de l’activité physique. Elle rompt l’isolement des patients et favorise l’apprentissage par les pairs. Enfin, « s’engager dans l’activité physique amène les patients à se poser d’autres questions sur leur alimentation, la surveillance de leur glycémie, leur état de santé cardiovasculaire…, explique le Dr Bélaïd, coordinateur du réseau Adiammo (Association diabète et maladies métaboliques de l’Omois). Cela renforce la position d’empowerment (responsabilisation) car le patient prend conscience qu’il gère la situation, s’implique dans son programme de soin, se comporte comme une personne active et consciente de l’importance à agir, ce qui, d’un point de vue comportemental, donne une posture qui favorise une meilleure prise en charge globale de la maladie ».
La prise en charge médicamenteuse du DT2 a connu de nombreuses évolutions avec la mise sur le marché de toutes nouvelles classes de médicaments.
Selon la HAS
À retenir : la majorité des traitements (sauf les inhibiteurs des alpha-glucosidases) permettent de réaliser un gain de 1 % d’HbA1c.
Elle repose sur les biguanides : chlorhydrate et embonate de metformine. Ces médicaments ralentissent la néoglucogénèse (fabrication de sucre par le foie) et augmentent la sensibilité des muscles à l’insuline (ils utilisent mieux le glucose). La metformine est le médicament de référence en première intention chez le DT2.
Sa mauvaise tolérance digestive (douleurs abdominales, diarrhées, flatulences, nausées, vomissements, perte d’appétit) concerne environ 30 % des patients
Arrêter le traitement la veille d’un examen iodé ou d’une intervention chirurgicale (risque d’acidose lactique) et bien s’hydrater les 48 heures suivantes avant de le reprendre.
L’association metformine et sulfamide hypoglycémiant est la bithérapie à privilégier. Les sulfamides hypoglycémiants sont des insulinosécréteurs : ils stimulent la libération d’insuline en fermant les canaux potassiques dans le pancréas.
Le risque principal de la bithérapie est l’HG sévère. Pour éviter ce risque, il est conseillé de
→ commencer le traitement à petites doses puis augmenter progressivement ;
→ ne pas sauter de repas ou ne pas prendre le traitement en cas de jeûne forcé ou de repas volontairement non pris ;
→ éviter les formes à libération prolongée (LP) d’emblée ;
→ mettre en place l’autosurveillance glycémique (lire le point de vue p. 33) et assurer l’éducation thérapeutique du patient afin qu’il puisse en maîtriser l’utilisation ;
→ avoir toujours au minimum trois sucres sur soi en cas de malaise.
Surveiller le poids des patients
En cas d’échec de la bithérapie per os, deux options de trithérapie sont envisageables selon l’algorithme de la HAS.
Si l’écart par rapport à l’objectif d’HbA1c cible est inférieur à 1 %.
→ Ils entraînent un retard à l’absorption du glucose et évitent l’HPG post-prandiale. Ils ont un effet bénéfique sur les triglycérides.
→ Effets secondaires : le sucre non absorbé est dégradé par les bactéries du côlon, ce qui peut générer des gaz, des diarrhées, des douleurs abdominales. Ils sont donc souvent mal tolérés, en particulier chez les sujets jeunes. Les patients doivent être prévenus et l’induction du traitement réalisée progressivement en commençant par de faibles doses. Lorsqu’ils sont bien supportés, ils ne présentent pas d’autres effets indésirables majeurs et sont particulièrement utiles chez le sujet âgé.
→ Les incrétines (GLP1 pour glucagon-like peptide-1 et GIP pour gastric inhibitory polypeptide) ralentissent l’absorption du sucre, augmentent la captation du sucre par les muscles et diminuent la fabrication de glucose par le foie et la sécrétion de glucagon. Leur effet sur la satiété peut aider à la perte de poids. Ils sont à privilégier si l’indice de masse corporelle (IMC) est supérieur à 30.
→ Du fait de leur demi-vie très courte (une à deux minutes), elles restent très peu dans la circulation. Il a donc fallu trouver des stratégies pour les rendre plus efficaces. La première a consisté à inhiber l’enzyme qui le détruit : c’est le rôle que remplissent les gliptines ou inhibiteurs de la dipeptidyl-peptidase 4. La deuxième a consisté à faire un analogue qui résiste à l’action de cet enzyme (l’analogue du GLP1)
Ces médicaments sont très bien tolérés sur le plan digestif en général, malgré de possibles nausées ou vomissements. En cas de douleurs abdominales, il est recommandé d’alerter le médecin ou les urgences afin d’écarter une pancréatite aiguë.
Le traitement est injectable en stylo et il favorise la perte de poids. La durée d’action est prolongée (12 heures).
→ Effets indésirables : nausées, vomissements (une prescription progressive favorise l’accoutumance au traitement), perte d’appétit exceptionnelle (elle peut entraîner l’arrêt du traitement chez certains patients), pancréatite.
→ Attention : la présentation en stylo similaire à celle de l’insuline peut entraîner des confusions. Les infirmières libérales doivent donc bien expliquer que ce n’est pas de l’insuline, que les aGLP1 ne provoquent pas d’HG et qu’en cas d’HG, il ne faut pas modifier la posologie de ce traitement mais en rechercher la cause ailleurs (sulfamide hypoglycémiant, insuline, activité physique non anticipée…) pour l’identifier et adopter les mesures correctrices.
→ En pratique : pas d’adaptation de dose à faire ; injection par voie sous-cutanée dans n’importe quel site ; la solution doit être limpide. Dans le cas contraire, ne pas l’injecter. Lorsque l’aGLP1 est associé à une insuline, différencier les sites d’injections.
→ À savoir : le Byduréon, un traitement LP à injection hebdomadaire (2 mg), vient d’être commercialisé (lire aussi p. 50 dans notre rubrique “Info produits”).
Si l’écart par rapport à l’objectif d’HbA1c cible est supérieur ou égal à 1 % ou en cas d’échec de la trithérapie orale.
Traitement ultime du DT2, l’insulinothérapie est également le seul traitement médicamenteux du diabète gestationnel. Sa mise en place doit faire l’objet d’une discussion avec le patient, et/ou son entourage, dans le cadre de l’éducation thérapeutique du patient (ETP). Elle doit être accompagnée d’une autosurveillance glycémique qui nécessite un apprentissage technique et un accompagnement éducatif (sur les différents types d’insuline, lire le Point sur p. 46).
Les patients insulinotraités doivent apprendre à éviter les lipodystrophies (LPD) en multipliant les sites d’injections et en organisant la rotation des injections sur chaque site selon un schéma préalablement validé avec l’Idel et inscrit sur le carnet de surveillance. Il est préconisé, pour un même type d’insuline, de garder le même site d’injection, de l’utiliser aux mêmes horaires chaque jour et de respecter un espacement de deux travers de doigt entre chaque point d’injection en alternant systématiquement les deux parties du corps (D/G). Cela permet également d’assurer une meilleure reproductibilité de l’action de l’insuline. Au niveau du ventre, les injections devront être réalisées en veillant à piquer à distance du nombril (douloureux, peau plus fine). Utiliser la main du patient posée en éventail sur le nombril comme repère anatomique de la zone à épargner.
En fonction du patient, deux options sont envisageables :
→ utiliser la même technique d’injection pour tous les sites et adapter la longueur des aiguilles à l’épaisseur du tissu sous-cutané (l’épaisseur du derme est de 2 mm quel que soit l’individu),
→ utiliser la même longueur d’aiguille quel que soit le site et adapter la technique d’injection (avec ou sans pli/angle d’injection ou non) à l’épaisseur du tissu sous-cutané.
Ce choix important doit être discuté avec le patient dans le cadre de l’ETP. De même, il convient également d’expliquer aux patients que l’insuline ne doit être injectée qu’en sous-cutané car une injection intramusculaire entraîne un risque d’HG (résorption plus rapide).
Les lipodystrophies forment des amas graisseux localisés (lipohypertrophies) ou des déformations en creux (lipoatrophies) généralement liés à une mauvaise technique d’injection de l’insuline. C’est une source d’instabilité du diabète souvent ignorée des patients DT2 et face à laquelle l’Idel doit :
→ informer ses patients,
→ leur rappeler les mesures de prévention : multiplication et rotation des sites, changer les aiguilles, veiller au choix de l’aiguille,
→ leur apprendre à les dépister : palper les zones d’injection à la recherche de bosses, de creux, d’indurations,
→ leur donner la marche à suivre : pratiquer les futures injections à distance, laisser la zone en repos au minimum quinze jours, ne pas utiliser d’alcool pour désinfecter, éviter de piquer en pinçant la peau, ne pas masser.
À noter : un hématome ou une douleur au point d’injection signe une injection intramusculaire.
Elle permet d’éviter les injections répétées tout en mimant la sécrétion continue d’insuline par le pancréas. Actuellement, 4 000 patients souffrant de DT2 sont équipés de pompes à insuline. Une étude récente (Opt2mise) a mis en évidence qu’une utilisation ciblée de la pompe à insuline permet d’améliorer le contrôle glycémique chez les DT2 en échec d’une insulinothérapie basal-bolus intensifiée avec un avantage net lorsque l’HbA1c était au départ supérieure à 8,5 %. Après un suivi moyen de cinq ans, une amélioration de - 1,5 % était enregistrée et maintenue au fil du temps
Le diabète fait l’objet de nombreuses recherches. Les dernières avancées majeures concernent la production de lignées fonctionnelles de cellules ß humaines sécrétrices d’insuline à partir de cellules souches embryonnaires, la mise sur le marché prochaine en France des inhibiteurs co-transporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2) et les capteurs de glycémie en continu commercialisés fin 2014 sous le nom de Système FreeStyle Libre (Abbott). Insérés sous la peau du bras, ces capteurs permettent de suivre la G pendant quatorze jours, à tout moment de la journée, sans avoir à se piquer, à l’aide d’un lecteur externe qui scanne les données et affiche une flèche indiquant le sens et l’intensité de l’évolution de la G. Ce dispositif coûteux (59,90 euros) et non remboursé est principalement prescrit aux DT1 sous pompe à insuline et aux femmes enceintes. Il est également utilisé par certains réseaux dans le cadre de stages d’ETP pour faire prendre conscience aux patients en difficulté avec leur DT2 des fluctuations parfois impressionnantes de leur glycémie, y compris la nuit, et leur permettre de mesurer l’impact immédiat que peuvent avoir certains changements de comportement hygiéno-diététique (lire le point de vue p. 41).
Globalement, si des améliorations sont observées dans le suivi des patients diabétiques, celles-ci restent insuffisantes face aux objectifs actuels de santé publique
Il est à faire tous les trois mois en cas de diabète mal équilibré et au minimum deux fois par an pour les patients bien équilibrés.
Tous les trois ou six mois, une consultation est nécessaire pour commenter l’HbA1c, contrôler le poids, l’IMC, la pression artérielle, faire le point sur les difficultés rencontrées, aborder l’arrêt du tabac et rappeler l’importance de l’hygiène de vie dans l’équilibre du diabète.
Les examens, en dehors de toute complication préexistante qui justifierait un suivi plus rapproché, doivent être réalisés tous les ans.
→ Bilan lipidique + ECG : cholestérol total, HDL-C (high density lipoprotein cholesterol, cholestérol des lipoprotéines de haute densité), LDL-C (low density lipoprotein cholesterol, cholestérol des lipoprotéines de basse densité), triglycérides.
→ Bilan rénal : créatininémie sanguine (elle doit être inférieure à 14 mg/l, 124 µmol) et estimation du débit de filtration glomérulaire afin d’apprécier la fonction rénale : si la créatinine est élevée et la clairance de la créatinine diminuée, le rein fonctionne mal. Recherche d’albuminurie sur échantillon urinaire.
→ Bilan opthalmologique (fond d’œil) : si le patient est équilibré avec une HbA1c inférieure à 7 %, l’examen pourra être réalisé tous les deux ans. En cas de doute, l’examen peut être complété par une angiofluorographie (radiographie) qui permet de détecter et de corriger par photocoagulation laser de toutes petites lésions.
→ Bilan dentaire : tout foyer infectieux, y compris dentaire, déséquilibre le diabète. L’infirmière libérale doit donc informer ses patients sur ce point et s’assurer également que le suivi dentaire est réalisé et que le dentiste est informé. À noter, l’existence d’une prévalence plus importante des gingivites chez les patients diabétiques.
(1) “Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses : propositions de l’Assurance maladie” pour 2014 et 2015, Rapport sur les charges et produits 2013 et 2014, à télécharger via le lien raccourci bit.ly/1Mnv57c
(2) “Guide parcours de soins, Diabète de type 2 de l’adulte”, HAS, 2014, via bit.ly/1dvEkGE
(3) “Prévalence et incidence du diabète”, synthèse épidémiologique, Anne Fagot-Campagna et coll., InVS 2010, via bit.ly/1yGIFyA
(4) Pr Christian Boitard, dossier sur le DT1, Inserm, 2014 (www.inserm.fr).
(5) “Diabétologie - Questions d’internat 1999-2000”, Pr Grimaldi, via bit.ly/1MnvPJm
(6) Fédération française des diabétiques, www.afd.asso.fr
(7) Entretien avec Dr Catherine Alamowitch, endocrinologue à Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis), ancien chef de clinique de diabétologie et de nutrition à l’Hôtel-Dieu de Paris (AP-HP), consultant expert auprès de la HAS.
(8) InVS, données chiffrées, mise à jour 2014 (www.invs.sante.fr).
(9) Dr Cohen, intervention aux Journées nationales des infirmiers libéraux (Jnil), 2015.
(10) Société francophone du diabète paramédical (www.sfdiabete.org).
(11) “Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2”, 2013, HAS et ANSM. Un tableau récapitule les objectifs glycémiques cibles selon la typologie du patient. Via bit.ly/1FTdKyy (12) Intervention aux Jnil, 2015.
(13) “Finnish Diabetes Prevention Study”, 2001 ; “Diabetes Prevention Programme Study”, 2002.
(14) Instructions n° 434 relatives à la mise en œuvre opérationnelle des mesures visant à promouvoir la pratique des activités physiques comme facteur de santé publique.
(15) “Pompe à insuline et DT2”, Équilibre, n° 303, janvier-février 2015.
(16) Bulletin épidémiologique hebdomadaire n° 42-43, 10 novembre 2009.
Une obésité modérée (IMC entre 30 et 35) multiplie le risque d’apparition d’un DT2 par un facteur 2, une obésité sévère (IMC entre 35 et 40) par un facteur 5 et une obésité morbide (IMC supérieur à 40) par un facteur 10. Par ailleurs, la répartition androïde des graisses (au niveau abdominal sous-cutané et viscéral) multiplie par un facteur 3 à 6 le risque d’apparition d’un DT2 comparé à une population de poids identique ayant une répartition des graisses de type gynoïde (fesses et cuisses). Non seulement le stockage et l’élimination du glucose sont diminués au niveau musculaire, mais le tissu adipeux viscéral libère une grande quantité d’acides gras libres qui favorisent la synthèse hépatique des triglycérides et stimulent la néoglucogenèse hépatique. Concomitants, ces deux phénomènes concourent à l’élévation de la glycémie et à la constitution d’une HPG chronique.
Source : Physiopathologie du DT2, Pr F. Duron & coll.
Catherine Alamowitch, endocrinologue, Livry-Gargan (Seine-Saint-Denis)
« Dans le DT2, l’autosurveillance glycémique est complémentaire de l’HbA1c. Elle doit être employée à des fins précises (patient sous sulfamide hypoglycémiant ou glinides, sous insuline ou en prévision du passage à l’insuline, grossesse, difficultés à atteindre l’objectif glycémique) etn’est recommandée que si les résultats sont susceptibles d’entraîner une modification de la thérapeutique. Elle doit donc être comprise et utilisée à bon escient, sachant que les DT2 sous insuline ont droit, comme les DT1, à un lecteur tous les quatre ans, un autopiqueur tous les ans et des bandelettes illimitées, mais que les DT2 traités per os n’ont droit qu’à 200 bandelettes par an, ce qui correspond à trois ou quatre contrôles par semaine. Chez ces patients, la surveillance n’a d’intérêt que pour la détection des hypoglycémies et doit comporter jusqu’à deux contrôles par jour à des moments différents de la journée pendant au moins deux jours par semaine. On peut également utiliser l’autosurveillance glycémique chez des patients qui ont une HbA1c élevée mais des glycémies à jeun normales en ciblant la période post-prandiale pour vérifier que le médicament fait bien son office après les repas et, le cas échéant, ajuster le traitement. Chez les patients bien équilibrés, certains diabétologues préconisent de réaliser des glycémies par cycle, tous les quinze jours ou tous les mois à raison de six contrôles par jour avant et après chacun des repas pour contrôler leur profil glycémique. »
Éric Drahi, médecin, coordonnateur médical du Réseau Diabolo (Diabète Orléans Loiret)
« En 2001, le réseau Diabolo a mis en place les premiers ateliers ambulatoires de reprise de l’activité physique pour les patients diabétiques en grande difficulté avec leur maladie. Nous avons élaboré des programmes sécurisés afin de les aider à recouvrer l’envie de bouger et à obtenir des bénéfices tangibles en termes d’équilibre glycémique et de qualité de vie. Résultat : non seulement ces ateliers désinhibent et réconcilient les patients avec leur corps, mais ils leur permettent aussi de redécouvrir des sensations et de se sentir mieux, ce qui les encourage à persévérer. Associée aux ateliers diététiques, aux groupes de parole et à l’ETP également proposés par le réseau, l’activité physique permet d’atteindre une diminution moyenne de l’HbA1c de 0,8 % avec des résultats d’autant plus probants que les patients ont initialement les taux les plus élevés. Tous les patients qui avaient une HbA1c supérieure à 10 % ont normalisé leur glycémie à 7 % ou moins. »
Lancé en 2008 par l’Assurance maladie pour améliorer la prévention des complications chez les DT2, le dispositif Sophia comptait, fin 2014, 536 000 patients diabétiques adhérents. Ceux-ci, après inscription, bénéficient par téléphone de conseils personnalisés, de soutien dans la prise en charge de leur pathologie, d’écoute et d’informations prodiguées par 270 infirmiers-conseillers en santé (ICS). Les Idels sont parfois partagées quant à la pertinence des conseils donnés par les ICS qui, faute de toujours avoir la globalité des informations nécessaires à l’analyse de la situation, font parfois abstraction d’éléments de contexte importants qui peuvent donner lieu à des consignes contradictoires mettant les Idels en porte-à-faux vis-à-vis des patients.
→ Pour accéder au service : www.ameli-sophia.fr