L'infirmière Libérale Magazine n° 318 du 01/10/2015

 

Troubles du sommeil

Cahier de formation

Le point sur

ANNE-GAËLLE HARLAUT  

Le syndrome d’apnées du sommeil altère la qualité du repos et expose à un risque accru d’accidents corporels et de troubles cardiovasculaires, métaboliques et psychosociaux. Des dispositifs médicaux existent pour améliorer la qualité de vie et éloigner ces risques.

Qu’est-ce que le syndrome d’apnées du sommeil (SAS) ?

→ C’est un trouble du sommeil caractérisé par des interruptions (apnées) ou des réductions de la ventilation (hypopnées) de fréquence anormale et de durée supérieure à 10 secondes.

→ La définition de la Société de pneumologie de langue française (SPLF) implique au moins cinq épisodes d’apnées et/ou hypopnées par heure, associés à une somnolence diurne excessive et/ou au moins deux des symptômes suivants : ronflements sévères, sensation d’étouffement, sommeil non réparateur, fatigue diurne, difficultés de concentration, nycturie (plus d’un lever par nuit pour uriner).

Est-ce fréquent ?

On estime qu’en France, 2 à 5 % des adultes sont concernés, soit 1 à 3 millions de personnes. Environ 2 % des enfants de 2 à 6 ans sont touchés, le plus souvent à cause d’amygdales et végétations de grande taille.

Quelles sont les causes ?

→ Dans 90 % des cas, le SAS est dû à un blocage du flux d’air : quand le patient s’endort, les muscles des voies aériennes se relâchent et rétrécissent le conduit respiratoire. L’obstruction des voies aériennes supérieures provoque la vibration des tissus (ronflement), voire des apnées et hypopnées. On parle alors de syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil.

→ Plus rarement, le SAS est d’origine centrale, lié à un dysfonctionnement primaire des centres cérébraux de la respiration ou secondaire à une affection (insuffisance cardiaque…), ou mixte (origine centrale et obstructive).

Quelles sont les conséquences ?

Chaque apnée/hypopnée diminue l’oxygénation sanguine (hypoxie). Par réaction, la fréquence cardiaque s’accélère et la tension artérielle augmente jusqu’à un micro-réveil qui permet de reprendre sa respiration. Le cycle de sommeil est sans cesse interrompu (parfois des centaines de fois dans une nuit), provoquant un déficit de sommeil profond réparateur.

Quelles sont les manifestations ?

Signes cliniques

→ Perçus par l’entourage : ronflement bruyant, pause respiratoire, agitation, micro-réveils, somnambulisme…

→ Perçus par le patient la nuit : réveils avec sensation d’étouffer, des sueurs profuses, une nycturie. La journée : somnolence et/ou fatigue, céphalées, troubles de la libido…

Comorbidités

→ Risque d’accident de la route majoré.

→ Troubles de l’humeur : irritabilité, hyperactivité et/ou dépression.

→ Facteur de risque de maladies cardiovasculaires (athérosclérose, hypertension artérielle, coronaropathies, accident vasculaire cérébral, troubles du rythme, insuffisance cardiaque…) et diabète de type 2.

Quels sont les facteurs favorisants ?

→ Surpoids (dépôts de graisse dansl’arrière-gorge).

→ Âge et sexe masculin.

→ Obstruction nasale : polype, antécédents ORL, allergies…

→ Morphologie : position des mâchoires, de la langue, du palais, taille des amygdales…

→ Alcool, tabac, médicaments sédatifs (opiacés, hypnotiques…).

→ Pathologies cardiovasculaires, diabète, hypothyroïdie, antécédents d’accident vasculaire cérébral et d’accident ischémique transitoire.

Comment se fait le diagnostic ?

Il est orienté par les signes cliniques puis confirmé par des examens d’exploration du sommeil en centre spécialisé.

À savoir : des tests simples peuvent aider au dépistage du SAS, en évaluant la sévérité de la somnolence diurne (voir tableau).

Quels sont les traitements ?

L’objectif du traitement est de maintenir ouvertes les voies aériennes de façon à diminuer les épisodes obstructifs. Selon la HAS*, il est nécessaire à partir d’un SAS modéré ou sévère, soit un nombre d’apnées/hypopnées par heure de sommeil ou IAH (indice d’apnées/hypopnées) supérieur ou égal à 15 et présence d’au moins trois des symptômes suivants : somnolence diurne, ronflements sévères et quotidiens, sensation d’étouffement ou de suffocation pendant le sommeil, fatigue diurne, nycturie, céphalées matinales.

Les règles hygiéno-diététiques

→ Réduire son poids si besoin.

→ Éviter les repas copieux le soir et la position dorsale la nuit.

→ Éviter les traitements sédatifs (en particulier benzodiazépines et apparentés) et l’alcool.

La pression positive continue (PPC)

→ Principe. Pendant le sommeil, un appareil propulse de l’air ambiant sous pression dans les voies aériennes supérieures pour limiter leur obstruction. Le générateur de pression (boîtier) est relié par tubulure à un masque narinaire, nasal ou facial tenu en place par un harnais.

→ Indications. Dispositif recommandé en première intention lorsque l’IAH est supérieur à 30, et, lorsque l’IAH est compris entre 15 et 30, en présence d’un sommeil de mauvaise qualité ou d’une maladie cardiovasculaire grave associée. Le port est recommandé durant toute la durée du sommeil, y compris les siestes, et pendant au moins quatre heures par jour.

À savoir : les arrêtés du 9 janvier et du 22 octobre 2013 qui conditionnaient la prise en charge à l’observance des patients (objectivée par un système individuel de télésurveillance transmise à l’Assurance maladie) ont été annulés en février 2014.

L’orthèse d’avancée mandibulaire

→ Principe. Deux gouttières amovibles placées sur la mâchoire supérieure et inférieure (mandibule) maintiennent la mandibule et la langue en position avancée de façon à augmenter le calibre des voies aériennes supérieures.

→ Indications. En première intention, lorsque l’IAH est compris entre 15 et 30 en l’absence de maladie cardiovasculaire grave associée, ou en deuxième intention après la PPC quand elle est mal tolérée. Le port est recommandé durant toute la durée du sommeil.

La chirurgie

Elle est fréquente chez l’enfant, pour lequel l’ablation des amygdales et des végétations donne de bons résultats. Elle est plus rare chez l’adulte, guidée surtout par des critères anatomiques : chirurgie nasale pour redresser un septum, ablation de polypes, ostéotomie d’avancement des maxillaires (sectionner puis avancer la mâchoires pour dégager les voies aériennes).

*“Évaluation clinique et économique des dispositifs médicaux et prestations associées pour la prise en charge du syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS)”, Haute Autorité de santé, 2014.

Comment aider au dépistage ?

• L’échelle de somnolence d’Epworth permet un dépistage rapide du risque de syndrome d’apnées du sommeil. Il peut être pratiqué par tout professionnel de santé pour évaluer la nécessité d’une consultation spécialisée.

• Vous arrive-t-il de somnoler ou de vous endormir dans les situations suivantes : 0 : aucune chance ; 1 : faible chance ; 2 : chance moyenne ; 3 : forte chance