Plusieurs régions expérimentent les astreintes mutualisées d’infirmières, de nuit, entre Ehpad, afin de limiter les transferts aux urgences. L’occasion, pour François Bertrand, 53 ans, Idel à Olonne-sur-Mer (Vendée), de retrouver une certaine liberté de diagnostic. Rencontre.
" J’ai été contacté par la coordinatrice de l’un des Ehpad pour entrer dans ce dispositif qui nécessitait des infirmières pour fonctionner. Depuis 2010, je travaille en libéral, en tant que remplaçant dans deux cabinets. Mais, auparavant, j’avais travaillé aux urgences pendant dix-huit ans et j’avais envie de renouer le contact avec le milieu hospitalier. Je souhaitais retrouver une certaine liberté de diagnostic, être seul face à des patients et des situations parfois délicates. La dimension financière n’a pas beaucoup joué dans ma décision de rejoindre ce dispositif (les astreintes sont payées 4,36 euros de l’heure à domicile et 28,16 euros l’heure d’intervention sur place, sans compter les indemnités de déplacement). J’apprécie la souplesse d’organisation du planning : selon ma charge de travail journalière, je peux choisir le nombre d’astreintes de nuit que je vais effectuer dans le mois. Par exemple, en juillet-août, j’avais déjà une surcharge de travail en journée sur les Sables d’Olonne. J’ai donc préféré ne pas prendre d’astreinte car il faut quand même être vigilant lorsqu’on travaille de nuit. Les nuits où je suis d’astreinte, le nombre d’appels est très variable selon les périodes. Les motifs sont variés : j’ai surtout été appelé pour des chutes à répétition et des fractures du col du fémur ; mais aussi pour des fins de vie, avec des familles en attente de réponses. Je préfère me déplacer, car j’estime qu’on a une meilleure appréhension de la situation lorsqu’on se trouve face au malade. C’est plus rassurant pour moi, mais aussi pour l’équipe sur place. Je tiens d’ailleurs à souligner que les équipes soignantes nous ont très bien accueillis et font du bon travail. Les résidants aussi sont rassurés de voir un paramédical arriver assez vite. Le fait d’avoir fait un certain nombre d’années de travail, notamment aux urgences, me rend plus armé face à ces situations. Ce n’est peut-être pas un dispositif à conseiller d’emblée à des jeunes infirmiers car il faut de l’expérience à la fois dans le médical et dans les relations avec les familles. »
Lydie Remaud, infirmière coordinatrice à l’Ehpad Jardin d’Olonne
« La mutualisation est en place depuis janvier 2014. Au départ, nous avions quatre à cinq infirmières dans l’équipe d’astreinte et ce n’était pas suffisant. Actuellement, le dispositif fonctionne très bien avec huit infirmières (quatre salariées de l’Ehpad, deux Idels, une infirmière territoriale et une retraitée) : chacune effectue trois à quatre astreintes par mois. La même équipe tourne sur cinq établissements. L’organisation s’est faite en amont : pré-visite de chaque établissement et remise d’un portfolio contenant les consignes d’accès ; homogénéisation des kits d’intervention d’urgence entre les établissements ; remise d’une fiche de poste ; suivi par mail pour le planning et réunions mensuelles au départ. En 2014, les infirmières d’astreinte ont reçu 81 appels, dont 64 ont donné lieu à un déplacement. Les retombées sont très positives : sur 50 hospitalisations potentielles, 39 ont été évitées en 2014. Avant, nous avions des appels systématiques au Samu après minuit et beaucoup de transfert aux urgences. »