L'infirmière Libérale Magazine n° 320 du 01/12/2015

 

CANCÉROLOGIE

Actualité

Cécile Almendros  

COORDINATION > Dans le cadre du parcours personnalisé en cancérologie impulsé par les Plans cancer, un projet auvergnat expérimente un dispositif de coordination ville-hôpital basé sur un socle intégralement libéral confié à des infirmiers.

Fin 2014, l’URPS (Union régionale des professionnels de santé)-infirmiers d’Auvergne et le réseau régional de cancérologie Oncauvergne ont répondu à un appel à projets lancé par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS)(1) pour sélectionner dix équipes de premier recours destinées à intégrer la phase II de l’expérimentation d’infirmiers de coordination en cancérologie (Idec).

Première phase à l’hôpital

La première phase, démarrée en 2010 dans le cadre du Plan cancer 2009-2013, avait vu la mise en place d’Idec dans 35 établissements de santé. L’évaluation du dispositif en 2012 a fait apparaître des résultats contrastés : si le confort psychologique des patients, l’observance des traitements et la fluidité des parcours impliquant plusieurs sites hospitaliers s’en trouvaient améliorés, les effets sur la coordination ville-hôpital étaient en revanche « moins clairement appréhendés », selon la DGOS. D’où l’idée de tester un modèle de coordination partant de la ville : un projet financé par le fonds d’intervention régional, à hauteur de 700 000 euros par an, sur trois à quatre ans.

Seconde phase en ville

Le cahier des charges de cette seconde phase d’expérimentation prévoit « le recentrage des patients bénéficiaires sur les situations complexes »(2) et insiste sur l’« évaluation médico-économique pour déterminer les avantages respectifs d’une coordination assurée par les professionnels de ville versus des professionnels de l’hôpital ». Si l’appel à candidatures ciblait plutôt « les structures d’exercice pluridisciplinaire » et invitait à créer des postes d’Idec, l’originalité du projet auvergnat consiste à ne pas s’être appuyé sur des structures, mais sur des infirmiers libéraux en activité. « Nous voulions profiter de la connaissance du terrain des Idels, mettre l’accent sur la proximité et développer l’idée que la coordination est au cœur du métier des Idels », argumente Phillipe Rey, président de l’URPS-infirmiers d’Auvergne et chef de projet.

Astreinte téléphonique

Depuis avril, Onc’Idec – c’est le nom du dispositif – se déploie dans douze communes de l’agglomération clermontoise, intégrant les professionnels de santé libéraux du périmètre, dont les médecins traitants, les Idels et les pharmaciens, de même que les établissements de santé adhérant à Oncauvergne(3).

À l’URPS-infirmiers, 29 Idec recrutés sur la base du volontariat se relaient sept jours sur sept de 9 à 17 heures pour tenir la permanence téléphonique(4). « Jusqu’ici, on n’a pas eu de journée de carence », se félicite Philippe Rey. Les Idec, rémunérés 200 euros les jours de semaine et 300 les dimanches et jours fériés, ont tous été formés deux jours en juin et une demi-journée en septembre sur les traitements oraux, l’oncologie, la coordination, le burn-out, etc. Une formation « montée de toutes pièces avec Oncauvergne et l’École de formation en cancérologie car ça n’existait pas », précise Philippe Rey. Mi-novembre, quatorze patients bénéficiaient du programme, sur un objectif de vingt-cinq d’ici fin décembre puis vingt-cinq nouvelles inclusions chaque année.

Infirmier libéral depuis près de trente ans, Patrick Carboni, dont le cabinet se situe à Clermont-Ferrand, est volontaire pour consacrer trois jours par mois à Onc’Idec. « Je voulais voir comment on pouvait gérer une coordination en ville », explique-t-il. « La coordination se fait souvent de l’hôpital vers la ville et les problèmes des patients à domicile sont un peu laissés en carafe », constate-t-il.

Dossier de liaison

Sa mission d’Idec ? Faciliter l’articulation entre les professionnels des soins de ville, les professionnels hospitaliers, les patients, leur entourage et les intervenants sociaux, grâce au dossier de liaison, qui sera informatisé et intégré au dossier communiquant en cancérologie auvergnat en 2016. « Un travail de coordination qui m’est très utile pour mes propres patients », témoigne Patrick Carboni.

(1) Instruction N° DGOS/R3/2014/235 du 24 juillet 2014.

(2) Cancers diagnostiqués à un stade avancé ou à pronostic sombre nécessitant d’anticiper l’approche palliative (poumon, pancréas) ; cancers nécessitant une prise en charge pluridisciplinaire (ORL) ou, en fonction des particularités du territoire, partagée entre plusieurs établissements ; situations impliquant une fragilité psychosociale (isolement, personnes âgées).

(3) Trois pôles de cancérologie, un hôpital privé et des établissements de soins de suite et de réadaptation.

(4) Numéro d’appel unique : 04 73 99 00 00.