L'infirmière Libérale Magazine n° 320 du 01/12/2015

 

C’EST DÉJÀ DEMAIN…

Actualité

Chantal Béraud  

(R)ÉVOLUTION > De la fabrication actuelle de médicaments jusqu’à la bioingiénierie tissulaire de demain, les imprimantes 3D et 4D transforment la pratique médicale.

C’est une première mondiale : la Food and Drug administration (l’autorité américaine de la santé) a donné début août son feu vert à la commercialisation d’un premier médicament fabriqué par une imprimante 3D, le Spritam, destiné au traitement de l’épilepsie. Le laboratoire américain Aprecia Pharmaceutical a annoncé sa mise sur le marché début 2016.

« Cette pratique va se généraliser, les législations européenne et française vont probablement suivre l’exemple américain, prédit Narcisse Zwetyenga, professeur d’université, chef de chirurgie plastique et reconstructrice ainsi que de chirurgie maxillo-faciale au CHU Dijon Bourgogne. L’intérêt de fabriquer un médicament en 3D, c’est que cette technologie permet d’agir sur les propriétés physiques du médicament, comme sa porosité, de manière à mieux l’adapter au patient. » C’est justement le cas du Spritam : très poreuse, la pilule peut se dissoudre dans quelques gouttes d’eau en moins de quatre secondes, une formulation améliorée qui devrait aider les patients qui ont du mal à avaler à mieux suivre leur traitement.

Le service de chirurgie maxillo-faciale du CHU de Dijon Bourgogne a été le premier en France à utiliser les imprimantes 3D dans sa pratique quotidienne. « À partir des scanners des patients, nous imprimons en 3D des répliques de leur crâne », explique Narcisse Zwetyenga. Le scanner effectue des coupes millimétriques. Une fois les images traitées par ordinateur, les soignants obtiennent une visualisation du crâne en 3D. Puis la machine le fabrique à l’identique, couche par couche, grâce à une technique additive de construction. « On imprime la partie qui nous intéresse pour mieux l’étudier. On peut aussi répéter dessus à l’avance certains gestes de l’intervention, pour s’entraîner. » Des plaques avec vis peuvent aussi être prémodelées, afin de gagner en temps et en précision, par exemple durant une opération d’une fracture de la mâchoire. « La chirurgie de demain s’oriente vers du sur-mesure pour chaque patient, au lieu d’utiliser du matériel standard. »

« Quant aux Idels, elles verront des patients qui disposeront non plus de plâtres, mais d’attelles en résine confectionnées sur-mesure… Il sera donc possible de les enlever pour faire les soins, puis de les remettre. » L’avenir, c’est aussi le développement futur de la bioimpression et de la bioingénierie tissulaire. « Avec les imprimantes?4D, du tissu vivant évoluera et s’adaptera à l’intérieur de l’organisme. L’ingénieur est déjà rentré au bloc opératoire et n’en sortira plus ! Demain, on sera plus ingénieur que chirurgien. »