S’ils restent le plus généralement idiopathiques (sans cause retrouvée), les retards de croissance peuvent aussi témoigner de nombreuses pathologies. Un traitement par hormone de croissance n’est proposé que dans des cas très spécifiques.
→ La croissance est un phénomène complexe, influencé à la fois par la génétique et l’environnement, s’arrêtant en moyenne vers 15-16 ans chez les filles et 16-17 ans chez les garçons.
→ De nombreuses hormones interviennent dans la croissance. Parmi celles-ci : l’hormone de croissance (GH pour growth hormone en anglais, ou somatropine), sécrétée au niveau hypophysaire et qui provoque la synthèse et la sécrétion d’IGF-1 (insuline like growth factor) intervenant dans la maturation et la croissance osseuse ; les hormones sexuelles (testostérone, œstrogènes), qui déclenchent le pic de croissance pubertaire et accélèrent la maturation des cartilages de croissance (leur soudure prématurée entraîne un risque de petite taille définitive en cas de puberté précoce) ; les hormones thyroïdiennes, une hypothyroïdie entraînant un retard statural sévère et un déficit intellectuel ; la vitamine D et la parathomone (ou hormone parathyroïdienne) qui régulent le métabolisme phosphocalcique.
La plupart des retards de croissance sont considérés comme une “petite taille idiopathique” : il s’agit d’enfants en bonne santé, chez lesquels il est impossible de trouver une origine à la petite taille.
En dehors de cette situation, on distingue les causes constitutionnelles de retard de croissance, les plus fréquentes, et les causes acquises.
Il peut s’agir d’un retard de croissance intra-utérin (RCIU ou SGA pour small for gestational age), lié à un tabagisme, un alcoolisme, un trouble placentaire ou une grossesse multiple. La plupart des enfants concernés rattrapent naturellement le retard dans les deux premières années de vie. Il peut aussi s’agir de maladies osseuses ou génétiques. Parmi ces dernières figurent en particulier le syndrome de Turner qui touche les filles et entraîne également des troubles cardiovasculaires ; le syndrome de Prader-Willi associant par ailleurs obésité morbide et troubles du comportement ; la mutation du gène SHOX (pour short stature homeobox-containing gene) s’accompagnant de déformations osseuses ; le déficit primaire sévère en IGF-1 (très rare, une vingtaine de patients en France et dont le traitement repose sur l’IGF-1 recombinante : bécasermine, Increlex).
Il peut s’agir de malnutrition, de pathologies digestives (maladie de Crohn, maladie cœliaque…) ou hormonales comme un déficit en hormone de croissance, complet ou le plus souvent partiel, d’un hypercorticisme, d’un retard pubertaire, de cardiopathies ou de pathologies rénales, de maladies métaboliques, inflammatoires ou infectieuses, de cancers, etc.
→ Prévention : le suivi idéal consiste à mesurer l’enfant tous les mois les six premiers mois puis tous les trois mois jusqu’à douze mois ; tous les six mois jusqu’à trois ans, puis tous les ans jusqu’à la puberté.
→ Les courbes statistiques (taille, poids, périmètre crânien, IMC), présentes dans les carnets de santé, sont formées de “couloirs”, délimités par une ligne supérieure et inférieure matérialisant les limites extrêmes à chaque âge. La croissance est normale lorsque la courbe évolue de manière parallèle aux courbes de références (entre + 2 et – 2 déviations standards – DS –, c’est-à-dire entre le 3e et le 97e percentile, ce qui correspond à 95 % de la population). Une courbe de croissance doit être analysée dans sa dynamique : un point isolé n’a aucune signification. La taille cible [(taille mère + taille père)/2 + 6,5 cm (garçons) ou – 6,5 cm (filles)] n’a qu’une valeur indicative.
→ L’examen clinique recherche des troubles neurologiques, digestifs, une dysmorphie, etc., l’interrogatoire des antécédents familiaux évoquant l’existence de maladies génétiques ou d’une petite taille idiopathique.
→ La détermination de l’âge osseux est réalisée à partir d’une radiographie du poignet (en dehors de toute pathologie ; un âge osseux retardé peut suggérer une hypothyroïdie ou un hypercorticisme).
→ Des analyses biologiques sont effectuées (NFS, vitesse de sédimentation, dosage des hormones thyroïdiennes, de la testostérone ou de l’œstradiol à la puberté, de l’IGF-1, test de stimulation de l’hormone de croissance).
→ Selon le cas : caryotype, systématique chez les filles dont la taille est inférieure à – 2 DS, à la recherche d’un syndrome de Turner.
Un traitement par hormone de croissance recombinante (ou somatropine) n’est indiqué en France que dans les situations suivantes et sur des critères bien précis, comme par exemple une taille inférieure ou égale à – 2 DS :
→ chez l’enfant ou l’adolescent déficitaire en hormone de croissance ;
→ chez l’enfant ou l’adolescent non-déficitaire, en cas de retard de croissance lié à un syndrome de Turner, à une insuffisance rénale chronique, à un déficit du gène SHOX ou à un syndrome de Prader-Willi ;
→ chez les enfants nés petits pour l’âge gestationnel (ce qui correspond à un retard de croissance intra-utérin) n’ayant pas rattrapé leur retard de croissance à l’âge de 4 ans ou plus.
Le gain de taille est surtout important pour les enfants ayant un déficit sévère en GH. Pour les autres, le gain de taille attendu est beaucoup plus modeste.
À noter : le traitement est aussi indiqué chez l’adulte, en cas de déficit somatotrope sévère acquis dans l’enfance ou à l’âge adulte (pathologie hypothalamo-hypophysaire, radiothérapie cérébrale…), sous certaines conditions. Un déficit en GH à l’âge adulte entraîne en effet une modification du profil lipidique et une augmentation du risque cardiovasculaire, une fatigabilité et des symptômes psychologiques (anxiété, dépression, troubles de la mémoire).
→ Différentes spécialités de somatropine existent : Génotonorm, Norditropine, NutropinAq, Omnitrope, Saizen, Umatrope, Zomacton.
Ils sont rares chez l’enfant. L’apparition d’une claudication ou d’une douleur de la hanche ou du genou nécessite une consultation en urgence à la recherche d’une lyse de l’épiphyse fémorale (épiphysiolyse fémorale). Des céphalées sévères ou répétées, des troubles visuels, des nausées et/ou des vomissements doivent faire suspecter une hypertension intracrânienne bénigne nécessitant un arrêt provisoire du traitement.
Le traitement est réalisé par injection sous-cutanée quotidienne, le soir de préférence. Chez l’enfant, les doses sont comprises généralement entre 0,03 et 0,05 mg/kg/jour selon les indications, c’est-à-dire le plus souvent entre 0,3 mg par jour chez le petit enfant et 2,5 mg par jour chez l’adolescent. L’adaptation de la dose s’effectue par contrôle du taux d’IGF-1 tous les six mois.
De nombreux déficits en GH sont transitoires et se corrigent spontanément au cours de la puberté. Dans tous les cas, il est essentiel d’aider l’enfant à trouver sa place au sein de sa famille et dans son environnement, et surtout ne pas le prendre pour un bébé à cause de sa petite taille. Les explications et le soutien de spécialistes (psychologues, pédopsychiatres spécialisés…) constituent une aide importante.
L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.