Cahier de formation
Savoir
Malgré des améliorations significatives en pratique, les traitements spécifiques du cancer occasionnent toujours d’importants effets indésirables. Les personnes doivent faire face à des symptômes et séquelles qui détériorent leur état de santé et leur qualité de vie.
Avec l’amélioration de l’efficacité des traitements du cancer, les questions sur la qualité de vie des personnes atteintes ont pris une place centrale dans la prise en charge. Les nombreux effets délétères de la maladie et de ses traitements engendrent principalement une baisse des capacités des patients associée à une restriction de leur activité, ce qui peut perturber considérablement le cours de leur existence. Après un cancer, leur état de santé est dégradé par rapport au reste de la population. Dans certains cas, les séquelles persistantes des traitements peuvent se cumuler avec des comorbidités préexistantes. Il existe aussi un risque accru de développer certaines pathologies après un cancer, notamment un deuxième cancer ou des pathologies cardiaques causées par les traitements. Les besoins de soins restent donc conséquents à distance de la maladie.
Les soins aux patients atteints de cancer concernent de plus en plus les infirmières libérales du fait de deux phénomènes à l’origine d’une progression des prises en charge à domicile :
→ l’augmentation constante de l’incidence du cancer et la baisse de la mortalité qui lui est associée grâce aux avancées thérapeutiques s’accompagnent d’une croissance importante du nombre de personnes atteintes par un cancer dans la population générale ;
→ l’évolution permanente vers une prise en charge à domicile et une diminution des séjours hospitaliers, notamment grâce à la réduction du nombre des séances de radiothérapie et au développement des chimiothérapies orales.
Parce qu’il affecte la vie quotidienne des patients et de leurs proches, le cancer dépasse le strict cadre médical. Trois types de conséquences liées à la maladie et à ses traitements peuvent être décrites :
→ du point de vue physique, certains effets indésirables des traitements peuvent devenir chroniques, voire irréversibles. C’est entre autres le cas des douleurs, de la fatigue, des œdèmes lymphatiques, des déficits cognitifs, des dysfonctionnements gastriques, urinaires, sexuels, ou encore d’une infertilité ou d’une ménopause précoce ;
→ sur le plan psychologique, dépression, anxiété et détresse peuvent se manifester à plus ou moins long terme, parfois longtemps après le diagnostic ;
→ du point de vue social, le cancer a principalement des conséquences sur la réinsertion professionnelle, la couverture sociale et l’intégration sociale définie comme des échanges satisfaisants d’un individu avec son environnement.
Les personnes atteintes de cancer peuvent souffrir des symptômes de la maladie et de ses traitements. Les symptômes induits par les traitements spécifiques du cancer (chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie) sont plus présents pendant les phases de traitement mais ils peuvent aussi persister longtemps après la fin des traitements. Quand ces symptômes sont présents après le traitement, on parle de “séquelles du traitement”. Symptômes et séquelles affectent donc la qualité de vie du patient pendant et après un cancer.
Nombreuses et variées, réversibles ou pas, transitoires ou définitives, les séquelles sont plus ou moins graves en fonction des traitements utilisés. Leurs répercussions physiques et psychologiques et les limitations qu’elles entraînent sur les plans de la réinsertion sociale ou de la réintégration professionnelle sont déterminantes pour la qualité de vie.
En 2012, l’Institut national du cancer (INCa) a réalisé une enquête
→ trois patients sur cinq conservent des séquelles de leur traitement ;
→ un patient sur cinq juge ces séquelles importantes ou très importantes ;
→ en fonction de la localisation du cancer : 80,1 % des patients atteints de cancers des voies aérodigestives supérieures souffrent de séquelles, 77,8 % pour le poumon, 63,8 % pour le sein, 60,4 % pour le col utérin, 58,1 % pour la prostate, 55,4 % pour le cancer colorectal, 54,6 % pour la thyroïde, 49,9 % pour le rein, 49 % pour les lymphomes, 47 % pour la vessie, 39,9 % pour le mélanome ;
→ douleurs, fatigue chronique et difficultés sexuelles sont les symptômes les plus souvent rapportées quel que soit le type de cancer ;
→ dans les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) ou du poumon, 80 % des personnes rapportent des troubles fonctionnels majeurs de type essoufflement, dysphagie ou dénutrition ;
→ des séquelles sont d’ordre psychologique, par exemple en termes d’image corporelle (voir graphique ci-dessus) ;→ les cancers dits “de bon pronostic” sont aussi concernés, par exemple : prises de poids importantes, troubles de la parole, fatigue chronique et troubles psychologiques dans le cas d’un cancer de la thyroïde.
Les besoins des patients atteints de cancer en souffrance sont désormais bien connus :
→ un traitement optimal des symptômes induits par la maladie ou les traitements ; ?une information, une écoute et un accompagnement ;
la mise à disposition de soins de support en établissement comme à domicile ;
→ un projet personnalisé de santé et une continuité des soins entre l’établissement de référence et le domicile.
Les questions sur la qualité de vie des personnes atteintes de cancer ont engendré depuis une dizaine d’années le développement des “soins de support”. Cette prise en charge se définit comme l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes tout au long d’une maladie grave. Ils sont associés aux traitements spécifiques le cas échéant
(1) “La vie deux ans après un diagnostic de cancer – De l’annonce à l’après cancer”, collection Études et enquêtes, INCa, juin 2014 (via le lien raccourci bit.ly/1LnPl6i).
(2) Définition de la circulaire de la Direction générale de l’offre de soins du 25 février 2005 relative à l’organisation des soins en cancérologie.
Il n’y a pas de cotation spécifique au cancer à la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). En septembre 2013, la Fédération nationale des infirmiers a fait des propositions pour renforcer le rôle de l’infirmière libérale dans la prise en charge du cancer à domicile. Exemples :
→ confier à l’infirmière libérale la coordination du parcours de soins en relation étroite avec le médecin traitant et la famille, et la prescription de certains soins de support et leur suivi ;
→ rémunérer des temps/activités de soutien pour expliquer les traitements, leur déroulement et leurs effets indésirables, et répondre aux questions que le patient se pose sur son vécu et sur sa manière de gérer les symptômes.