La législation dans le secteur des médecines naturelles, pourtant de plus en plus prisées, reste floue. En France, le diplôme d’herboriste est interdit depuis 1941 et, pourtant, quelques herboristeries ont pignon sur rue. Au grand dam des pharmaciens, qui détiennent le quasi-monopole
Les plantes peuvent-elles soigner et leur efficacité est-elle prouvée ?
Les plantes ont prouvé leur efficacité et demeurent la base de nombreux médicaments. C’est en laboratoire que les chercheurs isolent les molécules des plantes, pour en exploiter leurs propriétés et les reproduire par synthèse. Le retour à la tisane n’est pas une mode, mais une manière simple et efficace pour préserver sa santé ou la reconquérir. La plante médicinale apporte un ensemble de principes actifs dont l’organisme tire de nombreux bénéfices. Elle peut être à la fois diurétique, calmante, digestive.
Dans quel cadre l’usage des plantes peut-il être conseillé aux patients ?
Les plantes offrent mille et une façons de répondre à des problématiques de santé au quotidien : migraine, indigestion, colique, fatigue, crampes d’estomac. Elles peuvent être utilisées chaque jour à bon escient et sont idéales pour la prévention. Il s’agit aussi d’une force thérapeutique. Des plantes aromatiques comme le thym ou la sarriette ont des fonctions antiseptiques, antivirales, immunostimulantes, et permettent de lutter contre la grippe. La plante peut aussi être utilisée pour aider à tolérer un traitement et limiter les effets secondaires.
Faudrait-il de nouveau reconnaître en France le métier d’herboriste, qui existe dans de nombreux autres pays européens ?
Oui, tout à fait. L’herboriste sait conseiller sur l’usage des plantes. Aujourd’hui, l’herboristerie est pratiquée en France mais le métier n’existe pas, et il serait souhaitable de renouer avec une politique de santé globale. Dans tous les autres pays d’Europe, la recherche se développe. L’herboristerie est remise à l’honneur et la demande des citoyens va grandissant. Les scandales sanitaires, les effets secondaires de nombreux médicaments, incitent à se tourner vers une prise en charge plus naturelle de sa santé. Il y a un réel besoin de formation et d’éducation pour se réapproprier les savoir-faire dans ce domaine et les transmettre. Mais, en France, le métier n’est pas reconnu ; les Français partent donc se former à l’étranger et nous perdons le savoir et les compétences. Dans notre école, de nombreux professionnels de santé viennent chercher la connaissance. Se soigner par les plantes, c’est bon pour soi mais aussi pour notre système de santé, qui mériterait que l’on s’y intéresse.
Les plantes peuvent-elles soigner et leur efficacité est-elle prouvée ?
Les plantes ont été, au cours de l’histoire, un formidable réservoir de médicaments. Elles contiennent des principes actifs et sont toujours étudiées pour l’évaluation de leurs propriétés thérapeutiques. Cependant, la thérapeutique a fait des progrès et soigner avec des plantes peut avoir un intérêt subsidiaire et relatif, qui ne peut se comprendre que dans un cadre de symptômes légers apparentant la plante à un placebo. Le problème avec les plantes, c’est que nous ne savons jamais la quantité de principes actifs qu’elles contiennent. Se soigner avec elles ne permet pas de maîtriser l’efficacité. Nous vivons aujourd’hui dans une fantasmagorie du “naturel”. Même si la nature nous a donné des plantes aussi intéressantes, nous ne pouvons pas actuellement nous reposer sur elles pour nous soigner.
Dans quel cadre l’usage des plantes peut-il être conseillé aux patients ?
Dans certains cas, les médicaments sont inutiles ou dangereux, comme pour les troubles du sommeil ou anxieux. Les agences sanitaires, les sociétés savantes, déconseillent l’usage prolongé des benzodiazépines car elles posent des problèmes majeurs chez le sujet âgé. Il est donc possible de proposer des alternatives avec des plantes. Mais il est dangereux de vouloir soigner un cancer, des maladies infectieuses, un diabète ou des troubles psychiatriques par les plantes.
Faudrait-il de nouveau reconnaître en France le métier d’herboriste, qui existe dans de nombreux autres pays européens ?
Je trouve dangereux que les associations de défense de l’herboristerie la présente comme une profession de santé, alors qu’il est possible de devenir herboriste avec une formation de trois à six mois. Cela me paraît bien léger par rapport à la santé, qui est ce que nous avons de plus précieux. En plus, il y a un réel manque d’intégration du progrès dans ce secteur : ni recherche, ni innovation. Les pharmaciens font six années d’études, sans compter les années de recherche… Il y a 22 000 pharmacies en France qui vendent des plantes dans le cadre d’un circuit contrôlé. Avons-nous vraiment besoin d’herboristes vendeurs d’espoir ? Ils n’apportent rien de plus à ce qui est accessible dans le circuit pharmaceutique.
* 148 des 546 plantes médicinales inscrites à la pharmacopée française peuvent être vendues hors monopole officinal (Ordre des pharmaciens, via bit.ly/1QwPEnk). Pour les compléments alimentaires, lire aussi l’arrêté du 24 juin 2014 (bit.ly/22cGeS3).