L'infirmière Libérale Magazine n° 322 du 01/02/2016

 

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Laure Martin  

NOMENCLATURE > L’année commence fort pour les Idels, et pas forcément de la meilleure manière. Un désaccord sur le calcul des frais horokilométriques entraîne, dans la montagne savoyarde, des relations conflictuelles avec la Caisse. Les Idels sont en colère et le font savoir.

En Savoie, le conflit est ouvert entre la Caisse primaire d’Assurance maladie (CPAM) et une soixantaine d’infirmiers libéraux travaillant en montagne – Tarentaise, Haute Tarentaise, Maurienne, Haute Maurienne et Beaufortain. Tout a commencé fin novembre par la visite d’une déléguée de la Caisse, au sein des cabinets d’Idels. « Elle est venue nous voir pour nous rappeler les règles de facturation, explique Évelyne Doche, secrétaire du Collectif des infirmiers libéraux de montagne, fondé le 12 janvier en réponse au conflit. Sa mission était aussi de nous faire part des nouveaux modes de calcul des indemnités horokilométriques. »

Application de l’article 13

Actuellement, les infirmières libérales de Savoie appliquent l’article 13 de la NGAP qui dispose que « l’indemnité due au professionnel de santé est calculée pour chaque déplacement à partir de son domicile professionnel et en fonction de la distance parcourue sous déduction d’un nombre de kilomètres fixé à deux sur le trajet tant aller que retour. Cet abattement est réduit à un kilomètre en montagne et en haute montagne ». Ce calcul, qui ne s’applique qu’aux patients ne se situant pas dans l’agglomération du cabinet de l’infirmier, permet d’indemniser les Idels en fonction des kilomètres parcourus et du temps passé sur la route. La CPAM leur demande désormais de ne prendre en compte que les kilomètres parcourus. « Au lieu de compter le déplacement du cabinet au patient, pour chaque patient, la CPAM nous demande de compter le déplacement du cabinet au premier patient, puis de patient à patient, rapporte Maryse Souvy, la présidente du Collectif. De ce fait, s’il y a quatre patients dans le même village et qu’ils sont voisins, nous devrons calculer les kilomètres qui les séparent et non ceux qui les séparent de notre cabinet. » Or cinq kilomètres de trajet peut prendre trois fois plus de temps en montagne qu’en plaine, en raison des routes sinueuses, de la neige, du verglas, sans parler de la dangerosité des trajets. Actuellement, les indemnités horokilométriques représentent entre un tiers et la moitié des revenus des infirmières.

De son côté, la CPAM de Savoie n’a pas la même interprétation de l’article 13 et explique avoir réalisé ce rappel des règles de base de la NGAP après avoir constaté, à la suite d’une étude en 2015, une mauvaise application de la nomenclature par les Idels dans la facturation de leurs soins. « Il ne s’agit en aucune manière d’une modification des règles appliquées par la CPAM et encore moins d’un dispositif non conforme aux textes », souligne Edmond Guillot, sous-directeur de la CPAM de Savoie. La Caisse se dit forte d’une décision rendue par la cour d’appel de Chambéry en octobre 2013 à la suite d’un contentieux avec un infirmier, allant dans le même sens que sa lecture de l’article 13.

« En aucun cas nous ne voulons entrer dans une démarche contentieuse, assure Edmond Guillot. Nous comprenons la problématique des infirmières libérales, mais la nomenclature est ce qu’elle est. Nous ne pouvons pas prendre en charge des kilomètres parcourus qui ne sont pas réels. Il faut trouver une solution sans contourner la réglementation. »

Issue jugée positive, mais…

Deux réunions avec la CPAM, fin décembre et début janvier, n’ont pas permis de résoudre le conflit. Mais, lors d’une réunion le 20 janvier entre l’Agence régionale de santé (ARS), la CPAM, le Collectif et son avocat, les infirmières ont rappelé leurs arguments et la CPAM sa volonté de ne pas être dans une démarche contentieuse. « L’un des points positifs est que le sous-directeur de la CPAM [que nous n’avons pas pu joindre à nouveau après cette réunion, NDLR] nous a dit vouloir travailler avec nous sur la reconnaissance de la spécificité de l’exercice des infirmières de montagne, rapporte Évelyne Doche. Il nous a informés qu’il s’était mis en contact avec la députée de Savoie, Bernadette Laclais, qui travaille sur la loi Montagne, afin qu’il y ait un texte spécifique sur notre exercice. » Malgré cette issue jugée positive par le Collectif, celui-ci dit « rester vigilant ». D’ailleurs, les Idels avaient émis l’idée d’une fermeture simultanée de leurs cabinets si rien n’était fait.

Le Collectif, qui a recueilli plus de 5 000 signatures pour une pétition, est aussi soutenu par les syndicats. L’Organisation nationale des syndicats d’infirmiers libéraux estime ainsi que « l’interprétation des textes de la NGAP par la Caisse de Savoie est abusive ». Convergence infirmière a également pris à cœur ce conflit. La Cnamts, Caisse nationale d’Assurance maladie, aurait répondu à la sollicitation des syndicats le 4 janvier et affirmé, selon Convergence, « vouloir trouver des solutions justes et conformes au droit ».