SOINS INFIRMIERS À DOMICILE
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Le dossier de soins infirmiers se trouve au cœur de la pratique infirmière : ses fonctions, ses objectifs, son contenu s’inscrivent directement dans le rôle infirmier.
Les Idels ne sont pas obligées d’établir un dossier pour leurs patients, contrairement aux médecins (article R. 4127-45 du Code de la santé publique, CSP) et aux infirmières de l’hôpital (l’article R. 1112-2 évoque ce dossier « ou, à défaut, les informations relatives aux soins infirmiers », au sein du dossier médical).
L’article R. 4312-28 dispose que l’infirmière « peut » établir un dossier de soins infirmiers contenant tous les éléments relatifs à son propre rôle et permettant le suivi du patient. Elle est chargée « de la conception, de l’utilisation et de la gestion » de ce dossier (R. 4311-3).
Évidemment, nous ne pouvons que conseiller à l’Idel de tenir un tel dossier. D’une part, elle peut être amenée à apporter la preuve des soins dispensés à un patient (rappelons que « l’action en responsabilité née à raison d’un événement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé ») ; d’autre part, elle doit être en mesure de remettre au médecin désigné par le patient ou par ses proches, et avec l’accord explicite du patient, la fiche de synthèse du dossier de soins infirmiers (situation d’arrêt des soins prévue à l’article R. 4312-41 du CSP).
Le “Guide du service infirmier”, établi en 1985 par le ministère de la Santé, définit ce dossier comme le « document unique et individualisé regroupant l’ensemble des informations concernant la personne soignée. Il prend en compte l’aspect préventif, curatif, éducatif et relationnel du soin. Il comporte le projet de soins qui devra être établi avec la personne soignée. Il contient des informations spécifiques à la pratique infirmière. (…) Les notes infirmières doivent faire partie du dossier du patient et constituer à ce titre un document légal pouvant servir de preuve devant les tribunaux. Les documents du dossier de soins ont une valeur probante : il s’agit de savoir qui est responsable d’un incident, d’une éventuelle faute et de le prouver. »
Cette définition large situe le dossier de soins infirmiers au cœur de l’exercice. Il concerne de la même manière les dossiers de soins tenus à l’hôpital, dans des structures de soins à domicile rattachées ou non à l’hôpital et en libéral. La création d’un tel dossier doit répondre au souci de disposer d’un outil de travail unique, permettant des soins adaptés aux besoins du patient. Il contient donc tous les éléments et documents qui permettent la continuité des soins, de répondre aux questions des médecins et de disposer, pour tous les acteurs de soins, d’informations écrites, complètes, fiables.
On devrait ainsi y trouver l’évaluation initiale, le recueil de données comme la grille d’autonomie, les antécédents, les allergies, l’état nutritionnel, les conditions de vie (environnement matériel, architectural, social et affectif), la feuille d’observation, l’identification des problèmes, la planification, le plan de soins, le projet de soins, la fiche de liaison, le résumé de soins infirmiers (synthèse des éléments essentiels de la démarche de soins, tels les diagnostics infirmiers, soins infirmiers, objectifs atteints, objectifs en cours).
La loi ne répond pas précisément à cette question, ni pour les médecins, ni pour les infirmières. Elle instaure bien, selon des modalités strictement définies, une obligation de conservation des données médicales par son dépositaire (établissement public ou privé, professionnels libéraux) ainsi qu’un accès direct des patients aux informations médicales les concernant, mais elle ne tranche nullement la question de la propriété du dossier, même si, en secteur libéral, on peut considérer qu’il appartient au patient.
Selon l’article R. 431-28 du CSP, « l’infirmière, quel que soit son mode d’exercice, doit veiller à la protection contre toute indiscrétion de ses fiches de soins et des documents qu’elle peut détenir concernant les patients qu’elle prend en charge (…), elle doit prendre toutes les mesures qui sont de son ressort pour en assurer la protection, notamment au regard des règles du secret professionnel ». Il apparaît dès lors évident que le dossier de soins constitué par la praticienne ne peut être laissé au domicile du patient.
L’infirmière peut partager ses informations (sous forme orale ou écrite) avec d’autres professionnels de santé, conformément à l’article L. 1110-4 du CSP, qui précise : « Deux ou plusieurs professionnels de santé peuvent, sauf opposition de la personne dûment avertie, échanger des informations relatives à une même personne prise en charge, afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible. »
Par ailleurs, la législation précise que sont communicables au patient les informations formalisées, à savoir les informations auxquelles il a été donné un support (non seulement écrits – comptes rendus, courriers entre professionnels de santé, examens de laboratoire – mais également les photographies, les enregistrements informatiques et sonores, etc.) avec l’intention de les conserver. Dès lors, sont concernés tous les documents répondant à ces critères, qu’ils prennent le nom de fiches, de feuilles ou de dossier. Les seules informations non communicables sont celles concernant les tiers et les notes personnelles des praticiens si elles ne contribuent pas à la prise en charge médicale du patient (article L. 1111-7 du CSP).
• Le dossier de soins infirmiers se distingue du DMP (dossier médical “personnel”, devenu “partagé” avec la récente loi de santé). Existant pour moins de 600 000 personnes mais appelé à se généraliser, le DMP, gratuit et informatisé, permet aux intervenants, avec l’accord du patient, d’avoir accès aux données intégrées par les autres professionnels. Il est créé sous réserve du consentement du patient, et désormais sous l’égide de l’Assurance maladie.
Au Canada, dans la province de Québec, l’article 91 du Code des professions oblige les ordres à adopter un règlement sur la tenue, la détention et le maintien par le professionnel des dossiers, livres, registres… La tenue du dossier y occupe une place primordiale : il est structuré et doit refléter le processus utilisé pour l’évaluation des résultats de soins, la planification, l’intervention ainsi que le contrôle des soins prodigués. Dans le cas d’une intervention au domicile du patient, l’information obligatoirement consignée dans un registre tenu à cette fin par l’infirmière doit indiquer l’évaluation de la situation de santé du patient, ses réactions ainsi que les interventions de l’infirmière. Par ailleurs, l’obtention du consentement du patient pour tous les soins infirmiers prodigués est obligatoire. Il peut être verbal et, dans ce cas, il importe de noter dans le dossier le motif de la consultation, les raisons qui justifient le choix de l’intervention ainsi que l’entente établie avec le patient. Le dossier de soins permet de mieux cerner l’activité infirmière et sa contribution au domaine de la santé.