L'infirmière Libérale Magazine n° 323 du 01/03/2016

 

Éditorial

Mathieu Hautemulle  

“Démocratie sanitaire” : une belle idée souvent invoquée. Cela peut signifier ne pas laisser Paris décider de tout, respecter les spécificités de chaque territoire. Et par exemple, avec les Unions régionales des professionnels de santé (URPS), inclure les professionnels aux politiques des Agences régionales de santé (ARS). Mais cette démocratie de proximité présente un versant moins démocratique : le risque de l’inégalité. Exemple : quand une région A dispose de responsables plus entreprenants ou de porte-monnaie plus épais, les professionnels de la région B ne verront pas la couleur du progrès, faute d’avoir travaillé au bon endroit au bon moment. Autre réalité qui contredit la promesse de “démocratie sanitaire” : le verrouillage de la communication auquel s’adonnent souvent les autorités. Ainsi, si les ARS nous ont très majoritairement envoyé de bonne grâce les listes des Idels candidates aux élections URPS d’avril, l’une d’elles nous a fait savoir qu’elle devait d’abord demander au ministère l’autorisation de publier les documents sur son site Internet, et deux autres nous ont clairement répondu « niet ». Il est vrai que rien n’obligeait les ARS à nous communiquer ces listes. Mais rien ne le leur interdisait. Retenir, face à une demande de la presse, une information affichée dans ses locaux et prochainement envoyée à toutes les Idels d’une région, quel gâchis, surtout pour une élection dont l’abstention était en 2010 le grand vainqueur. Dans ces moments-là, on croit volontiers ce haut cadre de la santé publique qui, en février, a vilipendé la prétendue “démocratie sanitaire”, cette « vaste mascarade » concoctée par les politiques pour « faire croire à une certaine horizontalité de la décision publique en santé – alors qu’elle n’a jamais été aussi verticale »*.

* Thomas Dietrich a quitté avec fracas son poste de secrétaire général de la Conférence nationale de la santé, instance consultative placée auprès du ministère (Le Parisien du 20 février, lien : bit.ly/1WCWved).