Les URPS ont été consultées sur des choix politiques et, de leur propre initiative ou en réponse à des appels, ont monté plusieurs dossiers marquants. Tour d’horizon, forcément non exhaustif, auprès de présidents d’URPS affiliés aux quatre syndicats.
Les URPS-infirmiers ont connu un niveau d’activité variable en fonction de l’osmose qui s’est (ou non) manifestée en interne, et selon les relations tissées, en externe, avec leurs partenaires. Dans plusieurs régions, ces institutions sont à l’origine de projets novateurs, quelques-uns semblables (comme une carte ou un carnet pour le patient avec les coordonnées des professionnels de santé, pour améliorer la transition ville-hôpital), d’autres plus originaux, et dont certains ont pris de l’ampleur et se sont même imposés au plan national. Selon les cas, les ARS ou les URPS elles-mêmes les ont financés. Les syndicats en lice les citent en tout cas volontiers dans leur bilan.
En Picardie par exemple, Isipad (Intervention soins infirmiers post-opératoires à domicile) « permet à des personnes d’accéder à la chirurgie ambulatoire alors que les conditions de leur retour à domicile n’y étaient a priori pas favorables », explique Marie-Odile Guillon (FNI), présidente de l’URPS-infirmiers. Idels, cadres et IDE de chirurgie ambulatoire, chirurgiens et anesthésistes ont défini un protocole qui permet aux besoins de chaque professionnel d’être pris en compte : les médecins sont rassurés de savoir qu’un service formé intervient à domicile auprès du patient à sa sortie, l’Idel sait qu’elle sera prévenue à l’avance, par le service hospitalier, de la date de sortie et des besoins en soins du patient (lire aussi notre numéro 292 de mai 2013)… Le chirurgien évalue la situation du patient et, le cas échéant, le dispositif l’oriente vers une Idel formée. Lorsqu’il est sorti, elle passe deux fois à son domicile, le soir même et le lendemain. Elle évalue sa douleur, surveille les suites d’anesthésie, les pansements, rappelle les consignes importantes et le rassure. Expérimenté d’abord dans le Compiégnois, le protocole (financé par l’ARS) a été étendu fin 2014 à toute la région picarde.
La même URPS a mis en place une télésurveillance des plaies, un terminal de facturation qui permet de créer un DMP à domicile et travaillé avec une clinique sur un projet d’infirmière de coordination en cancérologie…
Annick Touba (Sniil), présidente de l’URPS-infirmiers des Pays de la Loire, met en avant, d’une part, le panel représentatif d’infirmières libérales que cette union a mis en place. « Le premier [disponible via le lien raccourci bit.ly/20Z0sAB] nous a permis de mieux connaître leur activité et leur cadre d’exercice », explique-t-elle. Le second panel, en cours, porte sur l’activité des Idels liée aux pathologies psychiatriques et à la chirurgie ambulatoire.
La présidente du Sniil évoque, d’autre part, le travail réalisé en Haute-Normandie sur la sécurisation de la vaccination contre la grippe. Les médecins souhaitaient être informés lorsque les Idels vaccinaient certains de leurs patients contre la grippe. Avec l’Ordre des pharmaciens, la CPAM, l’ARS, le CHU de Rouen (Samu), l’URPS-infirmiers a mis au point un protocole en deux volets. Tout d’abord un carnet de vaccination, dans lequel l’infirmier note la date de l’injection et toutes les informations sur le vaccin, et un mémo sur le choc anaphylactique. Ainsi qu’une expérimentation qui permet aux infirmières de disposer d’ampoules d’adrénaline sans prescription pour faire face en cas de choc anaphylactique, explique François Casadei (Sniil), le président de l’union haut-normande. Toutes les infirmières de la région ont reçu le kit d’information, et le dispositif a été présenté lors de conférences. Il a débouché sur un arrêté ministériel de décembre 2013 qui a ouvert cette possibilité à toutes les Idels de France. Cette mesure, ajoute-t-il, « reconnaît le rôle de l’Idel dans la proximité, le premier recours et la gestion des urgences à domicile ».
En Rhône-Alpes, l’URPS a mis en place sur ses deniers un carnet de suivi des INR à domicile pour les infirmiers, les médecins généralistes et les cardiologues pour la surveillance biologique d’un traitement aux antivitamines K, un passeport pour la réussite du retour précoce à domicile après une hospitalisation et une application baptisée “Éclaireur” qui permet aux Idels de recenser au chevet du malade les incidents et accidents évitables afin de cibler des actions.
Mais le projet dont Lucien Baraza (Convergence infirmière),le président de l’URPS Rhône-Alpes, est le plus fier, c’est celui qui rassemble depuis 2012, au sein de l’Association des unions régionales des professionnels de santé de Rhône-Alpes (l’Aura), les URPS-infirmiers, kinésithérapeutes, chirurgiens-dentistes, sages- femmes, orthoptistes-opticiens, orthophonistes et pédicures- podologues, à l’initiative des trois premières de ces professions. « Nous avons créé une force politique », explique-t-il, qui représente plusieurs acteurs du monde sanitaire libéral (sauf les médecins, pharmaciens et biologistes, qui ont décliné l’invitation). Elle favorise le travail interprofessionnel, notamment sur les INR. Dans son prolongement (et sur son palier), l’Aura a créé la Maison des professionnels de santé libéraux, lieu de rendez-vous et de réunion, “pied-à-terre” pour les URPS, syndicats et associations professionnelles, et qui a coûté deux millions d’euros aux sept URPS et devait être inaugurée le 1er mars.
Le président de l’URPS d’Aquitaine, Patrick Experton (Onsil), se félicite quant à lui du succès du dossier partagé de soins infirmiers (DPSI) que l’union a contribué à mettre en place. Il constitue une alternative au dossier papier chez le patient. Tous les professionnels qui interviennent auprès d’un patient peuvent y accéder via une tablette ou un smartphone et un serveur sécurisé, avec des droits d’accès hiérarchisés. « Il a d’abord été expérimenté dans les Landes puis il a été retenu dans le cadre de l’expérimentation Paerpa [personnes âgées en risque de perte d’autonomie] de l’astreinte infirmière de nuit à Bordeaux, explique Patrick Experton. Il devrait être inclus aussi dans le projet de territoire de santé numérique dans les Landes prochainement et pourrait être étendu à toute l’Aquitaine, voire à d’autres territoires de la grande région qui le souhaitent. Nous devons refuser des demandes car 83 infirmières expérimentent le DPSI alors que 50 seulement étaient prévues. »
L’union a aussi édité une application pour smartphone, téléchargée plus de trois cents fois, qui présente les actualités de l’URPS, de la profession, des contacts, un agenda, un outil de calcul de doses.
Comment votre ARS travaille-t-elle avec les URPS-infirmiers ? Les deux URPS [dans la nouvelle région issue d’une fusion] sont vraiment intégrées dans notre politique. Elles sont très impliquées et réactives. Nous les réunissons tous les trimestres avecles autres unions et les fédérations hospitalières pour évoquer l’organisation des soins, la prévention, etc. Les infirmières participent aussi aux instances de démocratie sanitaire et aux travaux sur le schéma régional des ressources humaines du système de santé. Nous avons avec elles des relations constructives.
Qu’ont apporté les URPS-infirmiers dans le fonctionnement de l’ARS ? Un regard autre que médical et, avec les autres professionnels paramédicaux, une pluriprofessionnalité. Dans les ex-ARH [“ancêtres” des ARS], le prisme médical et hospitalier était fort. Aujourd’hui, les professionnels libéraux peuvent s’impliquer, notamment dans le premier recours. Les infirmières assurent dans ce domaine une mission importante. Leur URPS constitue un interlocuteur régional de qualité.
Dans quels domaines peuvent-elles constituer des forces de proposition ?
En matière d’exercice coordonné, de protocoles de coopération, de délégation de tâches ainsi que pour ce qui concerne le développement de l’ambulatoire. Les infirmières libérales y ont un rôle majeur à jouer.