Cahier de formation
Savoir
La nutrition ou alimentation entérale est une forme d’alimentation administrée au niveau du tube digestif de façon artificielle. Elle n’est possible que si l’appareil digestif fonctionne bien. Les nutriments sont administrés directement dans l’estomac ou dans l’intestin (jéjunum, duodénum) à l’aide d’une sonde. La digestion se fait ensuite normalement, d’une façon proche de l’alimentation per os naturelle. Le tube digestif continuant à fonctionner, les défenses de l’organisme présentes dans l’intestin restent stimulées. La NE peut être exclusive ou prescrite en complément d’une alimentation orale, ou parentérale.
La NE s’adresse :
→ aux patients dénutris dont les apports alimentaires oraux ne couvrent pas les besoins nutritionnels ;
→ aux patients qui ne peuvent s’alimenter normalement, qu’ils soient dénutris ou pas.
La NE est indiquée lorsque l’apport per os est :
→ soit insuffisant (anorexies de toutes causes, maladies métaboliques…) ;
→ soit impossible à cause d’un obstacle digestif haut (dysfonctions oropharyngées, obstructions ORL, coma) ;
→ soit contre-indiqué (troubles de déglutition : risque de fausse route, pathologies neuro-dégénératives…).
La NE concerne tout malade dénutri ou à risque de dénutrition, ayant un tube digestif fonctionnel, incapable de couvrir ses besoins protéino-énergétiques par voie orale. Par exemple en cas d’anorexie mentale, troubles de la déglutition, dénutrition sévère, hypercatabolisme (infection, cancer, états inflammatoires…), maladies métaboliques, affections neurodégénératives, ou certaines maladies inflammatoires chroniques intestinales.
Lors de dénutrition sévère avant une intervention chirurgicale majeure, une renutrition débutée une semaine minimum avant peut être prescrite.
En cas de dénutrition sévère après une chirurgie lourde :
→ lorsque le patient est dans l’incapacité de se réalimenter seul dans un délai d’une semaine suivant l’opération ;
→ ou lorsque l’intervention engendre des complications sévères.
En cas de :
→ patients non dénutris atteints d’une affection aiguë non ou peu catabolisante et incapables de s’alimenter normalement pour une durée prévisible supérieure à dix ou quatorze jours ;
→ patients sévèrement dénutris devant subir une intervention chirurgicale réglée majeure ;
→ trauma sévère (brûlés, traumatisés crâniens, polytraumatisés…) ;
→ chimiothérapie d’intensification pour greffe de moelle (traitement du myélome).
En cas de :
→ effets secondaires digestifs d’une chimiothérapie (cancer) ;
→ maladies digestives chroniques ;
→ insuffisance hépato-cellulaire ou rénale ;
→ infection VIH.
Il s’agit essentiellement des :
→ vomissements répétés ou incoercibles (occlusions intestinales sous-jacentes à l’instillation de la NE) ;
→ diarrhées sévères, incontrôlables, avec plus de cinq diarrhées par jour (maladie de Crohn, par exemple) ;
→ fistules à fort débit (la pose de sonde en aval de la fistule est néanmoins possible) ;
→ pancréatites aiguës graves avec un risque de compression du duodénum par augmentation de volume de la tête du pancréas (si le duodénum n’est pas bouché, la pose de sonde est possible) ;
→ hémorragies digestives sévères (varices œsophagiennes, gastriques, intestinales, etc.), avec un risque de passage de la NE dans les veines pouvant entraîner un choc anaphylactique ;
→ refus du malade ;
→ démence évoluée (peu de bénéfices et beaucoup de risques).
Elle permet l’accès à l’estomac par l’introduction d’une sonde dans la narine, poussée dans l’œsophage après franchissement du pharynx. C’est la technique la plus fréquemment utilisée (lire Savoir faire p.49).
Lorsqu’il y a des risques de vomissements ou lorsque l’estomac opéré ne peut pas se vider correctement, la sonde peut être placée plus loin dans le tube digestif. Les sondes naso-duodénale et naso-jéjunale ont un site d’instillation dit “post-pylorique”, après l’estomac, au niveau du duodénum ou du jéjunum. Elles permettent de contourner un problème de gastroparésie, c’est-à-dire un ralentissement de la vidange gastrique en l’absence d’obstacle mécanique organique, qui peut être due à un diabète, une hyperglycémie, des troubles électrolytiques ou à la prise de médicaments (anticholinergique, opioïdes, antidépresseurs…).
→ Avantages : en présence de facteurs de risque majeurs d’inhalation (lire plus loin).
→ Inconvénients : absence de réservoir gastrique, pas de possibilité de bolus, pas d’activité antibactérienne du suc gastrique. Avec une sonde naso-jéjunale, le duodénum n’est plus utilisé, avec un risque d’effets secondaires importants de type diarrhée ou reflux persistant.
Les sondes post-pyloriques peuvent être lestées d’une olive de tungstène incluse dans leur paroi pour favoriser leur migration.
Une sonde d’alimentation est introduite dans l’estomac, à travers la paroi abdominale, soit par voie percutanée endoscopique, soit par voie percutanée radiologique, soit chirurgicalement (lire Savoir faire p.49).
La mise en place d’une sonde dans le jéjunum en vue d’une alimentation entérale peut être réalisée chirurgicalement par laparotomie ou par une technique de jéjunoscopie percutanée endoscopique. La pose chirurgicale d’une jéjunostomie ou d’une gastrostomie relève d’indications limitées lors :
→ d’intervention chirurgicale prévue ;
→ de contre-indication ou d’échec de la pose par radiologie ou endoscopie.
Le choix de l’abord digestif pour la NE se fait en fonction de la durée prévisible de la nutrition artificielle et du risque d’inhalation. La sonde nasogastrique est très efficace en cas de restriction alimentaire provisoire. Pour une durée de nutrition supérieure à trois, quatre semaines, ou en cas de contre-indication à la sonde nasogastrique, le recours à une gastrostomie ou à une jéjunostomie est préférable, en particulier pour la NE à domicile.
Une inhalation bronchique peut survenir selon deux mécanismes : l’inhalation massive du soluté nutritif, rare, et les inhalations occultes à répétitio
Le choix de la voie d’abord tient compte des préférences et du mode de vie du patient avec l’objectif d’allier nécessité d’une alimentation entérale et qualité de vie. Le patient doit donc être informé de la mise en place et du fonctionnement du dispositif d’alimentation, de ses bénéfices et de ses risques.
À l’instauration de la NE, la tolérance est meilleure avec un volume et un débit d’administration augmenté progressivement jusqu’à atteindre la cible nutritionnelle.
La poche de nutrition est suspendue à 80 cm au-dessus du patient, une tubulure est branchée directement sur la sonde gastrique. Le débit est réglé au moyen de la mollette de la tubulure, le comptage en nombre de gouttes à la minute est fonction de la viscosité du nutriment. Le système par gravité peut être utilisé si le tube digestif est normal ou en l’absence de ralentissement du transit digestif.
La pompe à régulateur de débit permet de varier le débit de la NE et d’étaler les apports sur trois à douze heures, parfois sur vingt-quatre heures. L’installation est la même que pour le système par gravité, mais avec une tubulure spéciale adaptée à la pompe. La prise en charge par l’Assurance maladie est réservée à certaines indications (lire plus loin p.41).
L’alimentation entérale peut s’effectuer de manière cyclique ou continue. « Le rythme de trois apports par jour, matin, midi et soir, entrecoupés par des périodes de jeûne, semblable à l’alimentation naturelle, sert de base à partir de laquelle la nutrition sera adaptée en fonction de sa tolérance par le patient, des passages des infirmières si nécessaire et de la vie sociale du patient », explique Murielle Creste, diététicienne dans l’équipe de nutrition entérale à domicile de l’hôpital Forcilles à Férolles-Attilly (Seine-et-Marne).
L’administration d’une poche de nutrition se fait sur trois à six heures plusieurs fois par jour. La nutrition est souvent administrée la nuit, complétée ou prolongée en journée lorsqu’un problème de tolérance empêche de passer la totalité des apports pendant la nuit. Les débits moyens sont de 100-120 ml/h la nuit et 250 ml/h la journée.
La nutrition en discontinu permet de :
→ restaurer l’alternance jeûne/nutrition ;
→ conserver des activités professionnelles ou scolaires ;
→ maintenir une alimentation per os la journée le cas échéant sans couper l’appétit avec la NE.
L’administration en continu sur vingt-quatre heures se fait en changeant les poches de nutrition tout en conservant le même débit (maximum 60-80 ml/h). Elle nécessite l’immobilisation prolongée du patient et est réservée aux situations adaptées. Cette administration :
→ procure une meilleure tolérance gastrique due à son faible débit ;
→ donne la possibilité de passer plus de 6 litres par jour ;
→ est obligatoire pour les sondes jéjunales.
Jusqu’en 1965, l’alimentation entérale était réalisée à la seringue. Aujourd’hui, l’administration à la seringue est utilisée pour la prise des médicaments ou l’apport d’eau supplémentaire. Mal tolérée, l’administration par bolus entraîne un risque de nausées, de vomissements et de diarrhées. Pour limiter ces effets, les apports par bolus doivent se faire lentement, à bonne température, sans excéder plus de trois litres par jour.
La calorimétrie indirecte est l’outil de référence pour l’évaluation de la dépense énergétique journalière totale. L’énergie utilisée dans l’organisme est considérée comme équivalente à celle produite à partir de l’oxydation des nutriments. La mesure de la consommation globale d’oxygène à travers les échanges gazeux indique la dépense énergétique. En pratique, les soignants ont recours à des méthodes plus accessibles pour mesurer les besoins caloriques d’une personne.
Les besoins caloriques pour un adulte sont de l’ordre de :
→ 25 kcal/kg par jour en phase aiguë d’une maladie ou d’une agression, ou pour une affection non catabolisante ;
→ 30 à 35 kcal/kg par jour en phase de convalescence ou d’amélioration d’une affection catabolisante, notamment en ambulatoire.
La dépense énergétique de base ou au repos, aussi appelée “métabolisme de base”, correspond à la dépense minimum nécessaire pour faire fonctionner l’organisme et assurer les fonctions vitales (cardiaque, respiratoire, neurologique, digestive et biochimique). Les dépenses énergétiques de base (DEB) sont calculées selon différentes formules qui reposent sur l’âge, le poids, la taille et le sexe. La plus couramment utilisée et la plus ancienne est la formule de Harris et Benedict (1919) qui indique :
→ pour les hommes : DEB (kcal) = 13,707 x poids (kg) + 492,3 x taille (m) - 6,673 x âge (an) + 77,607 ;
→ pour les femmes : DEB (kcal) = 9,740 x poids (kg) + 172,9 x taille (m) - 4,737 x âge (an) + 667,051.
La DEB correspond au deux tiers de la dépense énergétique totale pour vingt-quatre heures. Pour connaître les besoins énergétiques totaux d’une personne, les résultats de la DEB doivent être multipliés par des facteurs d’activité, de stress et de température :
→ le facteur d’activité : multiplier la DEB par 1,2 si le patient est alité ou 1,3 s’il ne l’est pas ;
→ le facteur stress est de 1 en l’absence de complication : multiplier par 1,2 pour une fracture, 1,3 pour un état septique, 1,4 pour une péritonite, 1,5 pour un polytraumatisme… ;
→ le facteur température : 1,1 pour 38 °C ; 1,2 pour 39 °C ; 1,3 pour 40 °C et 1,4 pour 41 °C.
« En service, les diététiciennes utilisent ces formules pour calculer les apports en fonction des besoins. Le résultat théorique donne des objectifs nutritionnels, mais il sera adapté à la tolérance de la nutrition par le patient », précise Murielle Creste. Dans la pratique, la surveillance du poids est la plupart du temps le critère qui incite à augmenter ou diminuer les apports.
Les calories sont fournies par les lipides (1 g de lipide = 9 kcal) et les glucides (1 g de glucide = 9 kcal). Ils sont apportés par les mélanges nutritionnels qui contiennent également de l’azote destiné à renforcer le capital protéique musculaire (lire ci-après). Glucides, lipides et azote sont généralement présents dans les mélanges nutritionnels dans des proportions correspondant aux recommandations. Le calcul de la répartition glucido-lipidique des calories est ainsi prévu dès la fabrication du produit.
Ils visent à maintenir et si possible à reconstituer le capital protéique musculaire. Chez le patient “hypercatabolique” (infections, cancers, états inflammatoires…), les pertes urinaires d’azote sont élevées. Sachant que la métabolisation de l’azote consomme des calories (environ 150 kcal par gramme d’azote), l’apport simultané de calories et d’azote vise à obtenir un bilan d’azote positif (avec des entrées supérieures aux sorties). Lorsque l’augmentation des apports d’azote s’associe à une augmentation des pertes, cela signifie que les possibilités d’anabolisme de l’organisme sont dépassées. L’augmentation des apports en azote est alors inutile, seule la guérison de la maladie causale permettra d’obtenir un bilan azoté positif ou nul, signe d’un besoin en azote satisfait.
Les nutriments sont conditionnés dans des poches (ou flacons) en matière plastique multicouche de 500, 1 000 et 1 500 ml. Les besoins en macronutriments sont déterminés pour un apport nutritionnel quotidien minimum de 1 500 kcal, la NE pouvant être exclusive. Lorsqu’un mélange nutritif est mal toléré, et après avoir vérifié les bonnes conditions d’administration, il peut être intéressant de changer de gamme de produits.
Ce sont les mélanges “standard” de nutriments entiers peu dégradés : protéines entières, lipides sous forme de triglycérides à chaîne longue, glucides, vitamines, sels minéraux et oligoéléments, avec ou sans fibre. Ils conviennent à la plupart des patients en NE.
Ce sont des nutriments dits “prédigérés”, de poids moléculaire intermédiaire permettant une meilleure absorption en cas d’altération du grêle et/ou du côlon. Ils sont peu utilisés et sont prescrits sur avis spécialisé entre autres en cas d’insuffisance pancréatique, syndrome du grêle court, insuffisance pancréatique exocrine, fuites lymphatiques post-opératoires, fistules digestives complexes.
Ils sont destinés à des situations pathologiques ou à certaines complications comme par exemple les troubles glycémiques, les situations d’agressions métaboliques, les escarres ou encore les cas de diarrhées chroniques (lire Savoir faire p.43).
Les mélanges polymériques normoprotidiques pour NE peuvent être :
→ hypoénergétiques : valeur énergétique supérieure ou égale à 0,5 kcal/ml et inférieure ou égale à 0,9 kcal/ml ;
→ normoénergétiques : valeur énergétique supérieure à 0,9 kcal/ml et inférieure à 1,2 kcal/ml ;
→ hyperénergétiques : valeur énergétique supérieure ou égale à 1,2 kcal/ml et inférieure ou égale à 1,6 kcal/ml.
Le choix de l’apport énergétique (calorique) est fait en fonction du statut pondéral, comme pour l’alimentation naturelle per os.
Les protéines représentent 16 à 20 % des apports énergétiques totaux des mélanges polymériques hyperprotidiques. Ils peuvent être normoénergétiques (0,9 à 1,2 kcal/ml) ou hyperénergétiques (1,2 à 1,6 kcal/ml). Les mélanges hyperprotidiques sont prescrits en fonction des besoins de reconstruction en lien avec le contexte médical. Par exemple, la survenue d’une escarre justifie des apports protidiques augmentés pour favoriser la cicatrisation.
Des mélanges enrichis en fibres visent à améliorer les troubles du transit (diarrhée ou constipation) parfois associés à l’alimentation entérale. Les fibres procurent généralement une meilleure régulation du transit. Elles pourraient théoriquement être utilisées dans une grande majorité des cas de NE, notamment chez les patients recevant une nutrition pendant plus d’un mois en l’absence d’alimentation orale contenant des fibres. Outre leurs propriétés fonctionnelles, les fibres ajoutées à la nutrition entérale sont intéressantes pour leurs effets métaboliques, particulièrement pour le contrôle glycémique. Les fibres participeraient aussi au renforcement de la barrière intestinale et à la diminution de la translocation bactérienne colique (passage de bactéries d’origine digestive à travers la barrière de la muqueuse intestinale vers les ganglions mésentériques puis vers les organes à distance avec un risque d’infection).
Le liquide contenu dans la poche de nutrition ne suffit pas toujours et il y a un risque de déshydratation (manque d’eau et de sels minéraux). Un apport complémentaire peut être prescrit et sera administré soit à la seringue (par bolus) en respectant les habitudes du patient (eau du robinet, eau minérale…), soit par des poches qui peuvent être utilisées en rinçage après la nutrition ou de façon concomitante avec un branchement en Y. L’hydratation doit être prescrite en tenant compte du volume d’eau instillée pour le passage des médicaments et les rinçages de la sonde pour éviter les risques de surcharge.
→ Les premiers signes sont la soif, des lèvres sèches, une perte de poids débutante (inférieure à 5 % du poids du corps), une fatigue anormale et une perte de force. Chez les personnes âgées, la sensation de soif, souvent retardée et peu marquée, peut masquer une déshydratation.
→ Les signes d’une déshydratation grave sont une soif intense, une bouche et une langue sèches, un regard terne et des yeux enfoncés, l’apparition d’un pli cutané, une peau sèche, froide et pâle, une fièvre, des urines en faible quantité, des maux de tête, une désorientation, des vertiges, des troubles de la conscience (malaise, étourdissements…), une modification du comportement (agitation, apathie, grande faiblesse…).
Pour être prise en charge, la prescription initiale d’une NE doit être effectuée, pour une période de quatorze jours, par un médecin hospitalier. Elle doit être qualitative et quantitative, datée et signée, et préciser le nutriment et sa posologie, le matériau de la sonde, sa charrière et sa longueur.
Le premier renouvellement est effectué pour une durée maximale de trois mois par le service à l’origine de la prescription initiale qui réévalue la situation au bout de ces trois mois. Les renouvellements ultérieurs ont lieu tous les trois mois au cours de la première année et peuvent être effectués par le médecin traitant. Après la première année, les renouvellements ont lieu tous les ans lors de la réévaluation annuelle par un service hospitalier.
Ce forfait couvre la fourniture du matériel nécessaire et la prestation de service durant les quatorze premiers jours de la prise en charge. Il s’ajoute aux forfaits hebdomadaires (lire ci-après) une seule fois par patient. Le forfait de première installation comporte :
→ la coordination et l’organisation du retour à domicile en liaison avec le service hospitalier prescripteur ;
→ une visite d’installation le jour du retour du patient à domicile ;
→ les explications sur la NE au patient et à ses proches, y compris des consignes d’hygiène et de sécurité ;
→ la fourniture d’un livret de nutrition entérale à domicile et d’un carnet de suivi ;
→ un appel téléphonique dans les quarante-huit à soixante-douze heures ;
→ une visite de fin de prestation de première installation à quatorze jours.
C’est le “forfait hebdomadaire 1”.
Il comprend :
→ la livraison des mélanges nutritifs et des dispositifs médicaux d’administration tous les vingt-huit jours (selon la prescription) ;
→ la livraison et la mise à disposition des consommables et accessoires et leur fréquence de changement (voir tableau p.42) ;
→ une astreinte téléphonique vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, au tarif local ;
→ la gestion administrative du dossier du patient ;
→ la gestion de la continuité des prestations en cas de changement d’adresse temporaire du malade ;
→ une visite de suivi à domicile à trois mois puis tous les trois mois la première année et tous les six mois les années suivantes ;
→ la surveillance de la bonne utilisation des mélanges nutritifs (stockage, date de péremption, traçabilité…) et de leur consommation ;
→ la participation à la coordination du suivi du malade avec les médecins (prescripteur et traitant) et les auxiliaires médicaux ;
→ une information écrite régulière (au moins trimestrielle) au prescripteur sur le suivi des patients, les éventuels dysfonctionnements et incidents, ainsi que le compte rendu de toutes les interventions.
Ce “forfait hebdomadaire 2” reprend les éléments du forfait hebdomadaire 1, en ajoutant des critères de surveillance et de suivi propres au mode de nutrition avec pompe ou régulateur de débit. Les accessoires et consommables inclus dans ce forfait sont également adaptés à ce mode de nutrition (voir tableau p.42).
Patients à risque de régurgitation, alimentation nocturne, alimentation en site jéjunal, gastrectomies, trouble de la conscience sévère, maldigestion (transformation des aliments en nutriments) ou malabsorption (transport des nutriments du tube digestif au sang à travers la barrière intestinale) avec une diarrhée chronique comme symptôme prévalent, troubles moteurs intestinaux, intolérance à la nutrition par gravité (diarrhée, reflux, inhalation et météorisme douloureux), patients et entourage ne pouvant gérer une nutrition par gravité, troubles de l’équilibre glycémique, enfant de moins de 16 ans. « Les indications de la pompe à régulateur de débit prévues à la liste des produits et prestations remboursables par l’Assurance maladie ont été élargies et tiennent mieux compte des différentes situations de nutrition entérale », remarque Tania Palmieri, directrice de la prestation nutrition chez Orkyn’, prestataire de santé à domicile.
→ Surveillance de l’état du matériel tous les trois ou six mois lors de la visite de suivi.
→ Si panne, remplacement du matériel dans un délai de douze heures.
→ Reprise du matériel au domicile et désinfection.
→ Installation du régulateur de débit et formation au maniement du régulateur de débit, en cas de NE nécessitant un régulateur de débit. Le régulateur de débit est comme un moteur entraînant une tubulure adaptée et commandant le débit de la nutrition entérale par fraction de 5 ml à 10 ml/heure, doté d’alarmes auditive et visuelle en cas d’anomalie de fonctionnement.
À noter : il est possible pour le patient de placer son matériel dans un sac à dos pour se déplacer. Le prestataire peut fournir le matériel.
La prise en charge des produits pour NE à domicile destinés aux adultes est assurée pour les patients dont la fonction intestinale est normale mais qui sont dénutris selon les critères suivants :
→ pour les adultes de moins de 70 ans : perte de poids supérieure ou égale à 5 % en un mois ou supérieure ou égale à 10 % en six mois ou indice de masse corporelle (IMC) inférieur ou égal à 18,5 (hors maigreur constitutionnelle) ;
→ pour les adultes de plus de 70 ans : perte de poids supérieure ou égale à 5 % en un mois ou supérieure ou égale à 10 % en six mois ou IMC inférieur ou égal à 21 ou Mini Nutritional Assessment (MNA) inférieur ou égal à 17/30, ou albuminémie inférieure à 35 g/l.
Les produits pour NE à domicile (NEAD) sont pris en charge pour les patients ayant un risque significatif de dénutrition en raison d’une incapacité à couvrir leurs besoins nutritionnels, en raison de la présence d’un ou plusieurs des trois mécanismes suivants :
→ apports spontanés insuffisants par rapport aux besoins estimés ou mesurés ;
→ hypermétabolisme et/ou hypercatabolisme ;
→ syndrome de malabsorption. Les prescriptions de NEAD concernent souvent des patients déjà dénutris.
La NE doit faire l’objet d’un suivi du poids du patient, de la tolérance et de l’observance de l’alimentation et de l’évolution de la pathologie. L’article R4311-5 du Code de la santé publique stipule que, dans le cadre de son rôle propre, l’infirmière accomplit :
→ l’administration de l’alimentation par sonde gastrique et le changement de sonde d’alimentation gastrique en application d’une prescription médicale (article R4311-7) ;
→ les soins et la surveillance des patients en assistance nutritive entérale (ou parentérale) ;
→ la surveillance de l’élimination intestinale et urinaire…
Et plus généralement :
→ la surveillance de l’hygiène et de l’équilibre alimentaire et l’aide à la prise des médicaments présentés sous forme non injectable ;
→ la surveillance de leurs effets et l’éducation du patient (objectifs et gestion du traitement, prévention des complications en lien avec la situation médicale…).
(1) “Recommandations pour le bon usage de la nutrition entérale et parentérale et de l’assistance nutritionnelle chez l’adulte”, Comité régional du médicament et des dispositifs médicaux (CRMDM), 2003 (lien raccourci : bit.ly/1RsiBk8).
(2) “Les vraies indications de la nutrition parentérale”, article collectif paru dans Nutrition clinique et métabolisme, septembre 2011.
La nutrition entérale (du grec enteron qui veut dire “intestin”) était pratiquée en 3 500 avant Jésus-Christ par les Égyptiens, Indiens et Chinois, qui administraient par voie intrarectale des lavements à base de vin, de lait ou de blé. La nutrition entérale est utilisée dans un but thérapeutique pour la première fois en 1790 par un chirurgien anglais. Le principe “moderne” de la nutrition entérale est développé au XIXe siècle avec l’invention de la première pompe d’alimentation à Paris. En 1968, le médecin français Étienne Levy développe la nutrition entérale à débit constant par sonde gastrique ou jéjunale. Il s’agit alors d’un système de pompe (ressemblant à un “mini-frigo”) doté d’un mécanisme pour mélanger le produit de nutrition et le conserver à 4-5 degrés pour éviter la pullulation microbienne.
→ L’incidence moyenne (nombre de nouveaux cas) de la nutrition entérale à domicile (NEAD) est de 24,9 pour 100 000 habitants par an.
→ La prévalence moyenne (nombre de cas à un moment donné) est de 57,3 pour 100 000 habitants par an.
→ Les incidences et prévalences sont plus élevées après 40 ans et surtout après 60 ans.
→ Au total, 37 500 personnes par an ont été prises en charge en NEAD en France en 2011 et 2012.
Estimations sur la base des données des Caisses primaires d’Assurance maladie pour les années 2011 et 2012.
La nutrition entérale présente des avantages sur la nutrition parentérale.
→ Elle est plus facile à réaliser que la nutrition parentérale.
→ Elle assure des apports nutritionnels équivalents.
→ Elle expose à moins de complications infectieuses et thromboemboliques (cathéter), métaboliques et hémorragiques (gastrites aiguës de stress).
→ Elle entretient la motilité intestinale et facilite la reprise de l’alimentation orale.
→ Elle prévient l’altération de la barrière intestinale.
→ Elle apporte des vitamines et oligoéléments…
Du plus simple au plus à risque de complications : alimentation orale → nutrition entérale → nutrition parentérale périphérique -> nutrition parentérale centrale.
Extrait de “Recommandations pour le bon usage de la nutrition entérale et parentérale et de l’assistance nutritionnelle chez l’adulte”, Comité régional du médicament et des dispositifs médicaux (CRMDM), 2003 (à lire via le lien raccourci bit.ly/1RsiBk8).
Nutrition entérale à domicile (NEAD)
Les actes spécifiques à la NEAD sont inscrits à l’article 4, “Pose de sonde et alimentation” (Titre XVI, Chapitre 1 de la NGAP).
→ Pose de sonde gastrique : AMI 3
→ Alimentation entérale par gavage ou en déclive ou par nutri-pompe, y compris la surveillance, par séance : AMI 3
→ Alimentation entérale par voie jéjunale avec sondage de la stomie, y compris le pansement et la surveillance, par séance : AMI 4