Cahier de formation
Savoir
Grâce aux nets progrès dans le dépistage et la prise en charge thérapeutique, le cancer du sein est l’un des cancers dont le pronostic est le meilleur. Il reste néanmoins en France au premier rang des cancers chez la femme, en termes de fréquence et de nombre de décès.
→ Une glande mammaire (voir figure ci-dessous), composée de quinze à vingt lobes, constitue le sein. Elle est entourée d’un tissu graisseux, en quantité plus ou moins importante, et de tissu conjonctif. Chacun des lobes est lui-même constitué de canaux et de lobules. Les lobules sont formés d’alvéoles mammaires regroupées en grappes. La paroi des alvéoles est composée de cellules épithéliales sécrétoires et de cellules myoépithéliales contractiles.
→ Le sein est également parcouru de vaisseaux sanguins et de vaisseaux lymphatiques. Les ganglions et les vaisseaux lymphatiques composent le système lymphatique, qui aide notamment à combattre les infections. Les ganglions lymphatiques du sein (voir figure page de droite) sont principalement situés au niveau de l’aisselle (ganglions axillaires), au-dessus de la clavicule (ganglions sus-claviculaires), sous la clavicule (ganglions sous-claviculaires ou infra-claviculaires) et à l’intérieur du thorax, autour du sternum (mammaires internes).
→ La principale fonction biologique du sein est la production du lait maternel. Les lobules sont capables de sécréter du lait pendant la période d’allaitement. Les canaux de chaque lobule se regroupent en un canal galactophore. Le lait est transporté par les canaux galactophores, débouchant séparément au niveau du mamelon.
→ La glande mammaire est une glande exocrine hormono-dépendante. Elle se développe et fonctionne sous l’influence des œstrogènes et de la progestérone. Pendant la grossesse, les œstrogènes sécrétés par l’ovaire, ainsi que la progestérone sécrétée par le corps jaune puis par le placenta, provoquent le développement des glandes mammaires. Juste avant l’accouchement, les seins produisent un liquide, le colostrum. Celui-ci fait place au lait maternel au bout de trois jours, sous l’influence de la prolactine.
→ Les seins constituent également un élément important de la féminité et de l’image que la femme a de son corps.
En 2012, le cancer du sein est le premier cancer (48 800 cas) chez la femme, devant le cancer colorectal (18 900) et devant le cancer du poumon (11 300).
Le cancer du sein est la première cause de décès par cancer chez la femme (11 800 décès par an). À noter que le cancer du poumon (8 700) se positionne désormais au deuxième rang chez la femme, devant le cancer colorectal (8 400).
Après une augmentation du nombre de nouveaux cas de plus de 138 % en vingt-cinq ans (entre 1980 et 2005), les épidémiologistes ont noté un récent arrêt de cette progression en France, comme dans d’autres pays développés. Depuis 2008, on observe en France une stabilité du nombre de nouveaux cas diagnostiqués.
En France, le taux de mortalité (standardisé sur la population mondiale)
Les évolutions de la mortalité au cours des dix dernières années sont supposées être liées à l’amélioration de la prise en charge thérapeutique et au dépistage plus précoce du fait du dépistage généralisé en France.
La survie nette (survie que l’on observerait si la seule cause des décès des patients était le cancer) est un indicateur de santé qui permet de mettre en évidence des variations considérables en termes de survie selon les cancers.
La survie nette pour le cancer du sein est de 86 % à cinq ans, et de 76 % à dix ans, alors que la survie nette pour le cancer du poumon est de 14 % à cinq ans, et de 8 % à dix ans. La survie nette à cinq ans était de 81 % en 1990. Les cancers du sein se situent parmi les “cancers de bon pronostic”.
Environ 75 % des femmes prises en charge conservent leur sein
Près de huit cancers du sein sur dix se déclarent chez les femmes de 50 ans et plus. L’incidence augmente régulièrement jusqu’à 65 ans. Il est rare chez les moins de 35 ans, exceptionnel avant 20 ans. L’âge moyen du diagnostic est 61 ans.
→ Entre 5 et 10 % des cancers du sein sont des formes héréditaires, c’est-à-dire attribuables à une mutation génétique transmise d’un parent à un enfant. Deux gènes de prédisposition au cancer du sein ont été mis en évidence, nommés BRCA1 (BReast CAncer) et BRCA2, respectivement situés sur les chromosomes 17 et 13. Près de soixante mille femmes seraient porteuses de l’une de ces deux mutations génétiques. Elles peuvent être transmises par n’importe lequel des deux parents, et augmentent le risque de développer un cancer du sein et de l’ovaire. Soixante mille autres femmes sont, elles aussi, porteuses d’une mutation augmentant le risque de développer un cancer du sein, dans un gène non encore identifié.
→ En matière de dépistage, la difficulté est aujourd’hui de repérer les patientes porteuses d’une mutation. Certes, un nombre important de cas de cancers du sein dans une famille est évocateur d’un cancer de type héréditaire. Mais ce n’est pas toujours le cas. En effet, ce n’est pas parce que personne n’a été touché dans une famille que la mutation est absente. Cette dernière peut être portée par le père et rester silencieuse.
→ La réalisation d’un test génétique permettant de mettre en évidence les mutations BRCA1 et BRCA2 peut être envisageable dans certaines situations, comme un cancer du sein avant l’âge de 36 ans ; un cancer du sein de type médullaire, quel que soit l’âge du diagnostic ; un cancer de l’ovaire diagnostiqué avant 70 ans, sauf les tumeurs germinales et les tumeurs de type borderline (frontière) ; les hommes atteints d’un cancer du sein.
→ Les femmes ayant eu un cancer du sein invasif, un carcinome canalaire ou lobulaire in situ, ou une hyperplasie lobulaire atypique. Un antécédent d’irradiation thoracique médicale à haute dose (dont un antécédent d’irradiation pour maladie de Hodgkin).
→ Traitement hormonal de la ménopause (THM). Tous les THM ne semblent pas augmenter de façon équivalente le risque de cancer du sein. Certains travaux ont mis en évidence un sur-risque avec les THM œstroprogestatifs, utilisés pendant une durée prolongée. Pour les THM contenant seulement des œstrogènes, des études sont encore nécessaires.
→ Contraceptifs oraux. L’ensemble des études faites aux États-Unis avec des contraceptifs différents de ceux utilisés en France conclut à une augmentation du risque. Le risque serait plus élevé pour les femmes ayant pris des contraceptifs oraux plus de cinq ans avant leur première grossesse.
→ Mastectomies bénignes. Elles peuvent être un facteur de risque et nécessitent une surveillance.
→ Puberté précoce ou ménopause tardive.
→ Les femmes qui n’ont pas eu d’enfant ou ayant eu leur première grossesse après 30?ans ont un risque sensiblement augmenté de développer un cancer du sein par rapport à celles qui ont eu un enfant avant 30 ans.
→ Le surpoids et l’obésité chez la femme ménopausée augmentent les risques de cancer du sein. En effet, une grande partie des cancers du sein sont sensibles aux hormones œstrogènes, hormones produites en petites quantités par les tissus graisseux.
→ La consommation d’alcool, même faible, augmente le risque, proportionnellement à la quantité consommée. Elle est susceptible d’augmenter la production d’œstrogènes. Elle réduit dans l’organisme les quantités de vitamines A, B et C impliquées dans la réparation des altérations cellulaires.
→ Une activité physique insuffisante. L’activité physique a une action préventive sur le cancer du sein. La diminution du risque pour les femmes les plus actives par rapport aux moins actives est estimé à environ 20 % ; 21 % des cas de cancers du sein en France sont attribuables à une activité physique insuffisante.
→ La consommation de viandes grasses semble aussi augmenter légèrement le risque.
→ Le diabète de type 2.
→ Les cancers du sein sont majoritairement des adénocarcinomes (95 % des cas) qui se développent à partir des cellules épithéliales de la glande mammaire. Il faut environ six à dix ans pour passer d’une cellule cancéreuse à une tumeur de 2 cm de diamètre.
→ Les adénocarcinomes se développent majoritairement à partir des cellules des canaux galactophores (carcinome canalaire : 40 à 75 % des cas), ou plus rarement à partir des lobules (carcinome lobulaire : 5 à 15 % des cas).
→ Des cas de carcinomes médullaires, papillaires ou tubuleux beaucoup plus rares que les carcinomes lobulaires peuvent également être rencontrés.
Durant les premiers stades de développement d’un cancer, la symptomologie est frustre. À un stade avancé du développement, les signes cliniques peuvent être les suivants :
→ une grosseur ou une induration au niveau du sein ou de l’aisselle, douloureuse ou non ;
→ une déformation, une ulcération, une inflammation ou une rétractation de la peau au niveau des seins ;
→ un écoulement unipore sanguin au niveau du mamelon, un eczéma ou un érythème de l’aréole ou du mamelon.
Ils représentent 25 % des cas. Les cellules cancéreuses se trouvent uniquement à l’intérieur des canaux galactophores ou des lobules, sans que les cellules aient franchi la membrane basale qui les entoure. On parle de cancer canalaire in situ si la tumeur est dans un canal. Entre 85 et 90 % des cancers in situ sont des cancers canalaires in situ. Le traitement des cancers canalaires in situ se limite généralement à une intervention chirurgicale. Le cancer lobulaire in situ est bien plus rare (1 à 15 %), la tumeur est lobulaire. Ce type de cancer est plutôt considéré comme un facteur de risque de déclarer un cancer du sein que comme un cancer du sein à proprement parler.
Ils représentent 75 % des cas. Les cellules cancéreuses ont envahi les tissus avoisinant la tumeur. Le plus souvent, il s’agit d’un cancer canalaire infiltrant, l’atteinte lobulaire infiltrante est beaucoup plus rare. S’ils ne sont pas traités, ces cancers peuvent ensuite se propager par les ganglions lymphatiques les plus proches (axillaires) puis plus rarement vers d’autres parties du corps, générant ainsi des métastases. On distingue différents types de carcinomes infiltrants : le plus fréquent est le type luminal, ce terme se rapportant aux cellules du tissu mammaire qui produisent le lait, de type?A (forte surexpression des récepteurs des œstrogènes) ou B (faible surexpression des récepteurs des œstrogènes).
Dans 90 % des cas, le cancer du sein est découvert lors d’un dépistage organisé ou individuel et dans 10 % des cas par un examen clinique à la suite de signes d’appel.
La palpation du sein et des aires ganglionnaires doit faire partie de l’examen gynécologique annuel que pratique toute femme dès le début de l’activité sexuelle. Dans la plupart des cas, le cancer se manifeste cliniquement par un nodule que l’on peut découvrir à partir de 1 cm de diamètre environ, nodule plus ou moins profond, dur, non douloureux et semblant comme “fixé” dans le sein. Il sera d’autant plus suspect qu’il sera associé à un écoulement mammaire, une rétraction cutanée, une adénopathie axillaire sus- ou sous-claviculaire.
En l’absence de symptôme, le cancer du sein peut être mis en évidence dans le cadre du dépistage organisé ou individuel par mammographie. Le dépistage systématique est proposé partout en France, depuis 2004, aux femmes entre 50 et 74?ans, tous les deux ans ; la mammographie est prise en charge à 100 % par l’Assurance maladie
La mammographie permet de détecter des anomalies de moins d’un centimètre de diamètre, dont certaines seulement se révèleront être un cancer. L’examen comprend deux clichés radiologiques de chaque sein. Il est associé à un examen clinique avec questionnaire médical pour permettre au radiologue de connaître les antécédents familiaux et personnels.
À la suite de cet examen, le radiologue donne oralement une première interprétation de l’examen. Si aucune anomalie n’est repérée, elle est vérifiée systématiquement par un second lecteur. Les résultats définitifs sont transmis sous une quinzaine de jours à la femme et à son médecin traitant. En cas d’anomalie, des examens complémentaires (clichés supplémentaires agrandis, échographie, ponction et éventuellement biopsie) sont prescrits pour préciser le diagnostic.
C’est l’examen de référence des lésions du sein. Les images sont classées en fonction de leur degré de suspicion de malignité. Le compte rendu utilise la classification de l’American College of Radiology (ACR) (lire ci-dessus).
→ L’échographie (ultrasons) se fonde sur les différences de contraste existant entre les lésions et le reste du sein. Elle peut être utile en cas de masse visible et/ou de seins denses (analyse de la mammographie très difficile) pour orienter le diagnostic vers une anomalie bénigne (kyste) ou une tumeur.
→ L’IRM est systématique en cas d’antécédent d’irradiation thoracique médicale à haute dose (maladie de Hodgkin), de prédisposition génétique, d’antécédent de cancer traité avec une suspicion de récidive, ou d’antécédent familial de cancer du sein. Elle n’est pas préconisée en première intention en cas de masse palpable.
Lorsque des formes suspectes ont été repérées à la mammographie (ACR 4 et ACR 5), l’examen anatomo-pathologique permet d’affiner le diagnostic et d’orienter la prise la prise en charge thérapeutique. Un fragment du tissu mammaire est prélevé par ponction cytologique ou biopsie (lire l’encadré page ci-contre). Son analyse au microscope confirme s’il s’agit d’une lésion bénigne ou d’un cancer.
En cas de lésion cancéreuse, l’examen histologique permet de préciser :
→ si le cancer est d’origine canalaire ou lobulaire ;
→ si le cancer est in situ ou invasif ;
→ s’il s’agit d’un cancer différencié ou indifférencié ;
→ le statut des récepteurs hormonaux (ER ou récepteurs aux œstrogènes, PR ou récepteurs à la progestérone), c’est-à-dire le pourcentage de récepteurs dans les cellules tumorales ;
→ si la protéine HER2 (human epidermal growth factor receptor ou récepteur 2 du facteur de croissance épidermique humain) est surexprimée (15 à 30 % des cancers du sein).
En analysant la présence des récepteurs, l’examen anatomo-pathologique donne des critères prédictifs de réponse à certains traitements :
→ une tumeur ER ou PR positive (avec récepteurs aux œstrogènes et/ou à la progestérone) est susceptible de réagir à l’hormonothérapie ;
→ une tumeur présentant l’HER2 est sensible à une thérapie ciblant le récepteur HER2.
La stratégie thérapeutique est établie à partir d’une évaluation du cancer et de son extension (voir le tableau ci-dessous). Elle dépend :
→ du type de cancer, de son stade au moment du diagnostic ainsi que de son grade ; ?du statut des récepteurs hormonaux ou HER2 ;
→ de l’état de santé de la femme (comorbidités associées) et des éventuelles contre-indications.
Le grade histopronostique d’Elston-Ellis repose principalement sur l’apparence des cellules cancéreuses (architecture tumorale), la forme de leur noyau (qui peut changer lorsque la cellule devient cancéreuse), et la vitesse à laquelle elles se développent (activité mitotique). Le grade I correspond aux tumeurs les moins agressives et le grade III aux plus agressives. Il est précisé dans le compte rendu anatomopathologique.
Le stade du cancer TNM selon l’Union internationale contre le cancer et de l’American Joint Commitee on Cancer est exprimé par un chiffre romain allant de 0 à IV et tient compte de la taille de la tumeur (T), la présence ou non de cellules cancéreuses dans les ganglions (N pour Nodes en anglais), la présence ou non de métastases (M).
Elle est presque toujours le traitement de première intention des cancers non métastatiques.
Deux grands types d’intervention :
→ la chirurgie conservatrice (mastectomie partielle) consiste à retirer la tumeur et une petite partie des tissus qui l’entourent de façon à conserver la plus grande partie du sein. Le traitement se fait souvent en ambulatoire ;
→ la chirurgie non conservatrice (mastectomie totale) consiste à retirer la totalité du sein, y compris l’aréole et le mamelon. Cette chirurgie plus lourde est indispensable en présence de plusieurs foyers tumoraux ou de lésions précancéreuses étendues dans le sein, ou pour les femmes ayant des seins de très petite taille. La femme est informée des modalités techniques de la reconstruction mammaire. En cas de mastectomie, si une radiothérapie et/ou une chimiothérapie post-opératoires sont indiquées, la reconstruction immédiate n’est pas recommandée. En cas de carcinome infiltrant, la mastectomie s’accompagne d’un geste chirurgical axillaire homolatéral :
→ soit par la technique du ganglion sentinelle qui consiste à repérer le premier ganglion à être atteint par un examen préalable (marquage par colorant ou corps faiblement radioactif) et à en faire l’ablation. Cette technique est indiquée en cas de petite tumeur infiltrante (moins de deux centimètres), d’absence d’adénopathie axillaire palpable ou suspecte à l’échographie :
– si l’examen histologique trouve des cellules cancéreuses dans ce ganglion, un curage ganglionnaire axillaire est pratiqué avec mise en place d’un traitement adjuvant ;
– si le ganglion est indemne, le curage axillaire n’est pas nécessaire ;
→ soit par le curage axillaire du côté de la tumeur, qui consiste à retirer la chaîne des ganglions lymphatiques (une douzaine en moyenne).
Des complications peuvent survenir après l’opération, à plus long terme ou plusieurs années après l’opération :
→ une douleur et/ou un hématome, dans les jours suivant l’opération dans la zone d’intervention. Un antalgique est alors prescrit. L’hématome disparaît habituellement en quelques jours ;
→ une infection à type d’abcès dans les jours qui suivent l’opération. Un traitement antibiotique est prescrit ;
→ des troubles sensitivomoteurs : la mastectomie peut induire un déséquilibre pondéral ayant un impact sur la musculature du cou ou du dos. La femme ressent une tension au niveau de la peau du sein, et une raideur dans les muscles du bras et de l’épaule. Lors de mastectomie totale, l’affaiblissement musculaire peut être irréversible ;
→ des séquelles esthétiques en postopératoire (perte du relief mammaire, cicatrice, déformations) ;
→ des douleurs du sein fantôme (si mastectomie) dans les trois mois suivant l’intervention. La perception de la présence du sein opéré après mastectomie est une sensation normale liée à la persistance d’une activité au niveau de la zone corticale représentant le sein ;
→ des fourmillements ou une insensibilité de la zone pectorale, de l’aisselle, du bras ou de l’épaule. Ces troubles s’estompent généralement au bout de quelques semaines ;
→ des séquelles sensitives à type de dysesthésie cutanée (picotements, fourmillements, sensation de brûlures) ;
→ une paralysie posturale et/ou des douleurs musculo-squelettiques liées à la position per-opératoire ;
→ des troubles psychologiques à type de troubles anxieux (état de stress post-traumatique), troubles de l’humeur, voire syndrome dépressif.
Les complications liées au curage ganglionnaire peuvent être un lymphocèle, collection de lymphe qui se crée dans le creux axillaire au niveau de l’ablation ganglionnaire (lire p. 41). Il est généralement ponctionné et survient dans les dix jours après l’intervention.
Elle fait souvent partie du protocole de soins pour un cancer du sein, notamment après une chirurgie conservatrice.
La technique (radiations à haute énergie) détruit les cellules tumorales. On distingue deux types de radiothérapie (combinaison possible) : ?la radiothérapie externe par un accélérateur linéaire générateur de rayons pour détruire les cellules à travers la peau. La dose, fractionnée, est délivrée sur plusieurs semaines à raison d’une séance par jour, cinq jours sur sept (pas d’hospitalisation) ;
→ la radiothérapie interne ou curiethérapie utilise des sources radioactives naturelles ou artificielles placées dans la tumeur et à son voisinage pour des tumeurs accessibles et de petit volume (moins de 4 à 5 centimètres de diamètre). Cette technique nécessite souvent une courte hospitalisation.
Pendant le traitement et dans les semaines qui suivent, les effets indésirables les plus fréquents sont des atteintes cutanées :
→ radioépithélite du premier degré ou érythème (rapidement régressif à l’arrêt du traitement) ;
→ radioépithélite exsudative caractérisée par une érosion suintante et douloureuse débutant souvent au niveau du sillon sous-mammaire. La cicatrisation est progressive, pouvant laisser des séquelles (hyper- ou hypochromie) ;
→ radioépithélite nécrosante, rare (érythème cutané douloureux, prurigineux, parfois cartonné, voire ecchymotique). La cicatrisation est lente.
Autres effets secondaires possibles :
→ une asthénie très fréquente due à la maladie et aux effets indésirables des traitements ;
→ une œsophagite (à la deuxième semaine de traitement) si l’œsophage se trouve dans le champ de l’irradiation. Le traitement passe par la prescription d’antiacides ;
→ une pneumopathie aiguë dans les deux à quatre mois après la fin de la radiothérapie.
Les séquelles de la radiothérapie s’observent un an après le traitement et progressent durant les cinq premières années. Elles sont à type de :
→ dyschromies : l’exposition à de faibles doses d’irradiation répétées provoque une pigmentation cutanée alors que des doses d’irradiation plus élevées, en détruisant les mélanocytes, provoquent une dépigmentation ;
→ dépigmentation : déformation et désorientation de la plaque aréolo-mamelonnaire ;
→ asymétrie mammaire : la fibrose du tissu sous-cutané peut être responsable d’une rétraction du sein ;
→ radiodermites (dans un délai variable, en moyenne vingt ans). Trois stades évolutifs ont été établis : la radio-dystrophie (associant télangiectasies, dyschromies, dépilation, atrophie et sécheresse cutanée) ; la radiodermite scléroatrophique (sclérose importante) ; la radionécrose tardive (ulcérations douloureuses et profondes) ;
→ lymphœdème du membre supérieur après irradiation axillaire ;
→ toxicité cardiaque : péricardite, cardiopathie ischémique, insuffisance cardiaque et valvulopathies (toxicité en cas d’irradiation à des doses élevées de la chaîne ganglionnaire mammaire interne) ;
→ dysthyroïdie radio-induite : il s’agit en général d’une hypothyroïdie, secondaire à l’irradiation des aires ganglionnaires sus- et sous-claviculaires. Une surveillance biologique régulière permet de dépister les formes infra-cliniques ;
→ plexopathies radiques liées à la toxicité directe sur les terminaisons du plexus brachial. Les manifestations cliniques débutent entre deux et quatorze mois après le traitement par des paresthésies touchant l’avant-bras et la main, avec des douleurs de type neuropathique.
Par voie veineuse ou/et par voie orale depuis plus récemment, la chimiothérapie permet de diminuer les risques de récidive (de 5 à 50 % selon les cas). Elle peut être administrée avant la chirurgie (néoadjuvante) pour réduire la taille de la tumeur et permettre ainsi une chirurgie conservatrice. Les principaux médicaments utilisés sont :
→ les agents intercalants (anthracyclines et anthracènediones). Ils agissent en s’intercalant entre les bases des chaînes d’ADN des noyaux des cellules tumorales et provoquent ainsi des coupures de l’ADN irréparables ;
→ les poisons du fuseau (vinca-alcaloïdes et taxanes issus de l’if) bloquent la division cellulaire en agissant sur le cytosquelette du noyau ;
→ les alkylants (moutardes azotées, organoplatines, nitroso-urées…) provoquent l’avortement de la division cellulaire ;
→ les antimétabolites (5-fluorouracile, antagonistes puriques ou foliques) inhibent la synthèse des bases nécessaires à l’ADN.
Les schémas d’administration comprennent habituellement quatre à six cures en perfusion intraveineuses courtes de 10 à 60 minutes, espacées de 21 jours. Cette chimiothérapie rapide se fait en ambulatoire ou en hospitalisation à domicile.
La chimiothérapie nécessite souvent la pose d’une voie veineuse centrale, avec ou sans chambre implantable. La chambre implantable ne requiert pas de soins particuliers (hormis une surveillance) en dehors des cures et ne limite pas les activités quotidiennes.
Ils sont liés au fait que ce traitement tue les cellules à croissance rapide, c’est-à-dire les cellules du cancer, mais aussi celles qui sont à l’origine des cellules sanguines, des cheveux, ou celles qui tapissent le tube digestif.
Selon le médicament administré, les effets indésirables peuvent être :
→ prise de poids, fatigue, diminution des globules blancs, anémie, perturbation du bilan hépatique ;
→ perte d’appétit, nausées ou vomissements, constipation ou diarrhée, gastralgies ;
→ somatites, aphtes ;
→ alopécie, ongles abîmés ;
→ perturbation du cycle menstruel, aménorrhée, infertilité ;
→ douleurs musculaires, fourmillements, perte de sensibilité dans les extrémités ;
→ éruption cutanée, syndrome main-pied (irritation, sécheresse, voire ulcérations au niveau de la paume des mains et de la plante des pieds) ;
→ toxicité cardiovasculaire à type de troubles du rythme, de péricardite, d’ischémie myocardique, d’insuffisance cardiaque.
→ L’hormonothérapie est indiquée pour les tumeurs hormonosensibles (80 % des cancers), c’est-à-dire exprimant au moins un des deux récepteurs hormonaux (œstrogène ou progestérone), avec pour objectif de bloquer la croissance des cellules tumorales.
→ Elle complète ou se substitue à la chimiothérapie en traitement adjuvant. Elle est aussi utilisée avant l’opération pour réduire la taille de la tumeur et permettre une chirurgie conservatrice.
→ Le choix de l’hormonothérapie est orienté selon le statut ménopausique de la patiente (inhibiteurs de l’aromatase non indiqués chez les patientes non ménopausées).
Selon le contexte clinique, ces médicaments sont pris par voie orale tous les jours pendant cinq ans. Trois mécanismes d’action sont possibles :
→ une inhibition compétitive des récepteurs aux œstrogènes (tamoxifène ou SERM pour selective estrogen receptor modulators, c’est-à-dire modulateurs sélectifs du récepteur des œstrogènes) ;
→ une inhibition de la synthèse des œstrogènes par blocage de l’enzyme aromatase ;
→ une suppression de la synthèse ovarienne des œstrogènes chez les femmes non ménopausées (analogue de la lutéinostimuline LH-RH).
Variables suivant le protocole utilisé :
→ symptômes de ménopause liés au blocage de la fonction hormonale : bouffées de chaleur, sécheresse vaginale, diminution de la libido, prise de poids ;
→ augmentation du risque d’accidents thrombœmboliques ;
→ cancers de l’endomètre (avec le tamoxifène) ;
→ ostéoporose et douleurs articulaires (avec les inhibiteurs de l’aromatase).
À la différence de la chimiothérapie, qui utilise des médicaments toxiques agissant sur toutes les cellules de l’organisme qui se divisent, les biothérapies bloquent un mécanisme de croissance propre aux cellules cancéreuses. Elles ciblent une caractéristique propre à celles-ci, ou plus fréquente chez elles que dans les cellules saines. Ce type de traitement permet d’obtenir une meilleure efficacité, tout en réduisant le risque d’effets indésirables.
→ Le trastuzumab (Herceptin) ou le lapatinib ciblent les cellules cancéreuses qui produisent en trop grande quantité la protéine HER2.
→ Le bévacizumab bloque les récepteurs VEGFR (Vascular Endothelial Growth Factor Receptor), favorisant la vascularisation de la tumeur et ainsi son développement.
Elles sont utilisées seules, après une radiothérapie ou en association avec une chimiothérapie adjuvante. Traitement administré par perfusion d’environ 30 minutes, à un rythme variable (une fois par semaine à une fois toutes les trois semaines), durant un an.
→ Anticorps monoclonaux (trastuzumab, bévacizumab) : diminution asymptomatique de la fraction d’éjection ventriculaire gauche, partiellement réversible à l’arrêt du traitement. Une échocardiographie tous les trois mois est préconisée pendant le traitement.
→ Inhibiteurs de la tyrosine kinase (lapatinib) : hypertension artérielle, arythmies, dysfonction ventriculaire gauche symptomatique ou non, syndrome coronarien aigu, allongement de QT à l’électrocardiogramme.
(1) Nouveaux cas, incidence et mortalité, à lire sur le site de l’InVS via le lien raccourci bit.ly/1TnWMkx
(2) Cette méthode de calcul s’affranchit de la hausse de mortalité attribuable à l’accroissement et au vieillissement de la population.
(3) À lire sur le site de l’InVS via le lien raccourci bit.ly/1HPQkAY
(4) Sur le site de l’Institut Curie via bit.ly/1MmMoox, p. 16.
(5) À lire, ce document de la HAS : bit.ly/1SSIYR4
(6) Ce dépistage organisé ne concerne pas les femmes présentant un niveau de risque “élevé” (antécédents de cancer du sein par exemple) ou “très élevé” (prédispositions génétiques), dont la prise en charge est spécifique (cf. le site de l’Inca via bit.ly/1FSZpZa).
Près de 1 % des cancers du sein concerne les hommes. Une expérience dont l’oncologue texan Olivier Bogler parle sur son blog malebreastcancerblog.org. Notamment sur le plan psychologique : « Le traitement qui lui a été proposé a été très similaire à celui de sa femme, ce qui a été à la fois “rassurant” et “déconcertant”, comme si “[sa] virilité était remise en question”. Pourtant, le cancer du sein “n’est pas spécialement lié au genre comme le sont le cancer des ovaires ou des testicules” », relève Le Quotidien du médecin du 14 mars. Aux États-Unis, 3 dollars sont investis dans la recherche contre le cancer du sein pour chaque homme malade, contre 200 dollars par femme.
Voilà plusieurs années qu’une controverse se développe sur la balance bénéfices-risques de la mammographie systématique pour les femmes de 50 à 74?ans. Comme le note Prescrire (lien internet : bit.ly/1pZmUsz), pour 1 000 femmes participant au dépistage pendant vingt ans, quelque 75 femmes ont un cancer du sein découvert par le dépistage. Ce repérage plus précoce permet pour certaines un traitement moins lourd et évite une mort par cancer du sein à plusieurs (de 0 à 6) d’entre elles. Mais « au moins 19 femmes sont (…) exposées inutilement aux effets indésirables des traitements d’un cancer (…), alors que leur cancer serait resté asymptomatique en l’absence de dépistage ». Ce surdiagnostic constitue un risque pointé du doigt, par exemple par les six médecins et le toxicologue de Cancer rose (leur brochure : bit.ly/1YIHavF). L’Institut national du cancer (Inca), en 2012, a, lui, souligné le fait que « la communication avec le public devrait plus s’ouvrir aux zones d’incertitudes (…) en termes de bénéfices, de risques », ou encore « sur l’efficience et les limites du dispositif ». Pour l’information et le consentement de chaque femme, en fonction de ses spécificités, le rôle du médecin choisi par les patientes devrait, selon l’Inca, être renforcé (bit.ly/1RhpT6p).
Non, mais il faut en limiter l’usage à une courte durée et uniquement dans un objectif de lutter contre les troubles climatériques (liés à la période de la ménopause). Dans tous les cas, il faut mettre en balance les avantages et les risques. La décision doit se faire conjointement entre la femme et son médecin traitant, après une information claire et objective.
Oui, car les cellules de la tumeur portent à leur surface des récepteurs HER2. La surexpression de HER2 s’accompagne alors d’une prolifération des cellules cancéreuses et l’évolution de la maladie est aggravée : rechutes plus rapides, survenue de métastases et résistance aux traitements conventionnels.
→ Comment sont choisies les techniques ?
Les tissus sont prélevés par ponction cytologique ou biopsie.
Si la lésion est palpable : une ponction cytologique ou une biopsie peut être faite avec le repère de la palpation. Si la lésion est non palpable : la ponction ou la biopsie est faite sous repérage, soit par échographie (microbiopsie), soit par mammographie (microbiopsie stéréotaxique). S’il s’agit de microcalcifications : la biopsie est faite sous repérage mammographique (macrobiopsie stéréotaxique).
→ Comment se déroule une ponction cytologique ?
L’opérateur utilise une mince aiguille pour aspirer du liquide ou des cellules provenant de la lésion suspecte. Il s’agit d’un geste simple (sans anesthésie locale), mais qui peut être inconfortable à cause de la sensibilité des seins. En cas de kyste, la ponction permet de vider son contenu et d’assurer sa régression.
→ En quoi consiste la biopsie à l’aiguille ?
La biopsie (micro- ou macrobiopsie) est faite au moyen d’une aiguille introduite par une petite incision pratiquée dans le sein. C’est un examen rapide (moins d’une heure) réalisé sous anesthésie locale, qui ne nécessite pas d’hospitalisation.
Les microbiopsies sont indiquées pour explorer les anomalies de type “masses ou opacités visibles”. Elles sont faites sous contrôle échographique avec un pistolet automatique muni d’une aiguille ou sous contrôle mammographique (microbiopsie sous stéréotaxie).
Les macrobiopsies sont indiquées pour explorer les foyers de microcalcifications. Elles sont faites selon la même technique que la biopsie guidée par stéréotaxie, mais avec une aiguille de prélèvement plus large. Après la biopsie, le sein est sensible et le prélèvement peut entraîner un hématome que de la glace et un pansement compressif peuvent atténuer.
→ Les calcifications mammaires sont fréquentes, notamment chez les femmes âgées de plus de 50 ans, et le plus souvent non cancéreuses.
→ Les fibroadénomes (kystes) sont fréquents chez les femmes âgées de 35 à 50 ans. Rarement cancéreux, ils nécessitent néanmoins une surveillance radiologique afin de s’assurer qu’ils n’évoluent pas.
→ La mastose (fibrose kystique) est commune (50 à 80 % des femmes de 30 à 50 ans). Elle est associée à une hausse du risque de cancer du sein en cas d’antécédents familiaux de mastose chez une parente du premier degré (mère, fille, sœur).
→ L’hyperplasie mammaire simple est une prolifération bénigne des cellules qui tapissent les canaux ou les lobules du sein. Elle n’augmente pas le risque de cancer du sein.
→ L’écoulement mammelaire : il peut être dû à une mastite (infection bactérienne du sein), un papillome intracanalaire (tumeur bénigne), un fibroadénome, une dilatation (ou ectasie à des canaux galactophores), un trouble endocrinien thyroïdien ou hypophysaire, une tumeur hypophysaire ou cérébrale, un effet indésirable de certains médicaments (antidépresseurs, antihypertenseurs…).
La certitude de lésion bénigne sera apportée :
→ par la mammographie (image ACR 1 ou ACR 2) ;
→ par la surveillance régulière (image ACR 3) ;
→ par l’examen histologique ou cytologique après cytoponction ou biopsie en cas de lésion suspecte (ACR 4).
Sylvie Arnaud, directrice des soins, Institut Curie, Paris
« La très grande majorité des femmes opérées d’un cancer du sein, valides et en bonne santé, sont éligibles à un traitement en ambulatoire qui consiste à enlever une tumeur et/ou à prélever un ganglion sentinelle. Elles sont bien entourées et n’ont pas de comorbidités : diabète, obésité, maladies cardiovasculaires, etc. Rester une nuit à l’hôpital crée de l’angoisse et donne un statut de malade. L’annonce d’une chirurgie en ambulatoire rassure les femmes et les aide à relativiser la maladie. C’est un progrès pour les patientes. Mais la chirurgie ambulatoire, qui concerne près de 75 % des femmes opérées, a ses limites. La principale est l’isolement social : une patiente qui vit seule sans personne à ses côtés la nuit après l’intervention ne peut pas être éligible à la chirurgie ambulatoire. Une situation souvent rencontrée chez les seniors. Une chirurgie classique avec hospitalisation de deux à trois jours peut être alors nécessaire, suivie d’une hospitalisation à domicile. De même, les femmes qui ont une ablation totale d’un sein (mastectomie), soit près de 25 % des femmes ayant une chirurgie mammaire, ne sont pas éligibles à la chirurgie ambulatoire. »
Les soins prépondérants et cotables sont, d’une part, les pansements consécutifs à une opération chirurgicale, au moment du traitement puis de la reconstruction mammaire : pansement chirurgical simple (AMI 2) ou complexe (AMI 4 + MCI) dans des cas de pathologies traitées très tardivement et avec évolution péjorative ; d’autre part, la surveillance des bilans biologiques en cours de chimiothérapie (AMI 1,5 + MAU selon le cas).
Les chimiothérapies instaurées en milieu hospitalier font parfois l’objet d’un suivi et d’un retrait à domicile (exemple : “forfait pour arrêt et retrait du dispositif d’une perfusion, y compris le pansement” notamment, AMI 5). Quant à l’injection sous-cutanée de facteurs de croissance, elle est cotée AMI 1,5.