Cahier de formation
Savoir faire
L’Idel a une proximité avec ses patients qui lui confère un rôle privilégié pour ajouter de la vie aux années et pas seulement des années à la vie. Par des exercices encadrés, elle peut aider à préserver l’autonomie de ses patients et lutter contre l’impact psychologique du vieillissement.
À 57 ans, M. C. est traité depuis quinze ans pour un diabète de type 2 mal équilibré malgré une bonne observance. Une baisse de l’acuité visuelle l’inquiète beaucoup. Jadis amateur de cyclotourisme, il a arrêté toute AP depuis vingt ans en raison d’un surpoids résistant à tous les régimes. Il a le sentiment de se trouver dans une impasse thérapeutique et ne sait plus quoi faire pour prévenir les complications du diabète.
Vous lui expliquez que l’AP peut être une thérapeutiquenon médicamenteuse très utile dans son cas. Vous en voulez pour preuve le cas d’un autre patient qui, dans un contexte similaire, après un stage de réadaptation à l’AP, pratique le vélo d’appartement trente minutes deux fois par jour. Un “traitement” qui, associé à un meilleur équilibre alimentaire, lui a rapidement permis de ressentir un mieux-être, de stabiliser son poids et les complications de son diabète tout en diminuant les doses d’insuline de moitié en quelques mois.
Pour certains patients, une évaluation préalable, même succincte, du niveau d’AP habituelle, voire de l’aptitude à l’AP pour les plus inactifs, est utile. Des questionnaires et des tests, faciles et rapides à réaliser, sont en ligne. C’est le cas du questionnaire réalisé par la Fédération française Sports pour tous et celle d’athlétisme (ci-dessus)
Une autre façon simple et fiable de matérialiser le niveau d’AP intégré au mode de vie et a fortiori de la marche récréative consiste à utiliser un podomètre. « C’est un outil d’évaluation actif très intéressant, commente Danièle Sené, infirmière d’éducation thérapeutique du patient, dans le XVIIIe arrondissement de Paris. Parce qu’il permet aux patients d’objectiver par eux-mêmes leur niveau d’AP, la marge de progrès à couvrir par rapport aux 10 000 pas recommandés (voir le tableau ci-contre) et les progrès réalisés d’un jour sur l’autre. » Pas besoin de long discours?: les chiffres parlent d’eux-mêmes. « Les relevés fournissent une base de réflexion à partir de laquelle je les aide à formuler les objectifs qu’ils se sentent en mesure d’atteindre et à définir les moyens propres à chacun pour y parvenir. »
Pour que cela prenne vraiment sens pour le patient, il est important de lui proposer de noter le nombre de pas réalisés chaque jour. Ainsi, il peut associer son score aux efforts produits et matérialiser ses progrès. « Noter les résultats, poursuit l’infirmière, est stimulant dans tous les cas. S’ils s’améliorent, le patient cherche à progresser encore, et s’ils marquent un repli, il sait qu’il peut mieux faire (c’est écrit noir sur blanc), ce qui l’encourage à se ressaisir. » Et ce qui vaut pour le nombre de pas vaut aussi pour le vélo d’appartement ou d’extérieur, en notant chaque jour la vitesse moyenne et la distance parcourue.
(1) Via le lien raccourci bit.ly/1WtfavE
(2) bit.ly/1Shn2QO
→ Faire prendre conscience de l’intérêt de l’AP
Dans le cadre des consultations d’éducation thérapeutique du patient (ETP) qu’elle anime, Gaëlle Billeaud, infirmière exerçant dans le cadre du dispositif Asalée à Mauzé-Thouarsais (Deux-Sèvres), constate tous les jours que les patients n’ont pas conscience de l’intérêt thérapeutique que peut avoir l’AP pour leur pathologie. « Certains considèrent même leur maladie comme un obstacle à l’AP tandis que d’autres n’osent passe projeter dans cette dynamique parce qu’ils ne s’en sentent pas capables », explique Gaëlle Billeaud. Pourtant, une fois rassurés, les patients se fixent parfois eux-mêmes des objectifs ambitieux, voire se retrouvent en dehors des séances pour marcher ou aller à l’aquagym ensemble. « En outre, confirme Gaëlle Billeaud, on voit s’opérer un vrai processus de changement qui entraîne non seulement une amélioration des paramètres cliniques (pouls, tension, glycémie, stabilisation, voire perte du poids…), mais aussi de tout ce qui relève du mieux-être psychologique, voire de la métamorphose physique, ce quiest extrêmement gratifiant ! »
→ Aider les patients à identifier les obstacles
Au-delà du sentiment d’incapacité physique, les obstacles mis en avant par les patients sont nombreux : âge, idées reçues, gêne corporelle, regard des autres, peur de se faire mal, manque de temps, contraintes financières, difficultés d’accès aux équipements, absence de soutien de l’entourage… « Pour ces patients dont la plupart sont totalement sédentaires, ces freins tiennent au fait qu’ils surestiment souvent l’effort à fournir etles moyens à mettre en œuvre, explique Emmanuelle Mailhé, infirmière d’ETP à Réalmont (Tarn). Il est donc important de les aider à identifier ce qu’ils peuvent déjà changer dans leur vie de tous les jours (aller chercher le pain soi-même, choisir l’escalier plutôt que l’ascenseur, allonger la promenade du chien…). Ensuite, pour les amener progressivement à s’inscrire dans une AP programmée, je leur propose de les accompagner dans la remise en mouvement par la marche, ce qui me permet de faire de l’ETP appliquée à la fois très dynamique et très efficace ! »
→ Jouer sur l’effet d’entraînement
Avec l’aide d’un professeur d’APA (activités physiques adaptées), Emmanuelle Mailhé a mis en place un atelier d’AP d’une heure par semaine auquel participent cinq à six patients. Rassurés et motivés par la présence de l’infirmière, ils s’encouragent les uns les autres et se stimulent mutuellement. « En fait, ils prennent conscience qu’ils sont capables de bouger et des bienfaits que cela leur procure. Ensuite, l’émulation fait le reste car ils persévèrent dans le temps et certains n’en restent pas là. »