L'infirmière Libérale Magazine n° 325 du 01/05/2016

 

Infectiologie

Cahier de formation

LE POINT SUR

Anne-Gaëlle Harlaut  

Très fréquente, la varicelle est majoritairement une maladie infantile bénigne à expression cutanée dont le traitement est symptomatique. Des formes et des complications graves existent néanmoins et requièrent un antiviral injectable et une surveillance accrue. La vaccination est recommandée chez les sujets à risque.

Une maladie très fréquente

→ Majoritairement infantile. La varicelle est la primo-infection généralisée due au virus varicelle-zona ou VZV (Varicella-Zoster Virus, en anglais). Très contagieuse, elle atteint 95 % des personnes au cours de leur vie, plus de 90 % des cas survenant entre 1 et 14 ans avec un pic entre 1 et 4 ans. On estime qu’environ un Français sur cent la contracte chaque année.

→ Transmission essentiellement aérienne. Le virus se transmet le plus souvent par voie respiratoire, la personne infectée excrétant le virus dans ses gouttelettes de salive. La transmission par contact direct avec les lésions de la varicelle est plus rare.

→ Incubation de deux à trois semaines. Après contact infectant, le virus envahit les voies respiratoires, passe dans le sang puis dans l’ensemble des organes, notamment la peau et les muqueuses. C’est sa réplication dans les kératinocytes qui provoque l’éruption cutanée typique, le malade étant contagieux un à trois jours avant.

→ Immunisation à vie. Le virus migre dans les ganglions sensitifs au niveau des nerfs crâniens où il reste à vie à l’état latent. En cas de contact ultérieur avec le virus, les anticorps protègent de toute réinfection. L’état de latence du virus peut néanmoins être rompu des années plus tard, sans doute à l’occasion d’une baisse d’immunité ; le virus “réveillé” migre vers le territoire cutané correspondant au nerf atteint et provoque une lésion localisée : c’est le zona.

Pas toujours bénigne

→ La forme typique bénigne, largement majoritaire, est essentiellement cutanée, le virus étant contraint à la peau et aux muqueuses par le système immunitaire.

Après une sensation de malaise et une fièvre modérée, l’éruption prurigineuse dite “maculo-vésiculaire” apparaît : des taches rouges planes (macules) se transforment en quelques heures en cloques emplies de liquide clair et entourées d’un érythème (vésicules), typiquement au niveau du cuir chevelu puis sur le tronc, les muqueuses buccales et génitales, les bras et les jambes, le visage. Après quelques jours, les vésicules sèchent en lésions croûteuses qui tombent en laissant parfois une petite cicatrice. L’éruption évolue par poussées : macules, vésicules et croûtes peuvent donc co-exister. La guérison est généralement spontanée en dix à quinze jours.

→ Les formes graves apparaissent lorsque le système immunitaire ne contraint pas l’infection. La varicelle est extensive, l’éruption profuse peut alors atteindre divers organes (poumons, foie, système nerveux central…) avec risque d’ulcération, de nécroses, d’hémorragies puis de thrombopénie, d’hépatite, de pneumopathie, d’atteinte rénale grave… Ces formes se rencontrent principalement chez les immunodéprimés, chez les nouveau-nés (varicelle néonatale, d’évolution mortelle dans 30 % des cas) ou chez le fœtus (syndrome de varicelle fœtale, potentiellement mortel ou à risque de séquelles graves).

Diagnostic clinique

Le diagnostic est essentiellement guidé par l’aspect typique de l’éruption. Il peut être confirmé biologiquement (recherche de l’ADN viral ou d’anticorps spécifique dans les liquides biologiques) quand la certitude est impérative (avant de mettre en place un traitement immunodépresseur, en cas d’atteinte grave…).

Risques de complications

La varicelle peut se compliquer de surinfections cutanées à staphylocoques ou à streptocoques dans 1 à 4 % des cas. Plus rares mais plus graves : pneumopathie varicelleuse (complication la plus fréquente chez l’adulte, responsable de 30 % des décès par varicelle), atteinte neurologique type ataxie, méningo-encéphalite, méningite ou syndrome de Reye (encéphalopathie + atteinte hépatique, mortel dans 80 % des cas), hépatite, thrombopénie, péricardite, atteintes oculaires… Ces complication graves concernent en particulier les immunodéprimés et les jeunes enfants. On dénombre environ vingt décès par an en France.

Traitements

→ En cas de varicelle bénigne chez un patient immunocompétent, le traitement est essentiellement symptomatique avec :

• du paracétamol comme antalgique/antipyrétique. Attention ! L’aspirine ne doit pas être utilisée car elle accroît le risque de syndrome de Reye. Les AINS, dont l’ibuprofène, doivent être évités car ils pourraient augmenter le risque de surinfection bactérienne grave ;

• un anti-histaminique par voie orale pour soulager le prurit : alimémazine (Théralène), méquitazine (Primalan), dexchlorphéniramine (Polaramine)… ;

• de la chlorhexidine aqueuse (Diaseptyl, Dosiseptine, etc.) comme antiseptique local en badigeon sur les lésions pour éviter leur surinfection.

→ En cas de surinfections cutanées : traitement antibiotique type amoxicilline + acide clavulanique ou macrolides.

→ En cas de varicelle ou de complications graves et/ou chez les sujets à risque de complications (nourrissons, femme enceinte dix jours avant accouchement, immunodéprimés), on ajoute un traitement antiviral en intraveineuse (aciclovir) avec surveillance à l’hôpital.

Vaccin non systématique

→ Les deux vaccins disponibles (Varivax et Varilrix) confèrent une immunité sur plusieurs années mais non définitive. En France, où l’objectif d’une couverture optimale de “masse” de 90 % n’est pas jugé réalisable, le vaccin n’est pas recommandé systématiquement. Il est indiqué pour prévenir les risques de complications graves en l’absence d’antécédents de varicelle ou lorsque l’histoire est douteuse chez les adolescents de 12 à 18 ans, pour les femmes ayant un projet de grossesse ou après une grossesse, les plus de 12 ans en contact avec un cas de varicelle (dans les trois jours suivants), les personnes en contact étroit avec des personnes immunodéprimées, les enfants candidats receveurs d’une greffe, les professionnels en contact avec la petite enfance, les étudiants en formation de santé.

→ Le schéma vaccinal comprend deux doses en sous-cutanée espacées de quatre à huit semaines (Varivax) ou de six à dix semaines (Varilrix) à partir de douze mois. Ne pas prendre d’aspirine dans les six semaines suivantes en raison du risque de syndrome de Reye.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.

Questions fréquentes

Ma fille a la varicelle, qui doit-on éviter de rencontrer ?

Elle doit éviter le contact avec un nourrisson de moins de 1 an, une femme enceinte qui n’a pas eu la varicelle et tout patient immunodéprimé. En cas de contact fortuit, il faut que ces personnes consultent vite un médecin.

Peut-elle aller à l’école ?

L’éviction des collectivités n’est pas obligatoire mais elle est souhaitable jusqu’au stade de croûte de l’ensemble des boutons.

Que puis-je appliquer sur les boutons ?

Rien en dehors de l’antiseptique : ni talc, ni crème (y compris antivirale), ni gel, en raison du risque de macération et de surinfection. Après la douche ou le bain avec un savon type “syndet”, laisser les lésions sécher à l’air libre ou les tamponner doucement avec un linge propre.

Que faire pour éviter l’infection des « boutons » ?

Les badigeonner chaque jour d’antiseptique, éviter de les gratter ou de les toucher, garder les ongles courts et propres.

Est-ce que je peux attraper un zona à son contact ?

Non, un individu ne peut pas développer un zona au contact de la varicelle.