L'infirmière Libérale Magazine n° 325 du 01/05/2016

 

FISCALITÉ

Votre cabinet

Me Geneviève Beltran*   Véronique Veillon**  

Le système français de collecte de l’impôt sur le revenu repose sur les informations déclarées par le contribuable. Quand l’administration souhaite vérifier la véracité de ces éléments, comment s’y prend-elle ?

Principe

Différents contrôles de l’administration sont possibles. L’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle (ESFP) en est l’un d’eux. Il ne porte en principe que sur l’impôt sur le revenu. Il permet à l’administration de rechercher si les revenus que vous avez déclarés correspondent à ceux dont vous avez réellement disposé. Elle examinera votre situation patrimoniale et notamment les éléments de votre train de vie. L’administration fiscale peut également procéder à la vérification de comptabilité, pour les contribuables tenus d’en établir une. C’est ce type de contrôle que nous allons étudier, en ne retenant que les règles applicables aux bénéfices non commerciaux.

Contrôle sur pièces

L’administration fiscale peut contrôler les déclarations, dans le cadre d’un contrôle dit “sur pièces” réalisé dans ses propres locaux. Elle recoupe alors les informations en sa possession et contrôle leur cohérence avec les éléments déclarés. Elle peut ainsi déceler erreurs et omissions. Il faut savoir, à titre d’exemple, que les abattements, réductions ou crédits d’impôt invoqués par le contribuable font l’objet d’une attention particulière. L’administration n’est pas tenue de vous informer d’un contrôle sur pièces. Souvent, le contribuable n’en prend connaissance que lorsqu’il reçoit une demande de renseignements, d’éclaircissements ou de justification. Un contrôle sur place peut aussi être déclenché.

Courrier et premier rendez-vous

Quand l’administration fiscale décide de contrôler, dans vos locaux, votre comptabilité, elle vous adresse un courrier intitulé “avis de vérification de comptabilité” par lequel elle vous informe que vos déclarations fiscales vont faire l’objet d’une vérification. Ce courrier mentionne notamment la date de venue du vérificateur. Deux jours au minimum doivent séparer la date de réception de l’avis du début du contrôle. En cas d’empêchement, vous avez la possibilité de contacter l’inspecteur afin de modifier ce rendez-vous. Le plus souvent, il ne s’agit que d’une prise de contact pour vous préciser les modalités du déroulement de la vérification.

L’avis de contrôle fiscal doit également préciser les exercices qui seront vérifiés. L’administration fiscale peut vérifier la situation d’un contribuable jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. Par exemple, en 2016, l’administration peut vérifier vos déclarations des années 2015, 2014 et 2013. En principe, vous ne pouvez pas être contrôlée sur une période qui a déjà fait l’objet d’une vérification.

Lors du premier rendez-vous, le vérificateur vous demandera de présenter vos documents comptables.

L’avis de vérification reçu rappelle que toute agression physique ou verbale envers les agents des finances publiques est passible de poursuites judiciaires (article 433-3 et 222-8 du Code pénal). De plus, l’opposition à un contrôle entraîne l’évaluation d’office des bases d’imposition. Donc il est préférable de coopérer.

Garanties du contribuable

Pendant toute la durée du contrôle, vous pouvez vous faire assister par un conseil, un expert-comptable ou un avocat fiscaliste, par exemple, qui pourra même vous représenter.

Dialogue entre contribuable et contrôleur

Le contrôleur poursuivra son travail dans ses propres locaux et pourra vous solliciter pour que vous lui adressiez d’éventuels documents complémentaires. Une fois achevé l’examen de votre comptabilité, il vous enverra soit un avis d’absence de rectification, soit, ce qui est plus fréquent, une proposition de rectification. Précisons qu’au cours de la phase de vérification et avant toute proposition de rectification, vous pouvez demander à régulariser les erreurs, inexactitudes, omissions ou insuffisances relevées par le vérificateur lors de vos échanges avec lui.

Durant cette phase du contrôle, un dialogue entre vous et le contrôleur doit s’instaurer.

La proposition de rectification est motivée de manière à vous permettre de formuler vos observations – ou de faire connaître votre acceptation – dans un délai de 30 jours à compter de sa réception. Elle doit vous préciser si l’inspecteur s’est fondé sur des documents ou renseignements communiqués par des tiers. Vous devez également être informée des conséquences financières – montant des droits et des pénalités – des rectifications proposées. Le délai de réponse de 30 jours peut être prorogé d’un nouveau délai de 30 jours si vous en faites la demande. Si vous n’avez pas répondu dans ce délai, éventuellement prorogé, les rectifications sont considérées comme tacitement acceptées. Si vous avez formulé des observations sur les rectifications, vous serez informée de la position du vérificateur par un document intitulé “réponse aux observations du contribuable” envoyé dans les 60 jours à compter de la réception de vos observations. Le vérificateur est tenu de répondre précisément à vos observations.

Le défaut de notification d’une réponse de l’administration équivaut à une acceptation de vos observations. Mais cette situation se rencontre rarement dans la pratique.

Contestation du contribuable

Si la réponse du vérificateur ne vous convainc pas, vous pourrez saisir dans les 30 jours la commission départementale des impôts. Vous serez avisée, 30 jours à l’avance, de la date de la réunion de la commission et disposerez de 30 jours pour consulter, à son secrétariat, le rapport transmis par l’administration. Vous pourrez également déposer des observations écrites et être entendue lors de la séance avec deux conseils de votre choix. Mais ne vous faites pas beaucoup d’illusions : l’avis rendu est en général favorable à l’administration. Après la mise en recouvrement des impositions supplémentaires, vous avez encore la faculté de contester tout ou partie des résultats du contrôle en adressant une réclamation à l’administration fiscale ; si le différend persiste, vous disposez encore de la possibilité de saisir les tribunaux. Vous pouvez également tenter de demander une remise ou une modération gracieuse qui sera appréciée en fonction de votre situation. En cas de difficulté de trésorerie, vous pouvez solliciter la commission départementale des chefs des services financiers et des représentants des organismes de Sécurité sociale pour un examen des aménagements possibles pour le paiement de vos dettes fiscales et sociales.

Situations à risques

Il n’y a pas de cause particulière pour déclencher un contrôle fiscal. Toutefois, certaines situations peuvent entraîner une vérification.

Tout d’abord, il y a le fait de ne jamais rien déclarer ou bien seulement une année sur deux, voire déclarer des informations manifestement incomplètes ou bien encore déclarer sur sa 2042 un revenu inférieur au bénéfice dégagé sur sa 2035. Les déclarations divergentes peuvent donner lieu à un contrôle. À ce propos, rappelons que les relevés Snir (Système national inter-régime) sont communiqués aux services fiscaux. Le relevé Snir indique le montant des honoraires que vous avez perçus pour l’année civile écoulée et le détail d’activité par régime de protection sociale. L’activité des remplaçantes est incluse dans votre relevé. Ne vous contentez pas de classer ce document, vérifiez-le : si le relevé est supérieur à la réalité, revoyez le détail de vos comptes pour vous assurer qu’il n’y a pas d’erreurs de saisie ou d’omissions dans l’enregistrement des recettes. Si l’écart reste inexpliqué, envoyez une demande de vérification à votre CPAM. Il est possible de demander le détail du relevé Snir. Si, après pointage, vous constatez une erreur de la CPAM, contestez et envoyez une copie à l’administration fiscale sous la forme d’une mention expresse.