Le test de dépistage du cancer colorectal - L'Infirmière Libérale Magazine n° 325 du 01/05/2016 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 325 du 01/05/2016

 

Test immunologique

Cahier de formation

LE POINT SUR

Nathalie Belin*   Dr Jean-Baptiste Bachet**  

Le test immunologique de recherche de sang occulte dans les selles a remplacé en 2015 le test Hémoccult. D’utilisation plus facile, mais aussi plus fiable et plus performant, il devrait accroître la participation au dépistage organisé et permettre une diminution de la mortalité par cancer colorectal au niveau de la population cible.

Qu’est-ce que le cancer colorectal ?

Le cancer colique débute très souvent par une tumeur bénigne, le polype adénomateux, qui met dix à vingt ans pour se transformer en cancer. Le plus souvent asymptomatiques, comme les tumeurs cancéreuses de petite taille, les polypes peuvent toutefois saigner de manière discrète ; la mise en évidence de ce saignement peut permettre le diagnostic de polypes ou d’un cancer à un stade précoce (tumeur de petite taille), le plus souvent curable par exérèse endoscopique ou chirurgicale.

Quelle stratégie de dépistage mettre en place ?

→ La stratégie de dépistage reposant sur la recherche de sang occulte (non décelable à l’œil nu) dans les selles a montré son efficacité pour diminuer la mortalité du cancer colorectal.

→ Le test de dépistage est recommandé tous les deux ans aux adultes de 50 à 74 ans, asymptomatiques et sans risque particulier connu pour ce cancer (absence d’antécédents personnels ou familiaux de polype ou cancer colorectal). Il s’effectue désormais à l’aide d’un test immunologique (OC-Sensor) qui remplace le test au gaïac, Hémoccult.

Quelles différences entre l’ancien et le nouveau test ?

→ Reposant sur la détection de l’activité peroxydasique de l’hème, Hémoccult n’était pas spécifique de l’hémoglobine (Hb) humaine et sa lecture était visuelle. Deux prélèvements sur trois selles consécutives étaient nécessaires.

→ À l’inverse, le test immunologique détecte la globine de l’Hb humaine grâce à des anticorps spécifiques et sa lecture est automatisée. L’alimentation (Hb animale présente dans les viandes) n’interagit pas avec le test. Il est réalisé sur un seul prélèvement de selle.

→ La sensibilité d’OC-Sensor est supérieure à celle d’Hémoccult : il détecte deux fois plus de cancers et deux fois et demi plus d’adénomes avancés (à risque élevé de transformation maligne). Globalement, le taux de positivité est plus élevé que sous Hémoccult (environ 4 % versus 2,5 %). La valeur prédictive positive (probabilité d’avoir une lésion en cas de positivité du test) varie de 33 à 48 % pour le cancer et l’adénome avancé.

→ Le test immunologique devrait générer un nombre de coloscopies deux fois plus important que l’ancien test ; toutefois, celles-ci seront réalisées chez des personnes ayant davantage de risques d’avoir une lésion (meilleure sensibilité du test : plus de vrais positifs).

Comment faire ?

→ Le kit de dépistage, gratuit, est remis par le médecin traitant sur présentation du courrier adressé aux personnes concernées. Il comporte les indications pour la réalisation du test, une fiche d’identification, le papier de recueil des selles, le tube de prélèvement et un sachet de protection du tube, l’enveloppe de retour.

→ Les selles sont directement récupérées sur le papier de recueil préalablement collé sur la lunette des toilettes (elles ne doivent pas entrer en contact avec un liquide comme de l’urine, de l’eau de Javel…). La surface des selles doit être grattée en plusieurs endroits à l’aide de la tige de prélèvement. Celle-ci est ensuite remise dans le tube, qui doit être bien secoué (voir le schéma ci-contre).

Qui est exclu du dépistage organisé ?

→ Les patients ayant eu une coloscopie les cinq années précédentes ;

→ ceux atteints d’une maladie grave rendant le dépistage inopportun ;

→ ceux ayant un risque élevé ou très élevé de cancer colorectal (antécédents familiaux, antécédents personnels d’adénome ou de cancer colique, maladies inflammatoires, maladies génétiques) : une surveillance coloscopique est nécessaire ;

→ ceux ayant une symptomatologie digestive d’apparition récente : une coloscopie est proposée d’emblée.

Que dire aux patients ?

→ Le test immunologique est d’utilisation plus facile que le test Hémoccult.

→ Il ne doit pas être effectué pendant les règles, ni en cas de saignement hémorroïdaire (risque de faux positif).

→ Les résultats sont adressés sous quinze jours, avec copie au médecin traitant. En cas de test négatif, le patient sera invité à le renouveler deux ans plus tard. Un test positif n’est pas synonyme de cancer mais signifie que du sang a été détecté dans les selles : une coloscopie est nécessaire. Si la coloscopie ne révèle rien d’anormal, le patient sera réinclus dans le programme de dépistage organisé après un délai de cinq ans.

→ La prévention primaire du cancer colorectal passe aussi par la modification des habitudes de vie :

• arrêt du tabac et réduction de la consommation d’alcool (l’association alcool/tabac multiplie par 8,6 le risque de cancer colorectal) ;

• limitation de la consommation de viandes rouges et de charcuterie, augmentation des fibres alimentaires (légumes verts, légumes secs, céréales) et des laitages (probable diminution du risque de cancer colique) ;

• augmentation de l’activité physique (diminution du risque de cancer colorectal de 18 à 29 % pour une activité physique modérée à régulière, et atteignant 50 % chez les personnes ayant une activité physique intense) et contrôle du poids.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.