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FICHE PRATIQUE
Très récemment, une infirmière libérale, soupçonnée d’escroquerie par l’Assurance maladie, a été arrêtée et placée en garde à vue. L’occasion pour nous de faire le point sur une procédure souvent méconnue, car rarement prise à l’encontre de professionnels de santé pour de tels faits.
La garde à vue est une mesure de privation de liberté, prise par un officier de police judiciaire, visant à maintenir à la disposition des enquêteurs une personne suspectée d’avoir commis une infraction passible d’une peine de prison. Tel est bien le cas de l’escroquerie, punie jusqu’à cinq ans de prison et 375 000 euros d’amende (article 313.1 du Code pénal).
La suspicion de la commission d’un délit ne suffit pas pour légitimer une mesure de garde à vue. Il faut que cette dernière obéisse à des conditions très spécifiques : elle doit constituer l’unique moyen de poursuivre une enquête impliquant la présence de la personne concernée, de garantir la présentation de la personne devant le procureur afin qu’il décide si des poursuites sont nécessaires (risque de fuite), d’empêcher la modification ou la destruction d’indices, une concertation entre la personne concernée et d’éventuels complices, les pressions sur des témoins ou la victime, ou bien encore de faire cesser l’infraction en cours.
La durée de la garde à vue est de 24 heures. Elle peut être prolongée jusqu’à 48 heures si la peine encourue est d’au moins un an d’emprisonnement (ce qui est le cas de l’escroquerie), après présentation de la personne devant le procureur de la République et sur autorisation écrite et motivée de ce dernier.
L’infirmière gardée à vue doit être immédiatement informée de son placement en garde à vue, de la durée de la mesure, de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise, ainsi que sa date et son lien présumés, du droit d’être examinée par un médecin, du droit à faire prévenir un proche, du droit de se taire lors de ses auditions, du droit de présenter des observations au magistrat qui se prononce sur la prolongation de sa garde à vue, afin qu’il soit mis fin à cette mesure. Elle doit également être informée de son droit à consulter, dans les meilleurs délais et au plus tard avant l’éventuelle prolongation de la garde à vue, le procès verbal constatant son placement en garde à vue et les procès verbaux de ses propres auditions. Un document écrit, aux termes simples et accessibles, énonçant ces droits, doit lui être remis lors de la notification de sa garde à vue. Enfin, elle peut demander l’assistance d’un avocat dès le début de la procédure. Si elle fait ce choix,sa première audition ne pourra débuter sans la présence de ce dernier avant la fin d’un délai de deux heures.
Il pourra alors s’entretenir avec sa cliente pendant trente minutes, consulter ses procès verbaux d’audition et le procès verbal constatant le placement en garde à vue. Puis il pourra assister à tous les interrogatoires, prendre des notes, poser des questions, voire adresser directement ses observations au procureur pendant la durée de la garde à vue.
À l’expiration du délai de garde à vue, l’infirmière sera soit remise en liberté, soit présentée à un magistrat, qui décidera alors des suites à donner aux poursuites.
→ Juriste en droit pénal et droit de la santé
→ Formatrice en secteur libéral et hospitalier www.sokobel.com
Dès le début de sa garde à vue, la personne doit être informée de son droit de se taire. Mais un tel choix ne risque-t-il pas de lui porter préjudice ? N’est-il pas préférable de parler et de répondre immédiatement aux questions posées ? Difficile de donner des conseils en l’espèce d’autant que, comme le soulignent nombre d’avocats, tout dépend des faits qui ont conduit à cette garde à vue. Cependant, il ne faut pas oublier que, lors de la garde à vue, la personne est également informée de la possibilité de se faire assister d’un avocat. Dès lors, pourquoi ne pas décider avec ce dernier, lors de l’entretien confidentiel autorisé par la loi qui ne peut excéder trente minutes, de ce qu’il conviendrait de faire ?