Cahier de formation
Savoir faire
Pansements, perfusions, indemnités de déplacement… Voici quelques-uns des thèmes de la NGAP les plus complexes que nous avons décidé de développer.
Vous intervenez au domicile de Mme V., patiente diabétique insulino-dépendante, pour réaliser une injection sous-cutanée d’insuline ainsi qu’un pansement lourd et complexe. Au moment de coter ces actes, vous hésitez à les facturer à taux plein.
N’hésitez pas : les actes de l’article 5 bis, chapitre II, titre XVI de la NGAP, dont le pansement lourd et complexe pour un patient diabétique insulino-traité, nécessitant des conditions d’asepsie rigoureuse et une détersion avec défibrination (AMI 4) et l’injection sous-cutanée d’insuline (AMI 1) peuvent, par dérogation à l’article 11B, se cumuler. Si, en plus, vous adaptez la dose d’insuline en fonction des indications de la prescription médicale et du résultat du contrôle extemporané (dextro), vous ajoutez un AMI 1. Et vous pouvez ajouter une MCI parce qu’il s’agit d’un pansement lourd et complexe réalisé au domicile du patient.
Les pansements lourds nécessitant des conditions d’asepsie rigoureuses concernent plusieurs types d’actes (titre XVI, chapitre I, article 3) :
→ pansement de brûlure étendue ou de plaie chimique ou thermique étendue, sur une surface supérieure à 5 % de la surface corporelle (pour mesurer cette surface, lire plus loin) ;
→ pansement d’ulcère étendu ou de greffe cutanée, sur une surface supérieure à 60 cm2 (lire plus loin) ;
→ pansement d’amputation nécessitant détersion, épluchage et régularisation ;
→ pansement de fistule digestive ;
→ pansement pour pertes de substances traumatique ou néoplasique, avec lésions profondes, sous-aponévrotiques, musculaires, tendineuses ou osseuses ;
→ pansement chirurgical nécessitant un méchage ou une irrigation ;
→ pansement d’escarre profonde et étendue atteignant les muscles ou les tendons ;
→ pansement chirurgical avec matériel d’ostéosynthèse extériorisé.
Une méthode simple permet d’évaluer la surface corporelle : la règle des neuf de Wallace, qui donne une évaluation en pourcentage de la surface corporelle totale. Pour les brûlures peu étendues, il est possible de se référer à la paume de la main du patient qui équivaut à environ 1 % de sa surface corporelle totale (la paume de la main présente l’avantage de ne pas se tromper, surtout dans le cas des enfants en bas âge). Cette règle attribue des multiples de 9 % de la surface corporelle totale à différentes parties du corps : 9 % pour la tête et le cou, 9 % pour chaque membre supérieur, 18 % pour chaque membre inférieur, 18 % pour chaque face du tronc, 1 % pour le périnée.
Il existe plusieurs méthodes pour définir la surface cutanée de la plaie ou de l’ulcère, indispensable à déterminer puisque la cotation est réalisée à partir de cette surface.
Si la plaie n’atteint pas la surface de 60 cm2, la cotation est AMI 2. Si elle est supérieure à cette surface, il s’agit d’un AMI 4.
Cependant, lors de l’existence de plusieurs ulcères, et ce, quelle que soit la surface de ceux-ci, la cotation se fait par pansement. De ce fait, le premier est compté à 100 %, le deuxième à 50 % et les suivants ne sont pas comptabilisés. De même, les surfaces ne sont pas cumulables.
→ Pour connaître la surface exacte de la plaie, le calcul suivant peut être effectué, à partir des deux plus grands diamètres perpendiculaires (longueur et largeur) : longueur de la plaie x largeur de la plaie x 0,785 = surface exacte de la plaie en cm2.
→ En “dépannage”, pour avoir un aperçu de la surface cutanée nécessitant un pansement, il est possible d’utiliser la carte Vitale.
Sachant qu’elle mesure environ 47 cm2, on peut donc imaginer que la surface de 60 cm2 est légèrement supérieure.
→ Attention, les calques transparents sont sources d’erreurs.
L’avenant 3 à la convention nationale a notamment créé la MCI d’une valeur de 5 euros par passage afin de valoriser la prise en charge à domicile des soins dispensés par des infirmières libérales à des patients nécessitant des pansements lourds et complexes inscrits au titre XVI ou à des patients en soins palliatifs. Cette cotation tient compte du rôle spécifique de l’infirmière en matière de coordination, de continuité des soins et de gestion des risques liés à l’environnement. La MCI ne peut être facturée qu’une seule fois par intervention et elle ne s’applique que pour les soins réalisés au domicile du patient.
La cotation associée à la MCI implique le respect des différents libellés de l’article 3 “Pansements lourds et complexes nécessitant des conditions d’asepsie rigoureuses”. Il faut alors, en plus de la prescription médicale, respecter les notions de surface, de profondeur.
Il n’est donc pas possible d’appliquer la MCI dans les cas suivants :
→ ablation de plus de 14 fils car cela ne fait pas partie de l’article 3 du titre XVI ;
→ pansement d’escarre sacrée en stade d’épidermisation, parce que la plaie est en phase de cicatrisation ;
→ pansement d’ulcère veineux (5 x 10 cm) parce que la plaie a une surface inférieure à 60 cm2.
→ Si un patient est pris en charge dans le cadre de la démarche de soins infirmiers (DSI) et nécessite un pansement qui ne correspond pas à un pansement lourd et complexe, ce pansement sera intégré dans les AIS. Il ne peut pas être facturé en sus.
→ Chez un patient diabétique insulino-traité, le cumul des pansements lourds et complexes est possible par groupe d’actes, ce qui permet de les coter à taux plein.
Que faire en cas d’ordonnance imprécise sur la situation d’une plaie ?
Le premier conseil, donné d’ailleurs par l’Assurance maladie (p.45), est de demander des précisions au médecin, car l’exactitude de la cotation est aussi liée à la précision de l’ordonnance du prescripteur. Pascal Serantoni-Vasseur, Idel, expert judiciaire, suggère quant à lui que, « lorsqu’une ordonnance médicale ne précise pas correctement la situation de la plaie, une annotation de l’infirmière est possible en bas du document ». La rigueur est de mise, souligne-t-il : « Cette annotation doit être inscrite en dessous de la signature du médecin et être précédée de la mention “Note infirmière”. Il ne s’agit en aucun cas de corriger la prescription mais plutôt d’apporter des informations complémentaires à destination de l’administratif de l’Assurance maladie afin de justifier sa cotation : dimensions de la plaie, calcul de surface, description de la plaie, associée à une traçabilité dans le dossier de soins infirmiers avec la possibilité d’y joindre également une photographie de la plaie. » Mais attention, ce conseil ne manque pas de surprendre d’autres spécialistes de la cotation ou du droit que nous avons interrogées, l’une d’elles pointant les risques qui pourraient être liés à un ajout sur l’ordonnance même, comme une éventuelle poursuite pour faux. Et de prôner la prudence, en délivrant plutôt son message à l’Assurance maladie sur une note séparée et jointe à l’ordonnance du médecin. En tout cas, il peut être utile, pour justifier sa cotation, de noter et de conserver ses calculs, par exemple par une photo ou en notant le nombre d’agrafes à retirer (AMI 4 possible pour l’ablation de plus de dix agrafes).
« Sur la base d’une séance habituelle pour un pansement d’une demi-heure, un supplément forfaitaire AMI 4 peut être accordé par demi-heure supplémentaire au-delà de la première demi-heure avec un maximum de trois fois une demi-heure. » Cette cotation spécifique a été instaurée, pour les caisses concernées, spécialement après les attentats du 13 novembre 2015 en région parisienne, pour les pansements lourds et complexes dans des conditions d’asepsie rigoureuse. Au passage, dans cette définition que nous a pourtant confirmée l’Assurance maladie au niveau national, apparaît une notion de temps étonnante puisque, soulignons-le, aucun acte en AMI dans la NGAP n’est assimilé à une notion de temps, les pansements dépendant d’une question de surface. Cette cotation, en tout cas, s’applique à des « situations inhabituelles qui nécessitent plus de soins », précise l’Assurance maladie.