L'infirmière Libérale Magazine n° 329 du 01/10/2016

 

PROFESSION

Actualité

Caroline Bouhala  

PRISE EN CHARGE > Ne pas se focaliser sur le seul pansement. C’est l’idée développée pour les plaies des personnes âgées lors de la 8e édition des Journées armoricaines plaies et cicatrisation (JAPC) à Rennes.

Dans la prise en charge, particulièrement complexe (lire l’encadré) des plaies chez les personnes âgées, l’idée principale ressortant des échanges mi-septembre aux JAPC est de ne pas se concentrer juste sur le pansement. Il faut considérer le patient dans son ensemble et prendre en charge tous les facteurs pouvant s’opposer à la cicatrisation : alimentation, incontinence, pathologies circulatoires, hygiène…

« Coincés dans leur lit »

Deux situations ont été prises pour exemples : l’incontinence et la démence. Concernant l’incontinence, le Dr?Nathalie Faucher, gériatre à l’hôpital Bichat (AP-HP), explique : « Quelle soit urinaire ou fécale, l’incontinence va fragiliser la peau et entraîner une macération. Une dermite associée à l’incontinence va apparaître, qui pourra s’infecter, notamment avec la flore fécale. » Amélie Chopin et Lomig le Bihan, IDE au Pôle Saint-Hélier de Rennes (Ille-et-Vilaine), ont partagé certaines astuces qu’ils utilisent au quotidien dans leur service. Tout d’abord, l’étiologie de l’incontinence est recherchée (iatrogénie, obstacle, etc.) afin d’évaluer si un traitement spécifique peut être mis en place (rééducation sphinctérienne, médicaments, sondage…). En parallèle, de nombreuses actions sont menées afin de minimiser le risque de fuites comme le fait d’amener régulièrement les patients aux toilettes ou au moins de leur proposer un urinal ou un bassin. Car, comme l’explique Amélie Chopin, « des patients vont se souiller, non pas parce qu’ils sont incontinents, mais parce qu’ils sont coincés dans leur lit et n’ont pas la possibilité d’accéder aux toilettes ». Les infirmiers ont aussi recours aux protecteurs cutanés lorsque la peau d’un patient commence à se fragiliser, mais Lomig le Bihan met en garde : « Attention à la pâte à l’eau car cela masque ce qui est en dessous et c’est très difficile à enlever, donc vraiment délétère au retrait. » En cas de constipation, des règles hygiéno-diététiques sont mises en place dans un premier temps ; en cas d’échec, un traitement médicamenteux est envisagé.

« Comme les scouts »

Autre situation présentée, les cas de démence chez les personnes âgées. « Le patient dément subit une double peine : les plaies de l’âge et les plaies de la démence », résume le Dr Emmanuelle Candas, gériatre à l’hôpital Sainte-Périne (AP-HP). Face à un patient dément qui perd sa capacité à se protéger, le soignant compense ce manque en renforçant sa propre vigilance et en anticipant les situations à risque. Il pourra par exemple le protéger des brûlures (car les troubles cognitifs peuvent altérer le rétrocontrôle sur la sensation de chaleur) en installant des cache-radiateurs ou en préréglant le thermostat des douches à la bonne température, mettre en place des matelas en bas du lit pour prévenir les chutes ainsi que des protecteurs de ridelles, etc. Si le patient dément présente une plaie, le soignant doit également trouver des stratégies pour que le patient accepte de se faire soigner. « En cas de plaies et de démence, raconte le Dr Candas, c’est comme les scouts : on fait de son mieux ! Il s’agit de répondre à la demande de la façon la plus adaptée possible. Chacun à sa hauteur. »

EN SAVOIR +

→ Plaies du grand âge

La physiologie plus fragile des personnes âgées (système immunitaire moins efficace, peau plus fragile…), les difficultés motrices (avec un risque d’immobilité pouvant conduire à des escarres et des problèmes d’hygiène, d’incontinence…) et les nombreuses comorbidités associées (diabète, démence, pathologies à l’origine d’hypoxie…) rendent le risque de plaies plus fréquent et la cicatrisation plus difficile.