Cahier de formation
Savoir faire
Si l’observance du traitement et l’accompagnement du patient sont essentiels, il ne faut pas oublier que l’hépatite B est une maladie que l’on peut prévenir grâce à la vaccination.
Vous vous rendez chez M. V., 30 ans, pour réaliser une injection d’HBPM à la suite d’une fracture de la cheville. Il est sous Viread depuis deux mois en raison de la progression de son hépatite B. Vous en profitez pour lui demander si la prise du médicament ne lui pose pas de problèmes particuliers. Votre question lui rappelle qu’il a oublié de le prendre aujourd’hui.
Vous rappelez à Vincent qu’une mauvaise observance expose à un échec et à des résistances du virus, ce qui risque de compliquer sa prise en charge. Vous insistez sur le fait que les effets indésirables sont rares. Vous lui proposez de télécharger une application d’aide à l’observance.
L’observance du médicament est essentielle pour éviter le risque d’échappement thérapeutique.
→ Sous interféron alpha, la durée du traitement est limitée (généralement un an) et les injections hebdomadaires facilitent l’observance mais les effets indésirables peuvent décourager le patient.
→ Les analogues nucléos(t)idiques permettent d’obtenir une charge virale indétectable dans plus de 95 % des cas, mais l’arrêt du traitement expose à une rechute tant que l’Ag HBs reste présent dans le sérum. D’où la nécessité d’une prise sur une durée indéfinie. La prise quotidienne du traitement peut donc poser des problèmes d’observance (oubli…). Or la dose d’antivirale doit être la plus régulière et la plus constante possible pour le maintien de l’inhibition de la réplication virale et pour prévenir la survenue de résistance.
→ Des astuces permettent de limiter le risque d’oubli : faire coïncider le moment de prise avec un geste quotidien (petit-déjeuner, brossage des dents, prise de la pilule chez les femmes…) ; recourir à un semainier pour les analogues ; utiliser une alarme (sonnerie de portable…) ou une application d’aide à l’observance (Medi’Rappel, Medissimo, Medisafe, Mon Pilulier…), notamment pour le rappel des injections hebdomadaires. Recommander au patient d’avoir toujours une boîte de médicament d’avance.
→ Interféron alpha : sous réserve de lui avoir montré comment les réaliser, le patient peut lui-même effectuer les injections sous-cutanées : sortir le stylo ou la seringue du réfrigérateur vingt minutes avant, se laver les mains et désinfecter la zone d’injection (abdomen, cuisse) à l’alcool ; recommander de changer à chaque fois le site d’injection ; piquer à 45° avec la seringue ou perpendiculairement au site d’injection avec le stylo. Après l’injection, ne pas masser (pour éviter de faire ressortir le produit) mais appliquer un pansement si besoin. Jeter le matériel de l’injection dans un collecteur de déchet adapté à cet effet et disponible gratuitement en pharmacie. Si l’injection est faite par un membre de l’entourage, lui rappeler les règles de base pour éviter tout risque d’accident d’exposition au sang, même s’il est vacciné contre l’hépatite B (d’autres maladies sont transmissibles par le sang) : port de gants et ne pas recapuchonner seringues ni stylos.
→ Analogues : la prise du ténofovir doit systématiquement se faire au cours d’un repas ou en tout cas doit être associée à la prise de nourriture, pour une meilleure biodisponibilité du médicament.
→ S’assurer d’avoir suffisamment de prises ou doses de son traitement.
→ En cas de voyage à l’étranger, faire traduire l’ordonnance en anglais pour éviter tout contre-temps, notamment à l’aéroport.
→ Prévoir un sac isotherme pour le transport de l’interféron qui doit être gardé sur soi (jamais dans les soutes en raison du risque de détérioration du produit).
→ Syndrome pseudo-grippal et fatigue : très fréquents, ces effets indésirables sont surtout présents et gênants les 12 à 24 premières heures suivant l’injection. Sachant cela, le patient peut essayer d’optimiser le moment de l’injection en fonction de ses contraintes familiales, professionnelles… Une injection le soir quand on travaille en journée peut ainsi être préférable. Pour prévenir ou limiter les symptômes, recommander la prise systématique d’un gramme de paracétamol au moment de l’injection puis quatre heures après ; dans tous les cas, ne pas dépasser 3 grammes par jour pour limiter l’hépatotoxicité de la molécule. Recommander de boire beaucoup pour limiter tout risque de déshydratation liée à la fièvre.
→ Fièvre persistante : elle impose une consultation médicale pour éliminer une complication infectieuse favorisée par une neutropénie. Lorsque les globules blancs commencent à chuter, recommander d’éviter les endroits surpeuplés et confinés pour limiter le risque infectieux.
→ Survenue d’hématomes importants ou inhabituels : ils évoquent une thrombopénie et nécessitent là aussi un avis médical en vue de réaliser une NFS.
→ Troubles de l’humeur : irritabilité, comportement agressif, accès de colère, changements d’humeur, déprime, voire idées suicidaires… Sensibiliser l’entourage à leur survenue et les signaler rapidement au médecin pour une prise en charge adaptée.
→ Contraception efficace : les patientes traitées par peginterféron alpha doivent utiliser une contraception efficace durant le traitement et jusqu’à quatre mois après. Les femmes partenaires de patients masculins traités doivent poursuivre une contraception efficace sept mois après l’arrêt du traitement.
→ Les effets indésirables sont rares. Des nausées et des douleurs abdominales sont possibles mais tendent généralement à s’estomper. Recommander de faire plusieurs petits repas par jour sans se forcer. Privilégier des aliments plutôt froids (blancs de volaille, fromage, biscuits…) ou tièdes.
→ Sous telbivudine (peu utilisé en France), des myalgies ou une faiblesse musculaire persistantes et inexpliquées nécessitent la réalisation d’examens pour contrôler la fonction musculaire (risque rare de myopathie ou rhabdomyolyse).
→ Sous adéfovir ou ténofovir : une surveillance de la fonction rénale est indispensable et, au long cours, de la densité minérale osseuse pour le ténofovir. Il est préférable d’éviter la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, notamment à fortes doses, qui majorent la néphrotoxicité de ces molécules.
Dans tous les cas, mieux vaut déconseiller toute automédication car de nombreux médicaments ou plantes ont un métabolisme hépatique et peuvent “fatiguer” le foie, y compris le paracétamol.
Il est capital de bien respecter les rendez-vous de contrôle.
→ L’efficacité et la tolérance du traitement sont évaluées de façon mensuelle sous interféron, de façon trimestrielle sous analogues.
→ Même en l’absence de traitement, il est important de respecter les consultations de suivi qui surveillent l’évolution de la maladie, en général deux fois par an. L’absence de symptômes ne signifie pas que l’évolution est favorable et la présence de symptômes (fatigue, nausées, douleurs abdominales…) n’est pas reliée à la sévérité de la maladie ou à une évolution défavorable. Une progression de l’atteinte hépatique peut se produire sans symptômes apparents.
Sylvie Ehrhart, infirmière de recherche clinique et d’éducation thérapeutique au service hépato-gastro-entérologie du CHRU de Nancy (Meurthe-et-Moselle)
« L’observance est un vrai problème dans l’hépatite B chronique dans la tranche d’âge des 20/30 ans. La plupart des patients sont asymptomatiques et n’ont aucun effet indésirable sous analogues : rien ne leur rappelle qu’ils doivent penser à leur traitement ! Pour les sensibiliser à l’observance, il ne faut pas hésiter à les “secouer” un peu : expliquer que, en cas d’oubli du médicament, le virus peut muter ou résister et surtout qu’ils mettent en danger leurs proches non vaccinés en redevenant contaminants (par augmentation de la charge virale). Je n’hésite pas à leur faire un peu peur en expliquant que le virus de l’hépatite B reste actif sept jours sur un support inerte. Donc une goutte de sang mal nettoyée, c’est exposer des personnes à une contamination ! »