L'infirmière Libérale Magazine n° 330 du 01/11/2016

 

Cahier de formation

Savoir

Le virus de l’hépatite B se transmet par voie sexuelle, par le sang, de la mère à l’enfant (lors de l’accouchement essentiellement) et par contacts intrafamiliaux. La gravité de l’infection est liée au risque de passage à la chronicité. Les traitements actuels permettent de contrôler la maladie. Surveillance et dépistage des porteurs chroniques sont essentiels.

POUR COMPRENDRE

Virus de l’hépatite B

→ L’homme est le seul réservoir du virus de l’hépatite B (VHB), cinquante à cent fois plus contagieux que le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Ainsi, le risque de contamination par le VHB lors d’un accident d’exposition au sang d’une personne infectée est d’environ 30 %. Par comparaison, il est de 0,3 % environ pour le VIH.

→ Le VHB est un virus enveloppé à ADN dont il existe huit génotypes principaux (A à H). Le génome du VHB est constitué de quatre phases qui codent respectivement pour les protéines de surface, la protéine de capside et la protéine HBe, l’ADN polymérase virale et la protéine X.

→ L’antigène HBs (Ag HBs), l’antigène de surface du VHB (voir schéma ci-contre), est le premier marqueur sérologique qui apparaît dans le sérum au cours de l’infection virale aiguë B. La présence des anticorps anti-HBs (Ac anti-HBs) signe la résolution de l’infection et est associée à l’apparition des Ac anti-HBc.

→ La protéine de capside ou core n’est pas détectable dans le sérum, mais le système immunitaire est capable de synthétiser des Ac anti-HBc. Contrairement aux Ac anti-HBs, ces derniers ne sont pas protecteurs.

→ L’antigène HBe (Ag HBe) est un marqueur indirect de la multiplication virale. Son rôle dans la physiopathologie de l’infection n’est pas clairement établi.

→ La protéine X joue un rôle dans la réplication virale et semble aussi intervenir dans le processus d’oncogenèse de la cellule infectée.

Tropisme hépatique

Après contamination, le virus se réplique principalement dans les hépatocytes. Le VHB est un virus non cytolytique. En effet, c’est la réponse immunitaire du patient, en réponse à l’infection en cours (aiguë ou chronique), qui contrôle ou parfois induit une nécro-inflammation chronique à l’origine des lésions hépatiques. Ainsi, à la suite des réponses immunes, une lyse des hépatocytes peut avoir lieu, dont la conséquence est une libération massive des transaminases (en particulier de l’alanine aminotransférase, Alat), dont le taux augmente à plus de dix fois la limite supérieure de la normale (valeurs normales : 10 à 40 UI/l).

Hépatite aiguë

→ Les réponses immunitaires de l’hôte aboutissent le plus souvent à l’élimination du VHB et des hépatocytes infectés. Chez l’adulte, dans 95 % des cas, l’hépatite aiguë évolue vers la résolution et le patient conservera une immunité protectrice (excepté les sujets immunodéprimés chez qui persistent toujours un risque de réactivation de la maladie).

→ Parfois, la réaction immunitaire est suraiguë (1 % des formes symptomatiques), aboutissant à une hépatite fulminante avec nécrose hépatocytaire massive.

Hépatite chronique

→ L’hépatite chronique se définit par la persistance de l’Ag HBs pendant plus de six mois, associée ou non à des anomalies cliniques et/ou biologiques.

→ L’âge au moment de l’infection est un facteur important du passage à la chronicité. Le risque de chronicité ne dépasse pas 5 % chez l’adulte immunocompétent ; il peut atteindre 90 % des cas chez le nourrisson né de mère infectée ; il est de 30 à 40 % des cas chez les sujets immunodéprimés.

→ L’infection chronique évolue selon différentes phases (lire ci-après) : phase non inflammatoire (anciennement appelée “phase d’immunotolérance”), phase inflammatoire (anciennement phase de clairance immune), portage inactif et réactivation. Environ un tiers des individus sont des porteurs inactifs. Mais un risque de réactivation du virus est toujours possible, notamment en cas de défenses immunitaires affaiblies (chimiothérapie…).

Transmission de l’infection

Le virus est présent dans la plupart des liquides biologiques : sang, sperme, sécrétions vaginales et dans la salive à des concentrations très faibles. La maladie est très contagieuse lors de l’infection aiguë. Tous les porteurs chroniques sont susceptibles de transmettre l’infection, à partir du moment où l’ADN du VHB est détectable. Il existe quatre modes principaux de transmission du VHB :

→ les relations sexuelles non protégées. Le VHB fait partie des infections sexuellement transmissibles ;

→ la voie parentérale par le biais d’objets contaminés avec du sang infecté : piqûres avec du matériel contaminé ; chez les usagers de drogues, échanges de seringues et de matériel d’injection intraveineuse ou de sniff (paille à “sniffer”…) ; effractions cutanées en l’absence de règles strictes d’hygiène (tatouage, acupuncture…) ;

→ la transmission de la mère à l’enfant, essentiellement au moment de l’accouchement si la mère est porteuse chronique du VHB (risque d’autant plus important que l’ADN du VHB est détectable) ;

→ les contacts intrafamiliaux, le plus souvent lors du partage d’objets tels que rasoirs, brosses à dents, coupe-ongles, ciseaux…

En France, la transmission de la maladie se fait essentiellement par voie sexuelle ; elle est également fréquente chez les usagers de drogues.

Facteurs de risque

Parmi les facteurs significativement associés au VHB, on retrouve l’usage de drogues par voie intraveineuse, les comportements sexuels à risque, un pays de naissance à forte endémicité (Afrique subsaharienne, Asie) ou moyenne endémicité (Europe de l’Est et du Sud, Afrique du Nord, Moyen-Orient, Amérique du Sud), la précarité.

SIGNES CLINIQUES

Hépatite B aiguë

La durée d’incubation varie d’un à quatre mois (75 jours environ). L’infection est généralement asymptomatique, surtout chez l’enfant, et symptomatique dans 30 à 50 % des cas chez l’adulte. Elle se manifeste alors par :

→ une phase pré-ictérique de trois à sept jours avec nausées, anorexie, parfois fièvre, arthralgies, urticaire ;

→ une phase ictérique qui dure deux à trois semaines, caractérisée par un ictère (coloration jaune de la peau et des muqueuses à la suite de l’accumulation de bilirubine qui n’est plus captée par le foie) cutané et conjonctival, et parfois une décoloration des selles et une coloration foncée des urines.

L’hépatite aiguë B symptomatique est une infection à déclaration obligatoire en France.

Hépatite B chronique

Elle est généralement asymptomatique. On distingue plusieurs phases d’infection chronique qui ne sont pas forcément successives (voir schéma ci-contre).

→ Phase non inflammatoire (tolérance immune ou immunotolérance) : fréquente chez l’adulte jeune, avec forte réplication virale, mais sans symptôme ni lésion hépatique car la réponse immune de l’organisme est faible. En raison d’une forte virémie, les patients sont très contagieux, notamment pour leur entourage.

→ Phase inflammatoire (clairance immune ou rupture de tolérance) : le système immunitaire s’active et est à l’origine d’une lyse des hépatocytes infectés. Cette phase de plusieurs mois ou années est marquée par une réplication virale associée à une élévation des transaminases et à l’apparition de lésions hépatiques. On distingue les hépatites B chroniques actives à virus sauvage ou à mutant pré-core (pré-C ; mais cette notion a de moins en moins d’importance, en particulier pour la prise en charge thérapeutique).

→ Phase de portage inactif : marquée par la diminution voire l’arrêt de la réplication virale avec normalisation des transaminases et disparition du processus inflammatoire hépatique. Le portage inactif est le profil le plus fréquent en France (70 % des cas). Chez certains patients, un traitement est nécessaire pour atteindre ce stade. La “guérison fonctionnelle” peut alors parfois survenir ou l’infection peut passer en phase de réactivation.

→ Phase de réactivation : caractérisée par des épisodes de réactivation virale, spontanés ou favorisés par un état d’immunosuppression, asymptomatiques le plus souvent ou qui peuvent se présenter sous la forme d’une hépatite aiguë, avec ou sans ictère.

ÉVOLUTION

Hépatite aiguë

Plus de 90 % des adultes infectés en bonne santé résolvent spontanément leur infection. Dans moins de 1 % des cas, une hépatite B aiguë symptomatique peut se compliquer par une hépatite fulminante ; mortelle dans 80 % des cas en l’absence de transplantation hépatique, celle-ci correspond à une nécrose massive du foie et se manifeste par une encéphalopathie hépatique (trouble cérébral observé en cas d’insuffisance hépatique sévère, associant troubles moteurs, troubles du comportement et de la conscience) avec astérixis (mouvements de flexion et d’extension des poignets ressemblant à des battements d’ailes de papillon), aboutissant au coma et à un syndrome hémorragique.

Hépatite chronique

La gravité et l’évolution de l’hépatite B chronique dépendent du stade de la maladie au moment de sa découverte, de l’importance de la réplication virale et de la réaction immunitaire de l’organisme vis-à-vis du virus.

Chez certains patients, la maladie est peu active, voire inactive, mais il faut garder en mémoire qu’une réactivation est toujours possible. Chez d’autres patients, la destruction des cellules hépatiques infectées peut entraîner la formation d’un tissu cicatriciel hépatique : c’est la fibrose hépatique, dont le stade le plus sévère est la cirrhose.

→ La cirrhose est caractérisée par une inflammation chronique qui entraîne la destruction des cellules hépatiques et leur régénération anarchique, sous forme de nodules. Elle concerne 20 % des patients après vingt ans d’évolution de la maladie. Une fois installée, elle est irréversible et évolue, même en l’absence de réplication virale.

→ L’hépatocarcinome (cancer du foie ou carcinome hépatocellulaire, CHC) se développe selon un processus multifactoriel lié aux effets oncogènes directs du VHB et à la cirrhose elle-même. L’incidence annuelle des hépatocarcinomes est de 2 % chez les patients atteints d’une hépatite B chronique ayant une cirrhose.

DIAGNOSTIC

Les analyses sanguines recherchent en particulier certains marqueurs spécifiques du VHB, sérologiques (Ag HBs, Ag HBe, Ac anti-HBc totaux et IgM, pour immunoglobulines M, anti-HBe et anti-HBs) et moléculaires (ADN du VHB…).

Hépatite aiguë

Les signes cliniques conduisent à la réalisation des examens biologiques qui affirment le diagnostic :

→ les transaminases sont augmentées de dix à trente fois la normale ;

→ l’Ag HBs est présent. Il est détectable avant l’apparition des signes cliniques ;

→ les Ac anti-HBc, de type IgM au début de la symptomatologie, signent une infection récente ; de type IgG ensuite (ils persistent après la guérison) ;

→ les Ac anti-HBs apparaissent en dernier ; ils signent la rémission.

Hépatite chronique

Le plus souvent, la maladie est découverte de façon fortuite à l’occasion d’un bilan médical. Si l’Ag HBs est présent en l’absence des Ac anti-HBs, il convient de contrôler la positivité de l’Ag HBs six mois après sa découverte. De plus, des examens supplémentaires sont à réaliser :

→ détection et quantification de l’ADN viral, témoin de la réplication virale. Les résultats doivent être exprimés en unités internationales par millilitre (UI/ml) ;

→ détermination de l’activité sérique des transaminases (Alat) ;

→ évaluation de la sévérité de la maladie hépatique (stade de fibrose) à l’aide d’une méthode non invasive (élasticité du parenchyme hépatique, ou marqueurs sériques) ou invasive (ponction biopsie hépatique) ;

→ autres examens : bilan hépatique complet, hémogramme, taux de prothrombine ; sérologies hépatites A, C et VIH systématiques ; recherche d’une surinfection ou d’une co-infection par le virus de l’hépatite D (ou delta ; virus ne possédant pas d’enveloppe et utilisant celle du virus de l’hépatite B), qui aggrave le pronostic de l’hépatite B ; dépistage du CHC si cirrhose notamment (échographie).

La recherche de l’Ag HBe et des Ac anti-HBe (pour déterminer si le patient est infecté par un virus B sauvage ou un virus B mutant pré-core) n’est plus jugé utile à une éventuelle prise en charge thérapeutique. De plus, en France, près de 90 % des sujets sont Ag HBe négatifs (virus B mutant pré-core).

Il est également important de dépister l’entourage (les parents au premier degré, ainsi que les partenaires sexuels) : recherche systématique de trois marqueurs (Ag HBs, Ac anti-HBc et anti-HBs). Si la sérologie VHB est négative, une vaccination devra être proposée.

SUIVI

Au cours d’une hépatite B aiguë

Un contrôle de l’Ag HBs est réalisé. S’il reste positif au-delà de trois mois, les autres marqueurs, dont l’ADN viral, sont dosés pour dépister le risque de passage à la chronicité.

Au cours d’une hépatite B chronique

• Pour le patient non traité

Le patient peut passer d’une phase d’infection chronique à l’autre, d’où la nécessité d’une surveillance régulière clinique, biologique et éventuellement échographique, tout au long de la vie.

→ Patient en phase non inflammatoire ayant moins de 30 ans et sans antécédents familiaux de cirrhose ou de CHC : dosage de l’Alat et de l’ADN du VHB tous les trois à six mois, ainsi qu’un dépistage du CHC par échographie.

→ Hépatite B chronique avec une activité et une fibrose minimes mais avec un niveau de réplication virale supérieur à 2 000 UI/ml : dosages réguliers des transaminases (tous les trois mois), de l’ADN viral (tous les six à douze mois). Après un suivi de trois ans, les contrôles pourront être éventuellement espacés.

→ Porteurs inactifs de l’Ag HBs : outre un risque de réactivation spontanée de la maladie, il persiste un risque faible de développement d’une cirrhose ou d’un CHC. Un dosage des transaminases et de l’ADN viral est recommandé tous les six mois.

→ L’échographie hépatique dépiste le CHC. Elle est recommandée tous les six mois chez les patients atteints de cirrhose ou chez les porteurs chroniques d’origine africaine ayant plus de 20 ans ou d’origine asiatique ayant plus de 40 ans et chez les patients ayant un antécédent familial de CHC.

• Pour le patient traité

Dans tous les cas, des dosages réguliers des transaminases et de la charge virale (au moins tous les trois mois) sont réalisés.

PRÉVENTION

La prévention de l’hépatite B passe par le dépistage des personnes à risque et la vaccination, ainsi que sur l’information sur les modes de transmission de la maladie (lire partie Savoir faire p.41).

Dépistage de l’hépatite B

→ Dépistage obligatoire : au sixième mois de grossesse. Il repose sur la recherche de l’Ag HBs.

→ Dépistage recommandé (Ag HBs, Ac anti-HBc, Ac anti-HBs), en particulier chez les personnes exposées au risque de contact avec le virus (lire ci-dessous).

Vaccination

• Obligatoire

Pour les professionnels de santé exposés au risque de contamination (sang, liquide biologique) et exerçant dans des établissements ou organismes de soins ou de prévention ainsi que pour les élèves ou étudiants se préparant à certaines professions de santé.

• Recommandée

→ Chez les nourrissons et en rattrapage chez les enfants et adolescents jusqu’à l’âge de 15 ans révolus.

→ Chez les personnes à risque élevé d’exposition au virus : nouveau-nés de mères porteuses de l’Ag HBs, personnes ayant des relations sexuelles avec des partenaires multiples, entourage proche d’une personne infectée par le VHB (y compris porteur inactif), personnes infectées par le VIH ou le VHC, migrants originaires de zones d’endémie, voyageurs en zone d’endémie, usagers de drogues par voie parentérale, personnes en institution psychiatrique et carcérale, patients susceptibles de recevoir des transfusions et/ou des médicaments dérivés du sang ou candidats à une greffe d’organe, de tissu ou de cellules, et toute personne susceptible d’être en contact avec des patients ou d’être exposée au sang et autres produits biologiques (professionnels de santé libéraux, secouristes, gardiens de prison, éboueurs, égoutiers, policiers…).

→ En pratique : aucune injection de rappel n’est recommandée, sous réserve du suivi du schéma vaccinal recommandé (voir le tableau des recommandations ci-contre). Néanmoins, chez les patients immunodéprimés exposés au risque d’infection par le VHB et les insuffisants rénaux chroniques dialysés, il est recommandé une sérologie annuelle avec rappel dès que le taux d’anticorps descend en dessous du seuil protecteur de 10 UI/l, et ce, quel que soit l’âge.

• Prévention de la transmission materno-fœtale

Elle repose sur l’injection d’immunoglobulines anti-HBs au nouveau-né et sa vaccination dès la naissance.

TRAITEMENT

→ Au cours de l’hépatite B aiguë, les indications d’un traitement antiviral par analogues nucléosidiques ou nucléotidiques (nucléos(t)idiques) sont rares et ne concernent que des patients ayant une hépatite fulminante ou sévère. Le traitement est symptomatique : repos, hydratation suffisante, suppression de l’alcool…

→ Le traitement de l’hépatite B chronique a pour but, idéalement, la perte de l’Ag HBs et la séroconversion HBs (apparition des Ac anti-HBs), mais celle-ci est rarement obtenue avec les traitements actuellement disponibles.

→ Dans tous les cas, l’objectif est d’améliorer la survie et la qualité de vie des patients en prévenant la progression de la maladie vers une complication (cirrhose, CHC). Pour ce faire, une viro-supression prolongée doit être obtenue, définie par l’absence de détection de l’ADN du VHB. Cette “réponse virologique” est associée à la normalisation des transaminases (réponse biochimique) et à une amélioration histologique (ralentissement de la progression de la fibrose).

Stratégie thérapeutique

Toute hépatite B chronique ne justifie pas un traitement médicamenteux. Le traitement de l’infection par le VHB est envisagé en cas de charge virale supérieure ou égale à 2 000 UI/ml, de taux d’Alat supérieur à la normale, et en cas de lésions d’activité et de fibrose significatives (score Metavir, utilisé pour quantifier l’atteinte tissulaire du foie, supérieur ou égal à 2).

Deux stratégies sont discutées.

• Traitement de durée limitée de douze mois avec l’interféron alpha pégylé

Chez les patients séropositifs pour l’Ag HBe (virus sauvage), il permet d’obtenir une séroconversion HBe dans 30 % des cas environ. L’interféron alpha pégylé (fixation d’une molécule de polyéthylène glycol sur l’interféron, d’où une plus longue demi-vie) a remplacé l’interféron standard en raison d’une meilleure efficacité et d’une administration plus simple (hebdomadaire au lieu de trois fois par semaine).

• Analogue nucléos(t)idique sur une durée prolongée, voire à vie

Mieux toléré que l’interféron, il a une efficacité antivirale supérieure. Ce type de traitement est indiqué chez les patients atteints de cirrhose quel que soit leur statut HBe. L’entécavir et le ténofovir sont indiqués en première intention car ils possèdent une action antivirale puissante et une barrière génétique à la résistance élevée (faible risque d’apparition de virus résistants). Les autres analogues sont associés à un risque plus important de résistance lié à des mutations du virus.

• Cas particuliers

→ Co-infection par le VHD : seul l’interféron alpha a démontré une certaine efficacité sur le VHD.

→ Patients cirrhotiques : ils nécessitent la mise en place d’un traitement par analogues quel que soit le type d’hépatite chronique et l’importance de la charge virale. L’interféron est contre-indiqué en cas de cirrhose décompensée.

→ Grossesse : la lamivudine, le ténofovir et la telbivudine peuvent être utilisés. Administrés au troisième trimestre, ils diminuent le risque de transmission mère-enfant à l’accouchement en cas de charge virale forte et augmentent l’efficacité de la sérovaccination chez le nouveau-né.

• Réponses au traitement

Les critères de réponse au traitement (négativation de l’ADN viral, normalisation des transaminases, diminution du taux d’Ag HBs…) sont contrôlés régulièrement (tous les trois à six mois, voire plus fréquemment).

• Transplantation hépatique

Elle s’adresse aux patients ayant une cirrhose hépatique décompensée.

L’interféron alfa

→ Produit : peginterféron alpha-2a (Pegasys). L’interféron alpha-2a (Roferon-A) et l’interféron alpha-2b (Introna) ne sont plus utilisés.

→ Effets indésirables : il s’agit essentiellement d’un syndrome pseudo-grippal, d’une fatigue et de réactions au point d’injection. Parfois, nausées, perte de poids, sécheresse de la peau, rashs cutanés, chute de cheveux. Des troubles hématologiques (neutropénie, thrombopénie), thyroïdiens, psychiatriques (irritabilité, syndrome dépressif), cardiaques (palpitations…) et oculaires (vision floue…) sont possibles ainsi que des dyslipidémies, des pneumopathies interstitielles, des perturbations de la glycémie chez le patient diabétique.

→ Contre-indications principales : grossesse, affection cardiaque sévère, insuffisance rénale ou hépatique sévère, épilepsie, état psychiatrique sévère préexistant, antécédents de maladie auto-immune, troubles thyroïdiens préexistants.

→ Surveillance : de manière mensuelle, NFS et bilan hépatique. Une surveillance régulière de la thyroïde et une surveillance ophtalmologique sont effectuées durant le traitement.

→ Conservation : au réfrigérateur entre + 2 et + 8 °C.

Les analogues nucléos(t)idiques

→ Analogues nucléosidiques : entécavir, lamivudine ; telbivudine (a une AMM mais non utilisée en France) ; analogues nucléotidiques : adéfovir, ténofovir.

Les analogues nucléosidiques nécessitent trois phosphorylations pour être actifs alors que les analogues nucléotidiques en nécessitent deux.

→ Effets indésirables : rarement, troubles digestifs (nausées, douleurs abdominales), céphalées, acidose lactique (très rare, effet de classe). Selon les molécules, des cas de myalgies et de myopathies ont été rapportés sous telbivudine ainsi que des neuropathies périphériques ; l’adéfovir et le ténofovir exposent à un risque d’insuffisance rénale ; le ténofovir à des baisses de densité minérale osseuse.

→ Pas de contre-indications particulières.

→ Surveillance : évaluation régulière de la fonction rénale avant et pendant le traitement. Ajustement de la posologie chez l’insuffisant rénal.

Chiffres & repères

→ En France

– Prévalence de l’hépatite B chronique : 0,65 % chez les 18-80 ans, soit environ 280 000 personnes, dont plus de la moitié ignorent leur statut.

– Les hommes sont 5 fois plus touchés que les femmes.

– Environ 2 500 nouveaux cas d’hépatite B aiguë par an. Transmission sexuelle principalement.

– 1300 décès environ par an imputables à une pathologie liée au VHB.

– Complications hépatiques graves (cirrhose ou cancer du foie) pour 15 à 25 % des patients avec une hépatite chronique B.

→ Dans le monde

350 millions de porteurs chroniques de l’antigène HBs (Ag HBs), signant la présence d’une hépatite chronique B active ou non.

Expertise

Il est important d’identifer les porteurs inactifs

Dr Stéphane Chevaliez, Centre national de référence des hépatites B, C et delta de l’hôpital Henri-Mondor, Créteil (Val-de-Marne)

« Plusieurs consultations sont souvent nécessaires pour pouvoir documenter la “phase” de l’hépatite B chronique et identifier les porteurs inactifs. Ces derniers ne nécessitent pas de traitement, mais il est important de les identifier afin de les surveiller. »

Expertise

Une réactivation de la maladie est possible

Dr Stéphane Chevaliez, Centre national de référence des hépatites B, C et delta de l’hôpital Henri-Mondor, Créteil (Val-de-Marne)

« Il faut garder en mémoire que l’on ne guérit jamais sur le plan virologique d’une hépatite B chronique, même après apparition des anticorps anti-HBs. Une réactivation de la maladie est toujours possible, en particulier lors d’un traitement immunosuppresseur. Les patients doivent toujours signaler à leur médecin qu’ils ont été atteints d’une hépatite B, même après apparition des anticorps anti-HBs. »

Conduite à tenir chez les professionnels de santé

• Titre en Ac anti-HBs > 100 UI/l

La personne est considérée comme immunisée,même en l’absence de documentation d’une vaccination antérieure.

• 10 < Titre en Ac anti-HBs < 100 UI/l

– Si vaccination documentée, la personne est considérée comme immunisée.

– Si vaccination non documentée ou incomplète, le schéma vaccinal est complété.

• Titre en Ac anti-HBs < 10 UI/l

– Si la vaccination est non documentée, le schéma vaccinal est complété et le dosage des Ac anti-HBs 1 à 2 mois après doit être supérieur ou égal à 10 UI/l.

– Si vaccination complète documentée, une injection additionnelle du vaccin est effectuée et les Ac anti-HBs sont dosés 1 à 2 mois après : la personne est considérée comme immunisée si le taux d’Ac anti-HBs est alors supérieur ou égal à 10 UI/l. Si besoin, administrer des doses vaccinales additionnelles sans dépasser 6 doses au total. Si le taux d’Ac anti-HBs reste inférieur à 10 UI/l 4 à 8 semaines après la dernière injection, la personne est “non répondeuse” à la vaccination et non immunisée contre l’hépatite B. Un suivi au moins annuel des marqueurs sériques du VHB est recommandé.

D’après le “Calendrier des vaccinations et recommandations vaccinales 2016”, ministère des Affaires sociales et de la Santé, via le lien raccourci bit.ly/1MVAClf, et “Prise en charge des personnes infectées par les virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C”, Rapport de recommandations 2014, sous la direction du Pr Dhumeaux et sous l’égide de l’ANRS (Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales) et de l’Afef (Association française pour l’étude du foie), via bit.ly/2dOKci2.

INFO +

→ Chez tout patient Ag HBs positif devant recevoir une chimiothérapie anticancéreuse ou un immunosuppresseur, un traitement par analogues (entécavir ou ténofovir généralement) doit être envisagé jusqu’à douze mois après l’arrêt de la chimiothérapie ou de l’immunosuppresseur, pour prévenir une réactivation du VHB.

Je cote à la nomenclature

→ La cotation des injections sous-cutanées de peginterféron alpha est : AMI 1 + MAU (majoration d’acte unique) + IFD (à domicile) + IK (selon le contexte géographique).

→ Si l’injection concerne un patient immunodéprimé ou cancéreux à domicile : AMI 1,5 + MAU + IFD.