L'infirmière Libérale Magazine n° 331 du 01/12/2016

 

Pression artérielle

Cahier de formation

Le point sur

Maïtena Teknetzian  

Selon l’étude Flahs 2015* du Comité français de lutte contre l’hypertension artérielle (CFLHTA), 44 % des hypertendus traités possèdent un autotensiomètre. En effet, l’automesure contribue à améliorer le contrôle de l’HTA.

Quel intérêt ?

→ En complément de la mesure au cabinet médical, l’automesure tensionnelle permet de s’assurer de la permanence de l’HTA et d’éviter les erreurs de diagnostic. Elle permet de dépister un effet “blouse blanche” (patients normotendus à domicile et hypertendus au cabinet médical, du fait du stress provoqué par la consultation) et, inversement, de révéler une hypertension artérielle masquée (pression artérielle contrôlée au cabinet médical, mais supérieure à la normale à domicile). Elle reflète mieux le risque cardiovasculaire global que la tension mesurée au cabinet médical.

→ Elle a également un intérêt en termes d’éducation thérapeutique, puisque le patient devient acteur du suivi de son traitement, ce qui contribue à en améliorer l’observance.

→ En revanche, cette pratique ne convient pas aux patients trop stressés ou anxieux. Et elle n’est pas recommandée en cas d’arythmie (mauvaise fiabilité des mesures).

Avec quel appareil ?

→ Une liste des appareils homologués est disponible sur le site de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), mais cette liste n’est plus mise à jour depuis 2012, puisque le contrôle systématique des appareils par l’ANSM est remplacé par une démarche volontaire de communication des appareils conformes aux normes NF1060 par les fabricants eux-mêmes.

→ Selon l’étude Flahs 2015, 59 % des possesseurs d’appareil ont un appareil huméral, et 41 % un appareil radial.

Les appareils huméraux (au bras)

→ Avantages : ils ont la préférence des médecins car ils donnent des résultats considérés comme plus fiables que ceux, dépendant de la position de la main, donnés par les appareils au poignet ; et ils présentent un intérêt lorsque l’artère radiale est mal perçue.

→ Inconvénients : leur mise en place est parfois difficile pour une personne seule. Le brassard doit être adapté à la circonférence du bras (à vérifier soigneusement chez les patients obèses).

Les appareils radiaux (au poignet)

→ Avantage : ils sont moins encombrants et plus faciles à utiliser.

→ Inconvénient : ils sont moins fiables.

Quand mesurer sa tension ?

→ En général, les automesures s’effectuent lorsque le diagnostic d’HTA a été posé pour confirmer ce dernier avant d’initier un traitement médicamenteux, dans les trois jours précédant une consultation médicale ou après une modification du traitement. Il est inutile de contrôler sa tension tous les jours.

→ Il est conseillé d’effectuer les mesures selon la règle des trois :

trois mesures successives (attendre une à deux minutes entre chaque) le matin, avant le petit-déjeuner et la prise des médicaments,

trois mesures le soir entre le dîner et le coucher,

sur trois jours consécutifs.

Sur quel bras ?

→ Au début, lorsque le patient apprend à manipuler l’appareil, il convient de prendre les mesures sur les deux bras pour s’assurer qu’il n’y ait pas de différence significative entre les deux.

→ S’il n’y a pas de différence, il est préférable de prendre la mesure au bras gauche si le patient est droitier (et inversement), pour pouvoir noter la valeur à la fin de la mesure.

→ S’il y a une différence, prendre la mesure sur le bras qui indique la valeur la plus élevée.

Comment mesurer sa tension ?

→ Retirer les vêtements aux manches trop serrées et les bijoux ou la montre, qui peuvent gêner la mise en place du brassard.

→ Installer l’appareil sur une table. S’asseoir et se reposer cinq minutes environ. Ne pas fumer, boire du café, ni faire du sport dans l’heure précédent la mesure.

→ Enfiler le brassard huméral sur un bras dénudé, “tuyau” vers le bas, à deux doigts du pli du coude. Le brassard radial sera positionné à deux doigts du poignet, le cadran sur la face interne du poignet (et non comme une montre).

→ Prendre la mesure à la hauteur du cœur : poser le bras sur la table, le coude fléchi avec un appareil huméral ; dans le cas d’un appareil radial, ramener l’avant-bras sur la poitrine, main sur l’épaule du côté opposé. Au poignet, la mesure peut aussi être réalisée “bras croisés”, avec la main portant le brassard radial posé sur le coude de l’autre bras. Si la mesure est prise en dessous du niveau du cœur, les valeurs sont majorées, alors que si elle est prise au-dessus, les résultats seront au contraire minorés.

→ Actionner l’appareil. Ne pas serrer le poing pendant le gonflage ou dégonflage de l’appareil. Ne pas bouger ni parler pendant la mesure.

Comment gérer les résultats ?

Les consigner

→ Les mesures doivent être reportées sur un relevé, téléchargeable et imprimable sur le site du CFLHTA (www.comitehta.org).

→ Si une mesure sur les trois est très différente des autres, elle doit être prise en compte et notée par le patient.

→ Apporter le relevé au médecin lors des consultations. C’est la moyenne des dix-huit valeurs obtenues par la règle des trois qui sera prise en compte. Elle doit être inférieure à 135-85 mm de Hg (contre 140-90 au cabinet médical). Selon l’étude Flahs 2015, 55 % des hypertendus sont contrôlés en automesure au seuil de 135/85 (moyenne des dix-huit mesures sur trois jours).

Les interpréter

→ La pression artérielle varie dans la journée (plus haute le jour que la nuit) et selon les saisons (plus élevée par temps froid).

→ Certains événements ou circonstances émotionnelles peuvent l’augmenter transitoirement : colère, stress, effort physique, douleur… La pression artérielle est également plus élevée après les repas, la consommation d’alcool ou de tabac.

→ Les valeurs données en automesure sont généralement plus basses que celles réalisées chez le médecin. Cette différence n’est pas due à un mauvais fonctionnement de l’appareil mais s’explique par le fait que la tension est prise au repos, dans un environnement calme.

→ En cas de baisse tensionnelle accompagnée de sensation de vertige ou de malaise lors des changements de position, suspecter une hypotension orthostatique et orienter le patient vers son médecin (en vue d’une éventuelle adaptation du traitement anti-HTA ou d’une prescription de bas de compression de classe II). En revanche, le patient ne doit pas modifier de lui-même son traitement. Certains conseils, comme se lever en deux temps, laisser les jambes décroisées en position assise (pour favoriser le retour veineux) et veiller à un apport hydrique suffisant, peuvent être utiles pour prévenir l’hypotension orthostatique.

→ En cas d’élévation tensionnelle avérée (appareil correctement utilisé et hausse confirmée sur plusieurs mesures), un avis médical est nécessaire. En cas de signes de poussée tensionnelle (céphalées, phosphènes…), une consultation rapide s’impose.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.

* Lire l’étude Flahs (pour French League Against Hypertension Survey) 2015 via le lien raccourci bit.ly/2f8aSbz