Le Code de déontologiedes infirmiers qui vient d’être publié au Journal officiel (décret 2016-1605 du 25 novembre 2016) remplace les règles professionnelles de 1993 dans le Code de la santé publique. Examinons de plus près les dispositions concernant l’exercice libéral.
Le chapitre du Code de la santé publique (CSP) qui était consacré aux règles professionnelles (R. 4312 et suivants) est abrogé et remplacé. Ces règles, qui n’avaient pas été modifiées depuis leur création en 1993, faisaient office de code de déontologie. Un nouveau chapitre intitulé “Déontologie des infirmiers” est créé. Il comprend près de cent articles répartis en cinq sections : les devoirs généraux, les devoirs envers les patients, les devoirs entre confrères et membres des autres professions de santé, les modalités d’exercice de la profession, avec les règles communes à tous les modes, puis spécifiques au mode salarié et spécifiques au mode libéral. Passons en revue les dispositions qui se rapportent à l’activité libérale. Nombre d’entre elles existaient déjà.
L’interdiction de publicité est rappelée à l’article R. 4312-76. L’article R. 4312-69 prévoit que « les seules indications que l’infirmier est autorisé à diffuser par voie d’annuaire ou de tout autre support accessible au public, notamment sur un site Internet, sont ses nom, prénoms, adresse professionnelle, numéros de téléphone, de télécopie, adresse électronique professionnels, titre de formation lui permettant d’exercer sa profession, et horaires de permanence, à l’exclusion des coordonnées personnelles ». Toute insertion payante dans un annuaire est considérée comme une publicité et, à ce titre, interdite. Toutefois, si toute insertion de ces informations est payante, elle pourra être autorisée par le conseil départemental de l’Ordre.
L’infirmier est autorisé à mentionner ces mêmes seules indications sur ses documents professionnels et feuilles d’ordonnance. Il pourra toutefois rajouter les noms des confrères avec lesquels il est associé, la mention d’une adhésion à une association agréée ainsi que… « ses distinctions honorifiques reconnues par la République française » (article R. 4312-56).
L’infirmier ne peut signaler son cabinet que sur des plaques professionnelles, à son lieu d’exercice, l’une apposée à l’entrée de l’immeuble, l’autre à la porte du cabinet. En fonction de la disposition des lieux, une signalisation complémentaire est permise. La grandeur des plaques est la même que celle qui étaient prévues par le décret de 1993 : 25 par 30 cm. Les informations (nom, prénom, numéro de téléphone, etc.) doivent être présentées « avec discrétion ». Attention : « la signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale » est prohibée (article R. 4312-76).
Sont également réglementées les annonces dans la presse : deux annonces « sans caractère publicitaire », lors de l’installation ou de la modification du lieu d’exercice. Elles doivent être communiquées un mois au préalable au conseil départemental de l’Ordre, qui pourra présenter ses remarques, mais rien n’indique qu’un accord sur leur contenu devra être obtenu.
L’autorisation préalable pour l’ouverture d’un cabinet secondaire, afin de répondre aux besoins de la population, prévue par les règles professionnelles, est maintenue par le Code de déontologie. Elle devait être adressée à l’Agence régionale de santé. Le conseil départemental de l’Ordre dans le ressort duquel est envisagé le lieu d’exercice distinct en sera maintenant le destinataire. Le conseil départemental auprès de qui l’infirmier est inscrit devra aussi être informé si l’ouverture du cabinet secondaire est envisagé dans un autre département. Le silence gardé par le conseil départemental sollicité vaudra autorisation implicite à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la date de réception de la demande ou de la réponse au supplément d’information demandé.
Il est rappelé que toute association ou société à objet professionnel doit faire l’objet d’un contrat écrit. Tous les contrats et avenants, les statuts d’association ou de société, ayant un objet professionnel, entre infirmiers ou entre infirmiers et autres professionnels de santé devront être communiqués au conseil départemental. L’Ordre vérifiera que le contrat est « compatible avec les lois en vigueur, avec le Code de déontologie et notamment avec l’indépendance des infirmiers ». Les projets pourront lui être soumis au préalable (article R. 4312-73). S’agissant des contrats déjà signés à la date d’entrée en vigueur du décret, ils devront être rendus conformes aux dispositions du Code de déontologie dans les deux ans suivant sa publication.
Un infirmier ne doit pas s’installer dans un immeuble où exerce un autre infirmier sans l’accord de ce dernier ou, à défaut, sans l’autorisation du conseil départemental de l’Ordre, dont le silence gardé pendant deux mois vaudra autorisation tacite (article R. 4312-68). La mention « ou à proximité immédiate du cabinet d’un autre infirmier » prévue dans le projet de Code a été retirée.
L’article R. 4312-89 du CSP restreint pendant deux ans la possibilité pour un infirmier qui a fait le remplacement d’un confrère pendant une période supérieure à trois mois, consécutifs ou non, d’exercer là où il pourrait entrer en concurrence avec ce dernier.
Ces dispositions prévoient toutefois entre les intéressés un accord les libérant de cette interdiction et, si l’accord ne peut être obtenu, l’affaire doit être soumise au conseil départemental de l’Ordre, qui apprécie l’opportunité de la demande et décide de l’installation.
Le projet de Code avait limité à un seul le nombre de collaborateurs. L’article final (R. 4312-88) prévoit que l’infirmier peut s’attacher le concours d’un ou plusieurs confrères collaborateurs libéraux (une des rares recommandations
L’article R. 4312-91 du CSP maintient l’interdiction de salarier non seulement un confrère mais également un étudiant infirmier, une aide-soignante, une auxiliaire de puériculture ou une aide médico-psychologique.
Deux mots sur l’interdiction d’utiliser un pseudonyme « quel que soit le moyen de communication utilisé » prévue à l’article R. 4312-50 et qui a été beaucoup commentée sur les réseaux sociaux. Il est bien évident que cette interdiction est limitée au cadre de l’activité professionnelle de l’infirmier et ne s’étend pas à sa sphère privée, extérieure au travail.
Tout infirmier, lors de son inscription au tableau, devra affirmer devant le conseil départemental de l’Ordre qu’il a eu connaissance du Code de déontologie et devra s’engager sous serment et par écrit à le respecter (article R. 4312-2). Ceux déjà inscrits à la date de publication du décret ont six mois pour déclarer sur l’honneur au conseil départemental dont ils relèvent qu’ils ont pris connaissance du Code et qu’ils s’engagent à le respecter.
* Avis n° 16-A-11 du 11 mai 2016. Cf. notre numéro 326 de juin 2016.