Être attentif à la santé de ses patients, c’est le fondement du métier. Parfois, cette attention va encore plus loin : François
« Je suis infirmier depuis plus de dix ans et je visite plusieurs fois par jour des personnes âgées. Début novembre, je vais voir l’une de mes patientes, une dame âgée, handicapée et souffrant de diabète. Elle vit seule et a conservé de l’autonomie, mais sa santé requiert tout de même des soins quotidiens. Lorsque j’arrive à son domicile, je trouve porte close. Avec certains patients, cela arrive, nous avons les clés du domicile pour pouvoir y accéder en cas de souci. Lorsque j’entre chez elle, je me rends compte qu’elle n’est pas seule et elle me présente ses “visiteurs” – deux policiers – qui font une enquête de voisinage. Ils me montrent leur carte qui semble réelle et ils sont habillés en civil, comme les policiers de la BAC, talkie-walkie et brassard comme attributs reconnaissables, aucune arme à la ceinture. Ils prétendent qu’ils viennent d’interpeller dans un jardin du quartier un cambrioleur et veulent vérifier si dans le voisinage – et donc chez ma patiente – ce soi-disant voleur n’a pas sévi. Je trouve cela étrange, d’autant que je n’ai pas remarqué de véhicule de police identifié ou banalisé dans la rue. Ils m’invitent à monter à l’étage pour voir si rien n’a été dérobé chez la patiente. J’obtempère tout en tiquant un peu : ils n’ont pas besoin de témoin pour constater les faits… À l’étage, tout est sens dessus dessous. Le scenario semble tout à fait crédible, mais j’ai de gros doutes, et je cherche un moyen de protéger ma patiente. Je profite du moment des soins pour tenter de lui parler à l’écart et lui expliquer la situation ainsi que mes doutes. La vieille dame étant un peu sourde, je dois parler un peu plus fort, mais je ne veux pas non plus alerter les faux policiers. Je prétexte d’avoir oublié des pansements dans la voiture pour m’éclipser. Une fois à l’extérieur, je m’approche de mon véhicule, je fouille dans mon coffre tout en appelant discrètement le commissariat pour savoir si oui ou non une interpellation a eu lieu et si une équipe est en intervention à l’adresse de ma patiente. Mes doutes se confirment : ce sont de faux policiers. Ceux-ci trouvent le moyen de s’enfuir avant que les vrais, prévenus par mon coup de fil, ne débarquent. Cela prouve tout de même qu’ils ont été extrêmement habiles et qu’ils n’hésitent pas à profiter de la faiblesse des gens pour commettre leurs méfaits. »
* Le prénom a été modifié.
Major Fabienne Boulard, Police nationale, spécialisée dans la prévention auprès des seniors
« Cet infirmier a eu de bons réflexes en appelant la police. Voici quelques points permettant de démasquer les usurpateurs. La carte professionnelle de police est désormais au format carte de crédit en recto/verso – les faux agents présentent parfois une carte d’un format différent ou sans verso. Les policiers peuvent être en civil mais portent toujours une arme, sauf lorsqu’il s’agit de la police scientifique. Autre point, ils ne demanderont jamais à entrer pour vérifier si quelque chose a été volé : ce n’est donc pas une infraction à la loi de laisser des policiers à la porte ! Mieux vaut prendre le temps d’appeler le 17 pour être mis en relation avec le commissariat. Et si un vol a été commis, ne rien toucher avant l’arrivée des policiers. Enfin, ne pas stigmatiser la personne qui se serait fait berner, cela peut arriver à tout le monde ! »