L’infection par le virus de l’hépatite C (VHC) évolue vers la chronicité dans environ 80 % des cas. Depuis 2014, les nouveaux antiviraux disponibles à l’hôpital permettent de guérir la plus grande partie des patients.
L’hépatite chronique C est l’une des principales causes de cirrhose, de carcinome hépatocellulaire et de transplantation hépatique. Son évolution, souvent silencieuse, explique que le dépistage soit réalisé tardivement par rapport au moment de la contamination. À ce jour en France, environ 75 000 personnes seraient infectées par le VHC mais non dépistées
→ La durée d’incubation est variable, entre sept et huit semaines, parfois davantage. L’infection est souvent asymptomatique. Dans 20% des cas environ, elle est à l’origine de symptômes peu spécifiques (asthénie, syndrome pseudo-grippal, arthralgies, nausées, ictère…). Dans moins de 1% des cas, elle entraîne une hépatite fulminante (somnolence, troubles de la conscience qui doivent alerter).
→ 10 à 20 % des personnes infectées éliminent spontanément le virus et guérissent.
→ Une hépatite chronique se définit par la persistance de la virémie (ARN viral) au-delà de six mois. L’évolution est associée, à des degrés divers, à des lésions inflammatoires et à une nécrose du foie. Les symptômes sont souvent absents ou peu évocateurs (asthénie, myalgies, arthralgies, prurit…). Toutefois, une relation claire est démontrée entre l’hépatite C et la présence d’une cryoglobulinémie mixte de type II (voir l’encadré de la page de droite). Celle-ci est caractérisée par la triade clinique purpura cutané-arthralgies-asthénie. Des manifestations neurologiques (polyneuropathie périphérique) ou rénales (glomérulonéphrite) sont parfois observées.
→ L’hépatite C se transmet principalement par voie sanguine. La toxicomanie intraveineuse ou nasale représente le mode de contamination le plus fréquent. Avant 1992, les principales sources de contamination étaient les transfusions sanguines.
→ Une transmission par le biais d’objets contaminés à la suite d’une effraction cutanée est possible (tatouage, piercing…).
→ La transmission mère-enfant est rare, tout comme la transmission sexuelle. Cette dernière est toutefois accrue lors de lésions cutanées ou muqueuses : rapport traumatique (pratiques à risque), rapport pendant les règles chez une femme porteuse du virus.
Il est le plus souvent posé à l’occasion d’un bilan biologique de routine qui révèle une hépatite chronique C.
→ Le dépistage est basé sur la recherche des anticorps (Ac) anti-VHC. On estime que, trois mois après une prise de risque, l’absence d’Ac anti-VHC permet d’éliminer une infection par le VHC. En présence d’Ac anti-VHC, la recherche de l’ARN viral permet de vérifier la présence du virus dans le sang. Outre sa quantification, la détermination du génotype du VHC est alors indispensable car celui-ci peut jouer un rôle sur l’évolution de la maladie et la réponse au traitement. Si l’ARN viral est indétectable en présence d’Ac anti-VHC, il s’agit d’une infection guérie.
→ Le test rapide d’orientation diagnostique (réalisé dans des structures de soins spécifiques) offre un résultat rapide en quinze minutes (détection des Ac anti-VHC sur sang capillaire). En cas de positivité, une sérologie du VHC sur sang veineux doit être réalisée.
→ L’interrogatoire fait le bilan des conduites addictives, évalue la consommation d’alcool et les comorbidités (diabète, surpoids ou obésité, HTA…), recherche la prise de médicaments éventuellement hépatotoxiques.
→ Le bilan biologique comporte notamment un dosage de l’alfa-fœtoprotéine (pouvant témoigner d’une évolution vers un carcinome hépatocellulaire) et peut montrer une élévation modérée et fluctuante des transaminases.
→ L’évaluation du degré de fibrose est essentielle pour déterminer la sévérité de l’atteinte hépatique. Les méthodes non invasives (élastométrie, voir l’encadré ci-dessus, et tests sanguins) sont recommandées. Le score Metavir rend compte de l’importance des lésions (F0, pas de fibrose ; F1, fibrose minime ; F2, fibrose modérée ; F3, fibrose extensive ; F4, cirrhose) et de l’activité nécrotico-inflammatoire (A0, absence d’activité ; A1, activité minime ; A2, activité modérée ; A3, activité sévère).
→ En cas de cirrhose, l’échographie abdominale est recommandée deux fois par an pour dépister un carcinome hépatocellulaire.
→ Les manifestations extra-hépatiques (fatigue, retentissement physico-psychique…) peuvent être au premier plan. Outre une cryoglobulinémie mixte, d’autres manifestations extra-hépatiques semblent associées à l’infection chronique par le VHC : syndrome sec buccal et/ou oculaire, atteintes cardiovasculaires (HTA…), dysthyroïdie, risque accru de diabète non insulino-dépendant, risque d’apparition d’un lymphome en cas de cryoblogulinémie concomitante.
→ Plusieurs facteurs favorisent la progression de la fibrose : l’âge au moment de l’infection (plus de 40 ans), le sexe masculin, la consommation d’alcool, les co-infections virales VHB, VIH, le syndrome métabolique (surpoids ou obésité, diabète, HTA, dyslipidémie). Le risque de cirrhose concerne 15 à 30 % des patients après vingt ans d’évolution de la maladie. La cirrhose expose notamment à un risque important d’hépatocarcinome (1 à 3 % des patients cirrhotiques chaque année).
Le virus de l’hépatite C (VHC) présente une grande variabilité génétique et un fort potentiel de mutation spontanée. On distingue six génotypes majeurs, numérotés de 1 à 6. Combinés entre eux (voire à la ribavirine), les antiviraux actuels du VHC, disponibles à l’hôpital, permettent de guérir plus de 95% des patients.
→ Le traitement est notamment remboursé pour les patients ayant une hépatite modérée à sévère (score de fibrose Métavir F2 ou F3) ou une cirrhose (sauf en cas d’espérance de vie limitée) et, pour certains patients, indépendamment du stade de fibrose : co-infection VIH ou VHB, infection par le génotype 3, facteurs de risque d’aggravation de la maladie (alcool, syndrome métabolique), manifestations extra-hépatiques ou fatigue invalidante. En raison du risque de transmission de l’infection, le traitement est aussi indiqué chez les usagers de drogues, les homosexuels masculins et les femmes ayant un désir de grossesse.
→ L’indication d’un traitement doit prochainement être élargie à l’ensemble des patients.
→ Plusieurs antiviraux sont disponibles (Sovaldi, Exviera, Daklinza, Olysio, Harvoni, Viekirax, Zepatier). Les combinaisons de traitement sont choisies en fonction de nombreux critères, dont le génotype du virus en cause et le statut naïf ou déjà traité du patient. Le sofosbuvir (Sovaldi et dans Harvoni en association au lédipasvir) est actuellement considéré comme le nouveau traitement de référence de l’hépatite C chronique.
→ La durée du traitement va de huit à vingt-quatre semaines. Ces antiviraux sont globalement bien tolérés. Les effets indésirables les plus fréquents sont bénins et souvent modérés : fatigue, maux de tête, nausées, insomnie.
→ La ribavirine (Copegus, Rebetol, Ribavox) est de moins en moins employée, le peginterféron alfa (Pegasys) quasiment plus du tout.
La charge virale est mesurée avant le traitement puis, sauf cas particuliers (échecs de traitement précédents…), seulement douze semaines après l’arrêt. L’absence d’ARN viral détectable signe alors une réponse virologique soutenue. Une nouvelle recherche de l’ARN viral 48 semaines après l’arrêt détecte une rechute tardive. Si l’ARN viral est alors indétectable, l’éradication est considérée comme définitive.
→ Une observance rigoureuse est essentielle pour garantir l’efficacité du traitement et éviter l’émergence de virus résistants. L’administration des nouveaux antiviraux est quotidienne, biquotidienne pour Exviera.
→ Toute automédication est à déconseiller, d’une manière générale chez tout patient atteint d’une hépatite C et a fortiori chez les patients sous traitement car le risque d’interaction est important : pas d’association au millepertuis par exemple ; la prise de pamplemousse et d’orange sanguine est déconseillée (inhibiteurs enzymatiques pouvant augmenter la toxicité des antiviraux). Le recours au paracétamol par exemple doit rester ponctuel sans dépasser 3 g par jour. Prudence également avec les plantes dont les propriétés hépatotoxiques et les risques d’interaction avec les antiviraux actuels sont mal connus. Le Chardon-Marie, hépatoprotecteur et fréquemment utilisé par les patients atteints d’hépatopathie, n’est pas recommandé en association au siméprévir (Olysio).
Certains facteurs aggravent l’atteinte hépatique : tabac, cannabis, alcool, surpoids, obésité. Il faut d’autant plus sensibiliser le patient à leur correction ou suppression que la contamination est ancienne et le foie déjà endommagé. Il faut aussi encourager la prise en charge et le bon équilibre d’un diabète, d’une HTA ou d’une dyslipidémie, qui sont des facteurs d’aggravation de la fibrose.
→ La vaccination contre les infections invasives à pneumocoque et la vaccination antigrippale sont recommandées (toute hépatopathie chronique fragilise l’organisme), de même que la vaccination contre l’hépatite B et, en cas de voyage dans un pays à risque, contre l’hépatite A.
Le risque de contamination de l’entourage est très faible. Aucune précaution n’est à prendre pour les objets usuels (couverts…). Il ne faut pas en revanche partager les objets susceptibles d’être contaminés par du sang (brosse à dents, coupe-ongles, rasoirs, épilateurs…) et, pour les toxicomanes, le matériel d’injection ou de prise nasale (cuillère, cupule, pailles pour les produits à sniffer…). Le patient doit penser à recouvrir toute lésion ou plaie qui saigne par un pansement.
→ La transmission sexuelle est rare mais possible en présence de sang : l’utilisation du préservatif est recommandé en cas de rapports sexuels pendant les règles (chez une femme infectée) ou de rapports sexuels entre hommes.
→ Sensibiliser au dépistage : entourage, usagers de drogues injectables ou nasales (y compris occasionnels), personnes ayant pratiqué tatouage, piercing, patients ayant une infection par le VIH ou une hépatiteB. Après guérison, une ré-infection, notamment par un autre génotype, est possible. L’évoquer en particulier pour les toxicomanes.
* “Prise en charge thérapeutique et suivi de l’ensemble des personnes infectées par le virus de l’hépatiteC”, rapport de recommandations 2016, sous la direction du Pr Daniel Dhumeaux et sous l’égide de l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales et du Conseil national du sida (à lire via le lien bit.ly/2e26PQk).
• En savoir plus sur www.afef.asso.fr
L’Association française pour l’étude du foie présente les rapports et recommandations de prise en charge des patients infectés par le VHC.
• Cryoglobulinémie mixte de type II
Une cryoglobulinémie se caractérise par la présence dans le sang d’immunoglobulines anormales (Ig G ou Ig M). Dans les cryoglobulinémies mixtes, elles forment des complexes immuns circulants en association à d’autres composants : auto-anticorps, auto-antigènes…
• Élastométrie
Examen mesurant le degré “d’élasticité” du foie grâce à une sonde appliquée sur la paroi thoracique à hauteur du foie et émettant une onde de choc de faible amplitude. La vitesse de propagation de cette onde est d’autant plus importante que le foie est dur.
L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.