L'infirmière Libérale Magazine n° 336 du 01/05/2017

 

ÉCHÉANCES ÉLECTORALES

Actualité

Carole Tymen  

Après avoir porté leur candidat lors de la campagne présidentielle(1), plusieurs infirmiers libéraux se lancent à leur tour dans la bataille des élections législatives(2). Leur objectif affiché ? Porter et défendre les problématiques de leur territoire et de leurs concitoyens jusque dans l’enceinte de l’Assemblée nationale. Panorama non exhaustif…

Santé pour tous

« À gauche, on n’a plus le choix. » À 53 ans, Isabelle Loeffel s’engage en politique pour la première fois. Suppléante pour les élections législatives des 11 et 18 juin, l’infirmière libérale originaire d’Alsace représentera la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon dans la 7e circonscription du Finistère (Douarnenez – Pont-l’Abbé). C’est le programme écologique du candidat qui l’a décidée à sauter le pas : « C’est la vraie urgence de notre société. » Impliquée dans la vie associative locale, Isabelle vit son engagement politique comme une suite logique. « Je n’ai pas pour habitude d’être simple spectatrice. » Sa place de suppléante répond à une volonté de parité : « Quand on défend la place des femmes dans la société, un moment, il faut être cohérente. » Elle assume le programme santé parfois « poussé » du candidat Mélenchon comme sa volonté de mettre fin aux dépassements d’honoraires. Son secteur géographique isolé lui fait militer pour le maintien des hôpitaux de proximité et une meilleure prise en charge psychiatrique. Surtout, elle embrasse l’idée du remboursement des soins prescrits à 100 %, promis par son candidat. « En Alsace, le régime spécial de la Sécurité sociale plafonne à 90 % et il n’y a pas de déficit. C’est donc possible. »

Redonner le goût du libéral

Après plusieurs candidatures infructueuses pour des mandats locaux sous l’étiquette “divers droite”, Sophie Rivière-Durivault va, elle, représenter le Front national dans la 9e circonscription de Gironde (Langon – La Réole). « J’ai toujours été de droite », explique l’Idel installée depuis vingt ans. Celle qui a monté seule son cabinet pointe « le délitement de la France à tous les niveaux », un argumentaire qui l’a convaincue de devenir frontiste. « Je côtoie toutes les générations et classes sociales, dans le cœur de leurs foyers. Cette candidature est un moyen de porter plus haut leurs préoccupations vis-à-vis de la santé mais aussi de la sécurité, l’agriculture et des traditions de notre région. » Investie au printemps, elle fustige les conditions de travail dans les hôpitaux. « Quand on y envoie nos patients, on les récupère dans des états psychiques et physiques terribles. Il n’y a pas assez de personnels. » Elle approuve l’idée de Marine Le?Pen d’augmenter le numerus clausus en fac de médecine pour contrecarrer « le recours aux médecins étrangers ». Comme sa candidate à l’élection présidentielle, elle veut « redonner le goût du libéral » aux professionnels de santé. « Actuellement, je ne me vois pas dire à une jeune collègue de s’installer. On est à la fois médecin et femme de ménage. On fait tout. »

Marre du millefeuille administratif

Alain Delannoy est maire de Lapugnoy (Pas-de-Calais) et conseiller départemental socialiste. Cet ancien Idel a exercé pendant trente-six ans dans un dispensaire, à Auchel, pour la Sécurité sociale minière. Président de diverses instances sanitaires et sociales (conseil de surveillance de l’Établissement public de santé mentale de Saint-Venant, Établissement public départemental pour l’enfance et l’adolescence handicapées, commission territoriale d’attribution de l’allocation personnalisée d’autonomie), il se présente comme un « élu de terrain ». À 67 ans, il se porte candidat aux législatives pour la 9e circonscription du Pas-de-Calais (Béthune sud), sans étiquette. Délégué Force ouvrière dans ses jeunes années, il a pris sa carte au Parti socialiste en 1977. Son cœur se situe aujourd’hui entre le PS et Emmanuel Macron. « Je suis de gauche et grand démocrate. Mais si Emmanuel Macron me demandait de le représenter en Artois(3)… Pourquoi pas ! ? » Ce qu’il aime chez le candidat d’En Marche !, c’est sa promesse « de supprimer le millefeuille administratif ». « Trop de paperasse », martèle celui qui étudie des milliers de dossiers à l’année. « On n’arrête pas de lancer des protocoles administratifs. Les Agences régionales de santé nous imposent des choses et nous, sur le terrain, on peine. Ce qu’il nous faut, c’est de l’humain. »

Représenter le territoire

Le mandat de député est pour Alain Delannoy celui de la proximité. « C’est le moyen d’accompagner l’aménagement du territoire. » Même constat pour Fabienne Chochois, Idel et conseillère municipale de Saint-Martin-Boulogne depuis 2008. Celle qui se présente pour Les Républicains dans la 5e circonscription du Pas-de-Calais a publié Une infirmière à l’Assemblée. En trente pages, cette « représentante de la droite et du centre ainsi que des chasseurs de Chasse, pêche, nature et tradition », avance des propositions pour le Boulonnais comme un « plan dépendance » pour les aînés et l’instauration d’une 5e branche à la Sécurité sociale. La dépendance s’ajouterait ainsi à la maladie, retraites, famille et accidents de travail. Selon son livre-programme, les mesures visent à limiter les coûts des prises en charge de la dépendance par les proches. « Ce plan devrait permettre une couverture équitable du territoire en équipements et conditions de traitements : nous pourrons former du nouveau personnel, embaucher et résorber une partie du chômage en développant les soins à la personne. »

Au-delà du clivage droite-gauche

Martial Candel défend, lui, le dialogue entre les personnes. Cet infirmier libéral de 45 ans, père de trois jeunes enfants, travaille depuis six ans dans un cabinet de la ville de Nontron (Dordogne). Il est aussi le maire sans étiquette du village rural voisin de Saint-Crépin-en-Richemont (deux cents habitants). « Ici, tout le monde compose avec tout le monde. Vous imaginez, sinon… » Il aimerait se présenter aux législatives pour la 3e circonscription de Dordogne (Nontron) pour le mouvement En Marche ! qu’il a rejoint à l’hiver. Il a déposé sa candidature, un mois après l’ouverture du site(3). « Dans nos petits territoires, le clivage droite-gauche est un non-sens. J’ai néanmoins découvert, à travers mon mandat de maire, un monde partisan. J’ai toujours essayé de promouvoir la commune, au-delà de ça. » S’il reconnaît que la santé n’est pas le point fort du programme d’Emmanuel Macron et émet des réserves concernant le doublement souhaité du nombre de maisons de santé, il lui reconnaît l’effort mis sur la prévention. « C’est un axe essentiel de notre métier qui permet d’éviter bien des complications. L’éducation thérapeutique, pour les patients diabétiques notamment, est au plus près du quotidien de nos patients et de leurs familles. »

(1) Article réalisé et bouclé au moment de la campagne présidentielle, avant les résultats du second tour du 7 mai 2017.

(2) Les élections législatives des 11 et 18 juin vont désigner les 577 députés qui siégeront à l’Assemblée nationale pour un mandat de cinq ans.

(3) À l’heure où nous imprimons ce magazine, les investitures pour le mouvement En Marche ! ne sont pas effectives.