Cahier de formation
Savoir faire
La grossesse représente une épreuve pour la thyroïde qui continue à fonctionner normalement alors que les besoins en iode de l’organisme sont augmentés par plusieurs mécanismes, qui sont :
→ l’apport d’iode au fœtus pour la synthèse d’hormones thyroïdiennes. Sa thyroïde commence à fonctionner entre le deuxième et le troisième mois de gestation ;
→ l’élévation de la clairance rénale (excrétion) de l’iode.
Pendant la grossesse, les besoins en iode augmentent de 175 à 200 µg par jour. Au cours des deux premiers trimestres de grossesse, les besoins du fœtus en hormones thyroïdiennes sont essentiellement assurés par la mère. La thyroïde possède d’importantes capacités d’adaptation pour faire face à l’augmentation des besoins hormonaux mais des déséquilibres sont possibles en cas de dysfonctionnement thyroïdien, avec des conséquences sur la situation maternelle et fœtale.
Environ 2 % des femmes enceintes seraient atteintes d’hypothyroïdie et environ 0,3 % des femmes enceintes seraient déjà traitées pour une hypothyroïdie au moment de la grossesse. Trois causes de carence hormonale peuvent être répertoriées :
→ un mécanisme auto-immun avec une hypothyroïdie modérée ;
→ une carence en iode modérée ou sévère ;
→ une hypothyroïdie connue et précédant la grossesse.
Les besoins en iode augmentent pendant la grossesse et doivent répondre à la demande d’hormones thyroïdiennes maternelle et fœtale. L’Organisation mondiale de la santé situe la carence lorsque les apports en iode sont inférieurs à 100 µg par jour, alors que ces apports devraient se situer entre 175 et 200 µg pendant la grossesse. « Il faut favoriser la charge en iode chez les femmes enceintes, souligne le Pr Jean-Louis Wémeau. Les besoins se majorent à 250 µg par jour au cours de la grossesse. Avant, et tout au long de la grossesse et la période de lactation, il est bien d’assurer des suppléments nutritionnels par la prescription de compléments adaptés contenant du fer, de la vitamine D, mais aussi de l’iode, en général 150 µg quotidiennement. »
Le repérage clinique de l’hypothyroïdie n’est pas évident car les signes sont souvent attribués à la grossesse : de la fatigue, une constipation, des crampes musculaires, une prise de poids, de la rétention hydrique… Une bradycardie peut être évocatrice. C’est l’augmentation de la TSH qui pose le diagnostic.
Le dépistage de l’hypothyroïdie n’est pas systématique en cas de grossesse mais, en raison des possibles conséquences d’une hypothyroïdie chez la femme enceinte, le dépistage ciblé est recommandé chez les femmes à risque, en présence de :
→ signes cliniques évocateurs d’une hypothyroïdie ;
→ contexte thyroïdien personnel ou familial (antécédents de dysthyroïdie, intervention chirurgicale sur la thyroïde, notion d’élévation des anticorps antithyroïdiens…) ;
→ maladie auto-immune.
Le dépistage consiste alors en un dosage simultané de la TSH, de la LT4 et des anticorps anti-TPO (anti-thyroperoxydase).
→ Hypertension artérielle.
→ Prééclampsie.
→ Avortements prématurés.
→ Fausses couches.
→ Anémie.
→ Hémorragie du post-partum.
Les risques d’une hypothyroïdie induite par la mère (1 pour 100 000 naissances) sont plus rares que les hypothyroïdies néonatales dues à un développement anormal de la glande thyroïde (1 pour 4 000 naissances). L’hypothyroïdie fœtale induite par la mère peut être permanente ou transitoire (elle disparaît alors après la naissance).
Un déficit en hormones thyroïdiennes peut entraîner un petit poids à la naissance et/ou un déficit intellectuel plus ou moins sévère. Une carence iodée sévère durant la grossesse provoque des retards mentaux causés par des dysfonctionnements thyroïdiens chez le fœtus.
Les besoins en LT4 augmentent d’environ 25 à 50 % au premier trimestre. Il est recommandé d’augmenter de 30 % l’apport en hormones thyroïdiennes dès la confirmation de la grossesse. Un contrôle du taux de TSH est effectué après six semaines et la posologie sera adaptée si nécessaire pour maintenir la TSH inférieure à 2,5 mUI/L.
Le traitement substitutif à base de lévothyroxine est rapidement instauré à une posologie de 1,8 à 2,2 µg par kg par jour, supérieure à celle utilisée en l’absence de grossesse (posologie moyenne hors grossesse : 1,7 µg par kg par jour). La TSH sera contrôlée au bout de six semaines et la posologie réévaluée si nécessaire. La surveillance sera maintenue pendant toute la grossesse.
Mme F., déjà traitée pour hypothyroïdie, est enceinte. Alors que son hypothyroïdie était bien équilibrée jusqu’à présent, elle ne comprend pas que son médecin ait augmenté la dose de Levothyrox, et sans faire de contrôle de TSH préalable.
Vous lui expliquez que la grossesse augmente les besoins en hormones thyroïdiennes dela mère d’environ 25 à 50 % au premier trimestre. Il faut donc anticiper cette situation pour subvenir aux besoins de la mère et du fœtus, d’où la nécessité de majorer la posologie du Levothyrox dès le diagnostic de grossesse.
Quel est l’intérêt de l’application “e-thyroïde” que votre association a développée en partenariat avec un laboratoire ?
Les laboratoires Bayer nous ont sollicités pour concevoir une application smartphone visant à accompagner les patients dans la gestion et le suivi des différents troubles thyroïdiens. Dans le cas de l’hypothyroïdie, nous souhaitions développer un outil pratique qui permette aux patients de constituer un historique de l’évolution de leur maladie et de faire le lien entre les symptômes et les dosages du traitement substitutif hormonal. Ce qui se faisait et se fait encore sur un carnet, et qui peut se faire aujourd’hui sur le tableau Excel de l’application. Les données sont stockées uniquement sur le téléphone et restent donc entièrement en possession du patient. L’application permet également l’accès à des informations médicales sur les pathologies de la thyroïde et à des conseils pratiques.
Avez-vous des retours de la part des patients ?
Nous allons mener une enquête de satisfaction sur la première mouture mise en ligne depuis septembre 2016. Pour le moment, les patients trouvent l’appli très utile, mais quelques améliorations sont à apporter pour la rendre plus performante. Par exemple, il est actuellement possible de reporter les bilans sanguins sur trois mois en format PDF, alors que beaucoup de patients au long cours ne contrôlent pas leur TSH tous les trois mois, mais plutôt sur une année.
* L’appli “e-thyroïde” est téléchargeable gratuitement à partir d’un terminal mobile iOS ou Androïd en recherchant “e-thyroïde” dans le store d’applications du téléphone.