Une vingtaine d’Idels de Moselle sont en procès devant le Tribunal des affaires de Sécurité sociale contre leur Caisse primaire d’Assurance maladie, qui leur réclame des indus pour facturation d’actes par ailleurs payés à un Ssiad. Certaines ont déjà obtenu gain de cause.
Deux campagnes de contrôle ont été menées en 2013 et 2014 par la CPAM de Moselle pour des soins réalisés par des infirmières libérales en 2011 et 2012. Ces dernières ont alors reçu de la Caisse une notification pour le paiement d’indus liés à une double facturation, le montant s’élevant au global à 150 000 euros. « La CPAM leur a reproché d’avoir facturé des soins déjà payés au Service de soins infirmiers à domicile (Ssiad) intervenant chez les mêmes patients », raconte Thierry Pêchey, représentant de Convergence infirmière région Grand-Est, syndicat dont des adhérentes sont en procès.
« Le Ssiad a en effet perçu de la CPAM des dotations globales visant à payer les Idels intervenant chez les patients du Ssiad, poursuit Maître Jacques-Henri Auché, avocat de Convergence Infirmière. Or les infirmières libérales n’ont jamais été avisées par le Ssiad que les patients avaient intégré la structure, elles ont donc continué à dispenser les soins et à les facturer à la CPAM. » Les infirmières ont certes signé une convention avec le Ssiad, mais « ce dernier a pour obligation de faire un avenant ou de leur envoyer une lettre de mission pour chaque patient intégré, obligation que l’infirmier coordinateur du Ssiad n’a pas tenue », déplore Thierry Pêchey.
Les infirmières ont saisi la Commission de recours amiable (CRA) de la CPAM, qui a rejeté tous leurs recours gracieux. Certaines ont alors décidé de payer les indus réclamés par la CPAM tandis que d’autres ont fait le choix de saisir le Tribunal des affaires de Sécurité sociale (TASS) pour faire valoir leur droit et obtenir l’annulation de la notification d’indus. La Fédération nationale des infirmiers (FNI) a été sollicitée par deux infirmiers. « Après le rejet du CRA, nous sommes allés devant le TASS en novembre 2016, rapporte Nadine Hesnart, à l’époque secrétaire générale de la FNI, qui a assisté et représenté les infirmiers. La CPAM a demandé un report, les Idels ont donc été rappelées devant le TASS en février 2017. Fin mars, il a donné gain de cause aux infirmières. »
« Lorsque la CPAM a constaté la double facturation, elle a eu le choix de se retourner soit contre les infirmières, soit contre le Ssiad, explique Maxime Rouchon, directeur de la CPAM de Moselle, qui n’était pas en poste à l’époque des faits. Elle a choisi de mener une action contre les infirmières car la structure Ssiad était en redressement judiciaire, la créance n’était donc pas certaine. » Dans sa décision rendue pour les deux premières Idels, le juge du TASS a considéré que la CPAM aurait dû se retourner contre le Ssiad.
Pour les Idels adhérentes de Convergence infirmière, l’affaire a été plaidée le 7 juin devant le TASS. Ce dernier doit rendre sa décision en deux temps. En juillet pour les infirmières ayant reçu la notification d’indus avant 2013, c’est-à-dire avant la liquidation du Ssiad (qui a depuis été repris), et en novembre pour celles ayant reçu la notification après 2013. « À la vue de la décision qui a été rendue pour les deux premières infirmières, nous sommes plutôt optimistes concernant celle qui va être prise pour les 19 adhérentes de Convergence infirmière », indique Maître Auché. En parallèle de l’action individuelle de chaque infirmière, Convergence a décidé d’appuyer l’ensemble de ses adhérentes en intervenant officiellement à leurs côtés, avec l’aide d’un avocat afin « d’éviter que ce genre de problématique ne se représente », souligne Thierry Pêchey.
Pour sa part, le directeur de la CPAM a souhaité mettre en place un nouveau dispositif : « Désormais, si nous constatons une double facturation, la Caisse se tourne dans un premier temps vers le Ssiad, explique Maxime Rouchon. Ce dernier doit alors prouver qu’il a bien contractualisé avec l’infirmière libérale. À défaut de preuve, la CPAM notifie l’indu au Ssiad. » Une décision qui ravit les Idels car, désormais, elles reçoivent des recommandés ou des lettres de mission de la part des Ssiad. La CPAM travaille également avec la Caisse nationale sur la manière de gérer la suite à donner aux décisions du TASS, en sachant qu’elle ne fera pas appel. Le Ssiad, contacté, n’a pas souhaité réagir.