La fibre sensible - L'Infirmière Libérale Magazine n° 339 du 01/09/2017 | Espace Infirmier
 

L'infirmière Libérale Magazine n° 339 du 01/09/2017

 

INNOVATION

L’exercice au quotidien

Anne-Lise Favier  

Très impliqué dans la prise en charge des plaies et la cicatrisation, Jacques Macquart met aujourd’hui sa créativité au service des patients.

J’ai toujours aimé faire des pansements, surtout chez les patients présentant des plaies qui ne voulaient pas guérir : c’était en quelque sorte un défi pour moi, de réussir. Je suis infirmier libéral depuis 1979 et, après une petite parenthèse professionnelle en dehors du domaine de la santé – j’avais ouvert un restaurant –, je suis revenu à l’activité libérale en 2008, à 55 ans. Après avoir suivi un DU plaies et cicatrisation à Paris VII, j’ai ouvert en 2012 le premier cabinet spécialisé en cicatrisation des plaies dans la région Hauts-de-France, à Rang-du-Fliers (Pas-de-Calais). Dès lors, je n’ai eu de cesse d’améliorer ce que je faisais au quotidien auprès des patients. C’est ainsi que j’ai été lauréat en 2013 de la première édition du concours Eurasanté (cf. en encadré) avec la conception d’une douchette autonome portable pour le lavage des plaies. J’ai continué dans cette voie pour proposer plus de confort aux patients. J’ai constaté qu’avec les pansements modernes, certains patients développent des allergies ou des intolérances qui compromettent l’utilisation des produits conventionnels – environ 20 % de la patientèle souffrent par exemple d’eczémas de contact avec certains pansements*. Mon idée a alors été de créer un produit où l’on remplace la trame chimique par une trame entièrement textile. Pour cela, j’ai utilisé la fibre de lin, qui est 20 % plus hydrophile que le coton et qui présente l’avantage d’être anallergique et bactériostatique [empêchant la croissance bactérienne], et je travaille avec l’Institut national de la recherche agronomique pour qu’il devienne aussi bactéricide. De plus, nous sommes au cœur d’un continent qui produit 85 % du lin mondial, c’est une culture qui ne nécessite aucun arrosage, contrairement au coton. Le projet suit son chemin. J’ai également réfléchi à un projet autour de l’utilisation du miel, car il favorise la cicatrisation. Mon idée serait de produire dans les Hauts-de-France du miel à usage thérapeutique, un miel exempt de pesticides et stérilisé par rayonnement gamma, destiné aux patients en mal de cicatrisation et dont l’utilisation pourrait être couplée avec les pansements en lin. Ce projet transversal pourrait impliquer à la fois l’apiculteur, le cultivateur de lin, le tisseur et l’infirmier. »

* Sur l’eczéma de contact allergique dans le cas, par exemple, de l’ulcère de jambe, lire notre numéro 335 d’avril, pp. 50-51.

Hélène Bruyère, chargée d’affaires au «bio-incubateur» Eurasanté

« En tant qu’agence de développement économique de la région Hauts-de-France pour la filière santé, Eurasanté a pour rôle d’aider Jacques Macquart à structurer son projet et de l’accompagner, notamment sur les questions juridiques, réglementaires et financières. Son projet a été découvert dans le cadre du “concours des professionnels de santé” organisé tous les ans par Eurasanté et ses partenaires afin de détecter, valoriser et accompagner les idées d’amélioration de la prise en charge des patients et des conditions de travail des professionnels de santé régionaux. Jacques Macquart a aussi participé à une formation sur le marquage réglementaire CE des dispositifs médicaux, organisée par Eurasanté. Nous l’avons également mis en relation avec un référent de la commission pansements du CHRU de Lille, et avec un acteur industriel régional de la fabrication de matériel médical et spécifiquement des pansements. »