Cahier de formation
Savoir faire
Le psoriasis est une maladie essentiellement suivie par un dermatologue, en ville ou à l’hôpital. Mais de nombreux autres professionnels de santé interviennent : rhumatologue, kinésithérapeute, ergothérapeute (en cas d’atteinte ostéo-articulaire), généraliste (notamment pour le suivi global et des comorbidités), Idel (pour l’administration des traitements injectables), psychologue ou psychiatre, diététicienne… Le bilan pré-thérapeutique puis la mise en route de certains traitements, en particulier les biothérapies, peuvent conduire le patient à consulter d’autres spécialistes : pneumologue, gynécologue, cardiologue, néphrologue…
→ Face au psoriasis et au rhumatisme psoriasique, les biothérapies sont prescrites en seconde intention, en cas de résistance ou de contre-indication à au moins deux traitements systémiques (non biologiques, photothérapie).
→ Ce sont des médicaments d’exception à prescription initiale hospitalière annuelle réservée à certains spécialistes (et notamment dermatologues, rhumatologues, médecins internistes…) variables en fonction de la spécialité, et dont le renouvellement est restreint à ces mêmes spécialistes. Ils se conservent entre 2 et 8 °C.
→ Ce sont surtout des anticorps monoclonaux, dont la cible est spécifique : anti-TNF alpha, certaines interleukines… (voir tableau page suivante).
→ Sortir le médicament du réfrigérateur quinze à trente minutes avant l’injection, se laver les mains et désinfecter le site d’injection. Celui-ci est différent à chaque fois (cuisse, abdomen…), en respectant un espace d’au moins 3 cm. Éviter les zones atteintes par le psoriasis.
→ Pincer la peau et piquer au sommet du pli avec l’angle indiqué par la notice : généralement 45 ou 90°. Relâcher la peau et injecter lentement.
→ Une poche de froid peut être utile avant et après l’injection.
→ Jeter les aiguilles usagées dans un conteneur adapté (« poubelle jaune » Dasri).
Le principal effet indésirable à retenir est l’augmentation du risque infectieux : tuberculose, mais aussi infections des voies respiratoires supérieures, sinusites, infections cutanées, cystites, voire pneumonies, septicémies, réactivation d’hépatite B…
→ D’autres effets indésirables peuvent être observés : réactions au point d’injection, douleurs musculo-squelettiques, réactions allergiques, vertiges, fatigue, céphalées, risque potentiel de lymphomes ou de cancers cutanés (légèrement augmentés au long cours), troubles hématologiques (neutropénie, anémie…), maladie interstitielle pulmonaire. Tout signe infectieux (toux, rhume, fièvre…), neurologique (confusion, fourmillements, faiblesse musculaire…) ou de décompensation d’une insuffisance cardiaque (œdème, essoufflement…) impose l’arrêt du traitement et la consultation d’un médecin.
→ Avant la mise sous traitement : recherche et traitement de toute infection, bilan buccodentaire, dépistage de la tuberculose, sérologies virales, mise à jour des vaccinations. Une fois le traitement démarré, la surveillance est à la fois clinique et biologique, essentiellement tournée vers le risque infectieux.
→ Au quotidien, appliquer des règles de bon sens : se laver les mains, ne pas tarder à désinfecter une plaie, bien faire cuire ses viandes et respecter la chaîne du froid pour éviter toute infection alimentaire, se faire vacciner contre la grippe, informer l’ensemble des professionnels de santé du traitement en cours.
Ces conseils sont à donner quel que soit le traitement du patient, y compris en cas de biothérapie.
→ Préférer les douches rapides et tièdes aux bains prolongés et chauds. Le produit lavant utilisé sera de préférence adapté aux peaux pathologiques (sans parfum, sans colorant, sans alcool…) et surgras, afin de ramollir les squames et de favoriser leur élimination. Éviter les gommages.
→ En cas de psoriasis du cuir chevelu : des shampooings riches en agents kératolytiques (Kertyol PSO de Ducray, Nodé K de Bioderma…) permettent de ramollir les squames et de les éliminer. Espacer dès amélioration, prendre le relais avec un shampooing doux. Éviter les séchages trop longs ou trop chauds, laisser sécher à l’air libre ou tenir le sèche-cheveux à bonne distance.
→ Sécher la peau en douceur par tamponnement, sans arracher les squames qui s’élimineront d’elles-mêmes. Sinon, cela risque de réactiver une poussée. Limiter les démangeaisons (lire la première question de patient p. 40) pour les mêmes raisons.
→ S’épiler et se raser : un rasage très doux (manuel ou électrique) semble la meilleure solution pour ne trop agresser la peau. Éviter les produits parfumés ou alcoolisés, préférer appliquer une crème émolliente après le rasage, voire avant pour ramollir les squames. Prendre son temps pour ne pas risquer de créer une irritation ou une coupure : risque de réactivation du psoriasis selon le phénomène de Koebner.
→ Appliquer un émollient quotidiennement permet de réparer la peau, de lutter contre la sécheresse cutanée induite par certains traitements, et de prévenir de nouvelles poussées. Certains produits sont enrichis en agents kératolytiques : baume Iso-Urea MD de La Roche-Posay, crème Akerat 30 d’Avène….
→ Limiter les facteurs déclenchants et aggravants lorsqu’ils sont identifiés : tabac, alcool, stress, climat, produits irritants…
→ Le soleil et la mer ont tendance à améliorer la situation de certains patients, mais cela ne dispense pas d’une protection solaire adaptée aux heures les plus chaudes de la journée, de bien se rincer et d’appliquer une crème hydratante. Dans le même registre, des cures thermales sont parfois prescrites et peuvent améliorer les lésions (lire l’encadré ci-dessus).
→ Le maquillage est possible, à l’aide de produits adaptés disponibles en pharmacie (Tolériane Teint de La Roche-Posay, Couvrance d’Avène, Dermablend de Vichy…). Il s’agit de maquillage médical correcteur, par exemple en cas de rougeurs du visage, qui aide à retrouver un peu de confiance en soi.
→ Une activité physique même modérée permet de garder la mobilité des articulations et peut avoir un effet antalgique. Penser à des activités d’intensité modérée comme la marche ou la natation.
→ Dans tous les cas, rester à l’écoute de son corps et accepter de se faire aider au quotidien, par l’entourage ou une aide-ménagère lorsque cela est possible. Le kinésithérapeute et l’ergothérapeute peuvent donner des « trucs et astuces » pour ménager l’articulation. Il existe également un certain nombre d’aides techniques pour s’habiller, se chausser, cuisiner, écrire…
→ Des médecines complémentaires peuvent être utilisées : acupuncture, cures thermales, homéopathie, phytothérapie, aromathérapie, hypnose… Les professionnels de santé doivent néanmoins être vigilants : tout ceci doit rester complémentaire du traitement conventionnel. La recherche active d’une solution alternative aux traitements classiques entraîne parfois nomadisme médical, défaut d’observance ou encore échec thérapeutique.
→ Un soutien psychologique est parfois nécessaire, notamment lorsque le rhumatisme impacte la vie socioprofessionnelle (reclassement, invalidité, arrêt d’un sport…) ou affective (difficultés pour s’occuper de ses enfants…). De plus, les douleurs n’étant pas visibles, elles sont parfois mal comprises par l’entourage du malade (« tout ça, c’est dans ta tête »).
M. N., 60 ans, est atteint d’une forme mixte de psoriasis (lésions cutanées et rhumatisme). Son dermatologue et son rhumatologue lui prescrivent un traitement par biothérapie et font appel à vous pour les injections sous-cutanées. À terme, le patient souhaite pouvoir le faire seul, mais, pour le moment, il a peur de mal s’y prendre.
Lors de chacun de vos passages, vous prenez le temps de détailler les différentes étapes du soin et de le rassurer. Le risque infectieux sous biothérapie doit faire l’objet d’une vigilance accrue de la part du patient, de son entourage ainsi que de l’ensemble des professionnels de santé. Enfin, vous n’hésitez pas à distiller des conseils pratiques pour aider la patiente à mieux vivre au quotidien.
Je pars en vacances la semaine où doit avoir lieu l’injection, comment faire ?
Idéalement, il faut faire en sorte de réaliser l’injection à la date prévue : il ne faut pas réduire ni rallonger le délai entre deux injections pour des raisons logistiques. Il existe des trousses de transport réfrigérées, et il peut être utile de se renseigner auprès des différents prestataires, par exemple pour pouvoir utiliser un réfrigérateur au cours du transport puis sur place. Si besoin, une Idel sur place sera contactée avant le départ. Enfin, le patient doit veiller à avoir son ordonnance avec lui quand il voyage.
→ Injection sous-cutanée (en cas de biothérapie) : AMI1 + MAU si cet acte est isolé.
→ Surveillance et observation d’un patient lors de la mise en œuvre d’un traitement ou de la modification de celui-ci, sauf pour les patients diabétiques insulinodépendants, avec l’établissement d’une fiche de surveillance, avec un maximum de quinze jours, par jour : AMI1.
Une amie m’a dit que je pourrais peut-être faire des cures thermales pour soigner mon psoriasis, est-ce vraiment efficace ?
Le thermalisme est une médecine naturelle et alternative pouvant être prescrite pour une douzaine d’indications, dont une en dermatologie (eczéma, psoriasis, brûlures et cicatrices…) et une en rhumatologie (arthrose, polyarthrite, rhumatisme psoriasique…). Le médecin prescrit une cure de trois semaines au sein d’un établissement thermal agréé qui propose l’orientation thérapeutique adaptée au patient. La prise en charge par la Sécurité sociale est partielle : en général, l’hébergement, les repas et les loisirs réalisés en dehors des soins restent à la charge des patients.
L’efficacité de la cure est sans doute due à la fois aux propriétés de l’eau et à un environnement favorable : le patient est coupé de son quotidien, dans un lieu calme et ressourçant. De plus, l’encadrement médical est constant, et la prise en charge globale : physique, mentale et comportementale. En revanche, il faut avoir conscience que la cure thermale ne se substitue pas aux traitements classiques, et que certains patients ne ressentent aucune amélioration après la cure.