L'infirmière Libérale Magazine n° 340 du 01/10/2017

 

LUTTE CONTRE LES VIOLENCES

Actualité

Géraldine Langlois  

La région Hauts-de-France a ouvert le 1er juillet 2017 un numéro de téléphone post-agression. D’abord destiné aux médecins libéraux, il doit être progressivement étendu aux professionnels paramédicaux.

Les médecins libéraux des Hauts-de-France disposent depuis le 1er juillet d’un numéro de téléphone post-agression, le 03 74 27 00 24, mis en place par le conseil régional des Hauts-de-France. « Il ne remplacera pas les services d’urgence », a précisé Xavier Bertrand, président de la région, qui a annoncé sa création début juin. Le premier réflexe en cas d’agression reste toujours de contacter les secours et de déposer plainte le cas échéant. Mais le second pourrait consister à appeler ce nouveau service. Il vise à créer des liens et à faire circuler l’information entre les services concernés par la réponse à apporter afin que des “mesures concrètes” (télésurveillance, rondes de police, etc.) soient prises rapidement.

Harcèlement continu

La mise en place de ce numéro fait suite au harcèlement et aux agressions dont un médecin généraliste dunkerquois a été victime pendant plusieurs semaines ce printemps. Le 25 avril, de jeunes habitants du quartier où se trouve son cabinet n’ont pas apprécié qu’il leur demande de ne pas rester sur l’appui de fenêtre de son cabinet. Après une altercation, l’un d’eux l’a frappé au genou, causant chez le médecin une fracture du plateau tibial. Le médecin a porté plainte au commissariat et la police est venue contrôler les mineurs en question, mais cela n’a pas mis fin au harcèlement : musique à fond près du cabinet, violents coups de pied dans la porte, invectives et insultes à la fin de la journée… Nouveaux appels à la police, nouveau dépôt de plainte, nouveau contrôle, début de procédure judiciaire, mais les harceleurs, quoiqu’un peu plus calmes, étaient toujours présents.

Une demande de sévérité

La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), dont ce médecin est membre, s’est insurgée contre cette situation qui s’est prolongée, sans mesure concrète des pouvoirs publics pour y mettre fin. La police municipale ne fonctionnait plus à l’heure où finissait le généraliste, le signalement qu’il a envoyé par e-mail à l’Ordre est resté en courrier indésirable pendant plusieurs jours, les décisions d’éloignement prises contre les mineurs ont été difficiles à exécuter… Pourtant, un protocole d’accord de 2010 (2011 pour les paramédicaux, lien raccourci : bit.ly/2sUK9ZQ) prévoit de nombreuses mesures, mais il est inégalement appliqué sur le territoire. L’antenne régionale du syndicat puis la CSMF nationale ont donc demandé des actions fortes, très proches de celles que l’Ordre national des infirmiers a formulées en janvier 2017 : tolérance zéro, sévérité à l’égard des agresseurs de professionnels de santé, “crédits dédiés” pour installer des systèmes d’alarme… Des demandes que Xavier Bertrand a entendues.

Le Conseil régional n’a pas vocation à y répondre mais, durant le mois de juin, ses services ont contacté différents partenaires (forces de l’ordre, Préfecture, Ordres départementaux des médecins, Unions régionales des professionnels de santé des médecins…) afin de mettre en place le numéro post-agression et le circuit de circulation de l’information en cas de sollicitation d’un praticien. Ils ont également lancé la communication du numéro auprès des médecins. Il était au départ destiné à tous les professionnels de santé libéraux et ne devrait finalement être ouvert que “progressivement” aux non-médecins, indique le Conseil régional.

Un espace pour les Idels

Il n’est pas étonnant que les conseils départementaux de l’Ordre des infirmiers et l’URPS-infirmiers n’aient pas été immédiatement (voire pas du tout) contactés. Les infirmiers disposent en effet sur le site de leur Ordre national d’un espace de “déclaration de violence envers un (e) infirmier (e) ou un ESI” (bit.ly/2sYiRm6) et d’une fiche de conseils sur leurs droits et la conduite à tenir en cas d’agression (bit.ly/2sURs3o), souligne Armand Devignes, président du conseil départemental de l’Ordre des infirmiers du Nord. « Lorsqu’un infirmier fait une déclaration en ligne sur le site national, explique Édith Plantefève, présidente du conseil interdépartemental de l’Ordre des infirmiers pour l’Aisne, la Somme et l’Oise, elle est transmise au conseil départemental concerné qui a un référent dédié. Il prend contact immédiatement avec l’infirmier pour lui permettre de “décharger” son angoisse et de le conseiller. Ce que je regrette, c’est qu’une infirmière qui a subi une agression est souvent tellement “sidérée” qu’elle ne pense pas toujours à faire cette déclaration immédiatement et la fait tard. C’est parfois dommage car nous aurions pu la conseiller plus efficacement et, dans certaines circonstances, se substituer à elle pour le dépôt de plainte. »