L'infirmière Libérale Magazine n° 341 du 01/11/2017

 

MATÉRIEL MÉDICAL

Actualité

Marie Luginsland  

Estimant leurs patients privés du libre choix du prestataire de matériel médical à leur sortie d’hôpital, les pharmaciens du Grand Est ont lancé une campagne d’information.

Pendant une semaine, début octobre, les pharmaciens du Grand Est ont agité leur mascotte Mady. Dans la presse et sur les chaînes de télévision régionales, reportages à l’appui, ils ont relayé leur message : « Le pharmacien d’officine est l’allié du maintien à domicile. »

L’Union régionale des professionnels de santé (URPS)-pharmaciens du Grand Est a en effet décidé de taper du poing sur la table. En cause, l’omerta qui pèse sur certaines pratiques à la sortie d’hôpital. Les ordonnances de matériel médical sont captées de manière quasi systématique par les opérateurs, souvent des grandes entreprises, qui s’imposent ainsi aux patients, non informés de leur liberté de choix, pour la commande ou la location de matériel médical.

Jean-François Kuentz, titulaire à Colmar (Haut-Rhin) et vice-président de la Conférence nationale des URPS-pharmaciens libéraux (CNUPL), affirme même que ses patients n’ont jamais connaissance de l’ordonnance de prescription de matériel médical. « Et ce sont les prestataires, eux-mêmes, qui viennent nous trouver pour nous remettre l’ordonnance de médicaments », s’insurge-t-il. Ainsi, les pharmaciens estiment que leurs parts de marché n’atteignent pas 20 %, « alors que nous pourrions en détenir au moins 50, sinon 70 %, à l’instar de nos parts de marché en orthopédie », remarque Jean-François Kuentz.

Le pharmacien s’appuie sur les résultats d’une enquête effectuée par la CNUPL*. Alors que 83 % des pharmaciens déclarent souhaiter être contactés par les familles à la sortie d’hôpital de leur proche, 21 % seulement des patients ont reçu leur ordonnance pour du matériel médical en main propre ; 72 % affirment n’avoir pas eu le choix du prestataire pour leur matériel médical, oxygène, perfusions ou autres, tandis que 43 % ignorent la législation leur accordant ce droit ; 64 % des patients déclarent même ne pas avoir eu l’original de leur ordonnance de sortie. Pourtant, 24 à 27 % ont le réflexe de prévenir leur pharmacien de leur hospitalisation et ils sont 90 % à plébisciter une prise en charge par un professionnel de santé de ville à leur sortie d’hôpital, pharmaciens d’officine ou Idels.

Face à cette situation, les pharmaciens ont alerté l’Agence régionale de santé (ARS) des pratiques des prestataires et de leurs effets sur les professionnels de santé de ville. Pour l’instant, l’ARS se serait contentée d’un courrier pédagogique aux praticiens hospitaliers, selon Jean-François Kuentz. Les pharmaciens ont donc pris les choses en main. Leur campagne d’information grand public sera prolongée par la diffusion de brochures à destination des patients, les informant de leurs droits et des prestations de leur pharmacien. Les officinaux spécialisés en matériel médical seront d’ailleurs identifiés sur leur vitrine par la mascotte Mady et ils pourront à tout moment être localisés grâce à la carte interactive du site www.lemaintienadomicile.com, conçu par l’URPS.

* Entre le 27 mars et le 14 septembre, sur 1 050 patients de 35 départements (DOM-TOM compris), dont 60 % âgés de plus de 50 ans et 61 % hospitalisés au cours des dernières années.