Le Code de la santé publique (CSP) protège les Idels remplacées du détournement de clientèle et de la concurrence déloyale. Ainsi, selon l’article R 4312-87 du CSP, après avoir effectué un remplacement de plus de trois mois (consécutifs ou non), une Idel remplaçante ne peut s’installer, durant deux ans, dans un cabinet qui pourrait entrer en concurrence directe avec la consœur remplacée, voire avec ses associés, sauf accord des parties notifié au conseil départemental de l’Ordre, également sollicité si les Idels ne parviennent pas à un accord. Le contrat de remplacement peut préciser le périmètre de cette interdiction, à l’aide d’une clause de non-concurrence.
La clause de non-concurrence restreint la liberté d’installation. Elle est donc strictement encadrée. De façon générale, pour être valable, elle doit :
→ viser une seule activité (par exemple celle d’Idel),
→ être justifiée par la protection des intérêts de l’entreprise. C’est le cas lorsque l’exercice de l’activité nécessite un contact direct avec la clientèle, comme dans le cas de la pratique infirmière,
→ poser des limites précises, dans l’espace et dans le temps. L’interdiction, pour l’Idel remplaçante, de s’installer à proximité du cabinet de la consœur qu’elle avait remplacée à l’issue de son contrat de travail est donc limitée à deux ans et à un périmètre géographique défini.
En cas de litige, le juge contrôle que ces critères figurent bien dans la clause de non-concurrence. Dans le cas contraire, la clause est nulle, mais les dispositions du CSP doivent toujours être respectées.
À l’issue de votre contrat de remplacement, sur le point de vous installer, vous jugez votre clause de non-concurrence excessive ? Le juge peut parfois restreindre son application pour ces raisons… Mais seulement dans les cas extrêmes. Car en signant votre contrat de remplacement, vous aviez manifesté votre accord. Mieux vaut donc bien étudier la clause avant de signer le contrat.
Au-delà du lieu d’installation, l’obligation de non-concurrence implique de ne pas exercer votre activité auprès de la clientèle du périmètre interdit. Si un ancien patient vous contacte en tant qu’ancienne remplaçante, et demande à ce que vous le preniez en charge, mieux vaut le réorienter vers un autre cabinet. Dans le cas contraire, vous risqueriez d’être accusée de détournement de clientèle. Vous ne pourriez en fait le soigner qu’en cas d’urgence, sous peine de risquer des poursuites pour non-assistance à personne en danger.
Ancienne remplaçante, vous avez créé des liens avec vos patients, que vous souhaitez garder. Ou une occasion en or de vous installer se présente à vous, mais au sein du périmètre interdit. L’idée de rompre votre obligation se fait grandissante… Mauvaise idée. Dans certains cas, la clause de non-concurrence prévoit elle-même une évaluation du préjudice en cas de non-respect, assortie du montant des dommages et intérêts à verser à l’Idel que vous aviez remplacée. Vous devrez vous en acquitter.
Votre ancienne consœur peut également saisir le juge des référés qui vous obligera, dans de brefs délais, à cesser votre activité dans le secteur qui vous est interdit, sous peine d’une astreinte à payer par jour de travail, ou à chaque infraction constatée.
Le tribunal de grande instance pourra aussi vous condamner à verser des dommages et intérêts à l’infirmière lésée.
Enfin, les instances disciplinaires de l’Ordre pourront prononcer une sanction à votre encontre : avertissement, blâme ou suspension d’exercice pour détournement de clientèle et manque de confraternité.
→ L’interdiction de non-concurrence présentée ici ne s’applique pas à une infirmière qui effectue de nouveaux remplacements dans la zone géographique concernée (chambre disciplinaire de l’ONI, décision n° 66-2010-00002, 2011).
→ Seules les nouvelles installations dans le périmètre défini par la clause sont interdites. Si l’infirmière remplaçante était déjà titulaire d’un cabinet situé à proximité, elle peut retourner y exercer, tout en s’abstenant de solliciter la clientèle côtoyée durant le remplacement.
→ Contrairement aux clauses de non-concurrence imposées aux salariés, celles qui s’imposent aux professionnels libéraux remplaçants ne prévoient pas de contrepartie financière en leur faveur.