L'infirmière Libérale Magazine n° 343 du 01/01/2018

 

PLAIES ET CICATRISATION

Actualité

Olivier Blanchard  

À Saint-Savin (Gironde), deux infirmières libérales partagent l’expertise de leur diplôme d’université Plaies et cicatrisation. Grâce à un pôle de santé, elles ont mis en place un dispositif qui permet aux patients de bénéficier, sans se déplacer, d’une consultation spécialisée.

« J’ai obtenu un diplôme universitaire (DU) plaies et cicatrisation en 2007, ma consœur, Gaëlle Potier, en 2014. Nous ne voulions plus simplement conseiller nos collègues au téléphone de temps à autre, explique Sonia Dodoh, Idel à Saint-Savin (Gironde). C’est en passant son propre DU que ma collègue a découvert la télémédecine, et nous avons décidé de nous lancer ! »

Les deux collègues de cabinet commencent par recenser les besoins et font rapidement le constat que leur canton est très isolé géographiquement. Le centre hospitalier le plus proche est situé à Libourne, à au moins trente minutes de route. Les professionnels de santé eux-mêmes expriment souvent une difficulté à avoir accès à des consultations spécialisées en dermatologie pour les plaies chroniques.

Rôle consultatif

Les deux Idels décident de se rapprocher d’un pôle de santé pluridisciplinaire en cours de constitution sur le territoire de Saint-Savin, qui regroupe les praticiens de sept communes limitrophes. Les membres du pôle approuvent le projet et les aident à monter un dossier auprès de l’Agence régionale de santé. Après deux ans « et plus d’une cinquantaine d’heures de réunion », le projet voit le jour en novembre 2017.

En pratique, lorsqu’un professionnel du pôle de santé est confronté à une plaie qui évolue mal et qu’il a besoin d’une aide ou d’un conseil, l’une des deux Idels doit prendre rendez-vous avec lui et se déplacer au domicile du patient. Grâce à une tablette fournie par le département de la Gironde, sur laquelle un logiciel spécifique a été spécialement créé et installé, elle réalise un bilan global du patient, tant au niveau de la plaie que de ses traitements. À la fin de la consultation, « qui dure presque deux heures », les Idels rédigent leurs conclusions (par exemple, adapter le protocole de prise en charge, décider d’une téléconférence avec un médecin spécialisé, etc.), puis les transmettent à la Maison de santé protestante de Bordeaux-Bagatelle avec laquelle elles collaborent.

Le médecin de ce centre référent prend connaissance du contenu des consultations et valide les conclusions ou prend un rendez-vous pour une consultation en visioconférence. Dans le cas d’une visioconférence, les Idels retournent au domicile du patient avec la tablette pour faire une consultation “en live” avec le médecin référent, lui-même connecté via son ordinateur.

Les deux Idels ont un rôle consultatif. « Nous ne faisons pas les pansements, qui sont laissés aux soins de l’Idel habituelle du patient, précise Gaëlle Potier. Notre plus-value, c’est l’expertise. Il n’y a donc pas de risque de détournement de clientèle. D’ailleurs, nous ne disons pas au patient que nous sommes Idels. Nous nous présentons comme des infirmières du pôle de santé, c’est tout. » Si la demande émane du seul médecin, l’accord du cabinet de soins infirmiers habituel est obligatoire, précise d’ailleurs le pôle sur son site Internet. Sonia Dodoh et Gaëlle Potier, de leur côté, continuent à voir leurs propres patients et travaillent dans leur cabinet le reste du temps, ces consultations n’étant organisées que sur leur temps “libre.”

Une intervention rémunérée

Grâce aux nouveaux modes de rémunération, l’Idel qui intervient est payée 100 euros pour la première consultation de diagnostic, puis 50 euros par le pôle de santé pour chaque intervention ultérieure éventuelle. Les médecins du centre de référence, eux, peuvent coter une consultation en télémédecine. « L’expérimentation, qui durera deux ans, commence à peine », précise Sonia Dodoh. À l’heure de notre bouclage, une seule prise en charge a été réalisée dans le cadre de ce dispositif. « À terme, nous aimerions nous ouvrir à d’autres centres de référence et, pourquoi pas, travailler avec d’autres infirmiers. » Pour l’instant, un problème plus concret la préoccupe : « La tablette fonctionne en réseau 4G, mais le canton compte encore quelques zones blanches où lnternet ne fonctionne pas… »