L'infirmière Libérale Magazine n° 344 du 01/02/2018

 

TÉLÉMÉDECINE

Actualité

Des négociations conventionnelles à propos de la télémédecine ont débuté mi-janvier entre l’Assurance maladie et les médecins libéraux. Objectif : rémunérer les téléconsultations et les téléexpertises. Un chantier qui concerne aussi les Idels… pour l’instant non-conviées à ces discussions.

Sortir la télémédecine du champ de l’expérimentation et la faire entrer dans le champ des actes couramment pratiqués (et rémunérés) sur le terrain. Tel est l’objectif que se sont fixé médecins libéraux et Assurance maladie pour les négociations conventionnelles qui se sont ouvertes le 18 janvier dernier. Il est vrai que les initiatives mises en place jusqu’ici avaient principalement concerné les établissements de santé, et n’avaient touché le monde libéral qu’à la marge. Le calendrier de ces discussions est serré, avec une réunion tous les quinze jours pour parvenir à un accord fin mars.

Pour tenir la cadence, il a fallu circonscrire le sujet. Exit donc la télésurveillance, qui permet de suivre à distance un patient en continu : elle relèvera encore pour l’instant du domaine de l’expérimentation. Restent deux gros morceaux : la téléexpertise, d’abord, et la téléconsultation ensuite. Pour la première, les Idels ne sont pas forcément concernées. « La téléexpertise, c’est un échange entre deux médecins », résume le Dr Jacques Battistoni, président du syndicat de généralistes MG France, qui participe aux négos. Celui-ci donne l’exemple d’un échange entre un généraliste et un cardiologue à propos d’un ECG pratiqué par le premier chez un patient souffrant d’insuffisance cardiaque.

Pour la téléconsultation, en revanche, les choses sont différentes : non seulement celle-ci implique la présence du patient, mais elle nécessite également, dans bien des cas, à ses côtés, l’aide d’un professionnel de santé. « Imaginons qu’une infirmière remarque quelque chose d’inquiétant chez un patient diabétique qu’elle suit pour ses injections, reprend Jacques Battistoni. Elle peut entrer en contact avec le médecin traitant, et proposer une téléconsultation. »

La téléconsultation, avec ou sans Idel ?

Une solution qui permet au patient une prise en charge plus rapide, qui lui évite (ou qui évite au médecin) des déplacements pénibles et coûteux… Mais qui pose de nombreuses questions. « Il faudra notamment déterminer les situations qui nécessiteront la présence d’un professionnel de santé auprès du patient, indique le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), principal syndicat de médecins libéraux. Je pense que c’est un plus, voire que c’est indispensable dans certains cas, mais que ça ne l’est pas dans d’autres. » Les deux syndicalistes s’accordent pour dire que, dans la majorité des cas, le professionnel qui se trouvera aux côtés du patient dans le cadre d’une téléconsultation sera une Idel…

Une Idel qu’il faudra, bien évidemment, rémunérer. « Je n’ai pas vocation à négocier le tarif de l’Idel », plaisante Jean-Paul Ortiz quand on lui demande le niveau que devrait atteindre cette rémunération.

Logique monoprofessionnelle

Alors, les syndicats infirmiers sont-ils associés aux discussions ? « À ce stade, la négociation a été ouverte dans une logique mono-professionnelle », répond-on du côté de l’Assurance maladie. Une façon polie de dire que le sujet est déjà assez compliqué à discuter avec les médecins, et que les autres soignants se grefferont une fois que le terrain sera débroussaillé.

« C’est souvent comme ça que ça se passe », soupire Catherine Kirinidis, présidente du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil). Celle-ci souligne toutefois que le sujet devra être discuté lors de prochaines négociations conventionnelles entre les Idels et l’Assurance maladie, car les questions qu’il soulève ne se régleront pas en un claquement de doigt. En plus de la rémunération de l’acte, il faudra notamment prévoir les dépenses d’investissement. « Comment allons-nous acquérir le matériel nécessaire aux téléconsultations, quel sera l’impact financier », demande Catherine Kirnidis.

Ajoutons à cela la question démographique : les zones désertifiées, où les médecins seront amenés à faire le plus de téléconsultations, sont également celles où la densité des Idels est la moins forte. L’implication de la profession dans ces négociations s’avère donc plus que nécessaire.

LE TIERS PAYANT DE NOUVEAU EN DISCUSSION

C’est un serpent de mer : les discussions sur la généralisation du tiers payant ont repris mi-janvier en présence de toutes les professions libérales concernées (médecins, infirmiers, pharmaciens…). L’objectif de la réunion était d’alimenter le rapport que la Direction de la Sécurité sociale du ministère de la Santé doit présenter au Parlement fin mars. Celui-ci doit (enfin) proposer un calendrier acceptable par tous pour étendre la dispense d’avance de frais au-delà des publics qui en bénéficient déjà (patients en affection longue durée, bénéficiaires de la couverture maladie universelle, etc.). Une autre réunion est prévue le 21 mars.

AU FAIT, OÙ EN EST-ON DES NÉGOS CONVENTIONNELLES DES IDELS ?

En novembre dernier, les syndicats d’Idels jugés représentatifs ont signé un avenant à la convention qui régit leurs relations avec l’Assurance maladie. Un texte technique qui portait principalement sur la compensation de la hausse de la CSG, mais qui prévoyait que les discussions sur le fond devaient se poursuivre… Ce qui est bien le cas. « Pour l’instant, nous travaillons en groupe technique », explique Catherine Kirnidis, du Sniil.

Les choses sérieuses, et notamment les discussions financières, ne reprendront qu’en mars avec deux séances prévues pour aboutir à la fin du mois à un avenant sur la démographie, la prise en charge médicamenteuse à domicile et le suivi post-chirurgie. En juin, ce seront les patients dépendants, les pansements lourds et complexes et le fameux bilan de soins infirmiers (BSI) qui feront l’objet d’un nouvel avenant.