L'infirmière Libérale Magazine n° 344 du 01/02/2018

 

Parasitologie

Cahier de formation

Point sur

Nathalie Belin  

L’infestation du cuir chevelu par des poux est une parasitose très fréquente et bénigne. Les échecs de traitement sont essentiellement liés à une utilisation inadéquate des produits anti-poux. Retour sur les différentes solutions et leur utilisation.

L’agent responsable

Pediculus humanus capitis, parasite spécifique de l’homme, affecte surtout les enfants en milieu scolaire et leur entourage proche, mais également les personnes vivant dans des conditions précaires (défaut de prise en charge). L’infection n’est pas liée à un manque d’hygiène.

Hématophage, le pou peut vivre environ un mois. Une femelle adulte pond, au cours de sa vie, plusieurs dizaines d’œufs, les lentes. Fixées à la base du cheveu, ces dernières donnent naissance, après six à neuf jours, à des larves qui seront capables de se reproduire à leur tour après deux semaines environ. Les poux se nourrissent deux à trois fois par jour et ont besoin d’une température environnante proche de 30 °C : ils ne survivent pas plus de vingt-quatre à quarante-huit heures loin du cuir chevelu.

Transmission

Les poux se transmettent d’une personne à l’autre par contact direct. Les cheveux longs favorisent grandement la transmission de l’infestation, ainsi que la mode des selfies à deux. La transmission indirecte (bonnets, oreillers…) est possible mais rare, car les poux ont besoin de s’accrocher à des cheveux (ce sont des « funambules »). De plus, les poux résistent à une immersion prolongée (lavage des cheveux, piscine…).

Reconnaîtreune infestation

Symptômes

Les poux piquent le cuir chevelu pour se nourrir en injectant leur salive, qui est à l’origine d’un prurit plus ou moins intense, essentiellement au niveau de la nuque et près des oreilles. Les démangeaisons ne sont cependant pas toujours présentes. Le parasite n’est vecteur d’aucune maladie. Les complications infectieuses liées au grattage sont rares.

Repérer les parasites

→ Les poux font 1 à 3 mm de long. De couleur gris-beige, mobiles, ils peuvent être difficiles à voir. Un peignage au peigne fin (peigne à poux) peut aider à les repérer (voir les conseils pagesuivante).

→ Les lentes font moins de 1 mm. De couleur claire, elles adhèrent fortement aux cheveux, à la différence des pellicules ou de squames (liés à un psoriasis par exemple). Elles sont situées à quelques millimètres du cuir chevelu lorsqu’elles sont vivantes (pour que la larve puisse se nourrir après éclosion). Les lentes « mortes » (après éclosion) s’éloignent du cuir chevelu au fur et à mesure de la pousse du cheveu.

Prise en charge

Un traitement anti-poux estindiqué dès lors que des pouxou des lentes sont mis enévidence.

Les insecticides

Ce sont des pyréthrinoïdes de synthèse (Para Spécial Poux lotion, Item Antipoux, Itax shampooing…) ou du malathion (Prioderm). Les durées d’application préconisées vont de cinq minutes à huit heures. Neurotoxiques pour les poux, ces insecticides peuvent induire des effets indésirables (prurit, érythème, hypersensibilité…). Leur usage doit rester limité, en particulier chez les enfants. En outre, ils font de plus en plus l’objet de résistance. Ils sont déconseillés avant 2 ans ou 30 mois. Pas d’utilisationen cas de grossesse ou d’allaitement.

Les anti-pouxd’action mécanique

Agissant par asphyxie ou déshydratation, ils ne semblent pas induire de résistance des poux. Ils sont globalement bien tolérés. Certains sont utilisables dès 6 mois ainsi que chez les femmes enceintes. Les durées d’application vont de dix minutes à huit heures.

→ La diméticone, dérivé du silicone, est sans doute le produit d’action mécanique le mieux évalué. Non absorbé au niveau cutané, il pénètre dans les voies respiratoires des poux et des lentes et les tuent par asphyxie. Ce produit se rince difficilement, plusieurs shampooings sont parfois nécessaires. Citons en exemple Nyda, Pouxit, Pouxit XF, Paranix, EcoPrioderm, 5/5 Anti-poux & Lentes, etc.

→ Le Myristate d’isopropyle (formule brevetée dans Apaisyl Xpert), l’Activdiol (1,2-octanediol, formule brevetée dans Pouxit Easy) et l’Oxyphthirine (formule brevetée à base de triglycérides dans DuoLP-Pro) ont fait l’objet d’études cliniques, notamment versus la perméthrine pour le myristate d’isopropyle et versus le malathion pour l’Activdiol. Ils décollent la couche lipidique à la surface des poux et des lentes, induisant leur mort par déshydratation. Des huiles végétales (coco, etc.) ou encore des extraits de pépins de pamplemousse entrent également dans certaines formulations.

Autres solutions

→ Peigne à poux mécanique : un outil fastidieux en curatif, car cela nécessite d’effectuer deux à trois passages méticuleux par jour dans la chevelure durant trois semaines. Il peut en revanche compléter l’action d’un produit anti-poux ou être utilisé de façon plus espacée, mais régulièrement, à titre préventif. Certains ont des dents « micro-dentées » qui détruisent les lentes, comme le Zap’X ou l’Assy 2000…

→ Peigne à poux électrique (Robi Comb, Quies, Zap’X Z100…) : dès 3 ans, sur cheveux secs. Il envoie de mini-décharges électriques qui tuent les poux. Moins efficace sur les lentes, qui, plus petites, nécessitent plusieurs passages successifs. En « curatif » : un passage chaque jour, de dix minutes environ, pendant au moins quinze jours d’affilée, est recommandé.

→ Huiles essentielles (tea tree, clou de girofle, lavande, géranium…) : l’efficacité en a été mal évaluée.

En pratique

→ Les anti-poux d’action mécanique offrent désormais une meilleure balance bénéfice-risque.

Un produit revendiquant une action sur poux et lentes en une seule application permet généralement une meilleure efficacité sous réserve d’une utilisation correcte (les lentes sont plus difficiles à asphyxier ou déshydrater que les poux) : appliquer en quantité suffisante pour enrober complètement poux et lentes.

À titre indicatif, il faut compter deux tiers à un flacon de 100 ml, voire plus sur cheveux mi-longs à longs.

→ Chez un sujet asthmatique, pas d’anti-poux en spray ou en aérosol (risque de bronchospasmes).

→ De nombreux produits sont inflammables (la diméticone notamment) : pas de sèche-cheveux ni de cigarette à proximité de la chevelure.

Conseils

→ Il faut systématiquement vérifier la tête de tous les membres de la famille et traiter en même temps ceux qui sont atteints. Un décalage de prise en charge expose à de nouvelles contaminations.

→ Il faut contrôler la chevelure dix jours après un traitement pour repérer des poux issus de lentes non tuées par le traitement (l’échec pouvant être lié, non pas au produit, mais au non-respect des contraintes d’application : quantité, temps de pose…). Pour ce faire, passer par exemple un peigne à poux sur cheveux mouillés (plus facile que sur cheveux secs), de la racine jusqu’aux pointes, tête penchée au-dessus d’un lavabo blanc. S’il y a des poux, ils tombent, et on les voit facilement.

→ Un traitement anti-poux n’est justifié que si des poux ou des lentes ont été mis en évidence (pas d’intérêt en prévention). Les répulsifs à base de biocides (IR3535 ou Eucalyptus citriodora dans Ecrinal, Paranix, Parasidose, Apaisyl…) sont mal évalués et ont peu d’intérêt en préventiond’une infestation. Il en est de même pour les huiles essentielles.

→ Les poux sont détruits par un lavage en machine à 60 °C. Les textiles qui ne se lavent pas  peuvent être enfermés hermétiquement dans un sac plastique durant deux à trois jours.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts