L'infirmière Libérale Magazine n° 346 du 01/04/2018

 

Dispositifs médicaux

Cahier de formation

Point sur

Maïtena Teknetzian  

Le choix des pansements est guidé par l’aspect de la plaie, sa localisation, sa dimension et sa profondeur, la quantité d’exsudat, le stade de cicatrisation et l’état de la peau périlésionnelle.

Principes des soins d’escarres

→ L’escarre est une lésion cutanée consécutive à une hypoxie liée à la compression des tissus mous entre un os et un plan dur. La plaie se développe d’abord au niveau des tissus profonds avant d’être visible à l’extérieur, c’est pourquoi elle peut s’avérer grave dès son apparition.

→ Le traitement d’une escarre repose avant tout sur la mise en décharge et sur l’utilisation de supports adaptés anti-escarres (matelas, surmatelas, coussins).

→ La plaie est nettoyée au sérum physiologique ou à l’eau savonneuse. Le nettoyage est suivi si besoin d’une détersion mécanique, à la curette, au bistouri, au scalpel ou aux ciseaux, pour retirer les tissus nécrotiques ou la fibrine.

→ Le traitement local repose sur le principe de la cicatrisation en milieu chaud et humide, ce dernier stimulant les fibroblastes et kératinocytes. Il fait appel à différents types de pansements dont le choix dépend notamment de l’aspect de la plaie et du stade de cicatrisation. « Le choix du pansement s’appuie en particulier sur l’aspect de la plaie (sèche, exsudative, hémorragique, malodorante), sa couleur (échelle colorielle) », selon des recommandations de 2001 (bit.ly/2pwmc7G).

→ En plus du pansement primaire (directement au contact de la plaie), il peut être nécessaire d’utiliser un pansement secondaire qui assure le maintien du précédent. Le choix de ce pansement secondaire dépend des berges de la plaie. Si elles sont fragilisées, il s’agira d’une bande ou d’un filet tubulaire de maintien. Si elles sont saines, le pansement secondaire pourra être adhésif. En revanche, les différents pansements primaires (à l’exception des pansements au charbon, des hydrogels et des mèches) ne sont pas destinés à être associés sur une même plaie.

Stades de cicatrisation

→ Détersion : étape indispensable à la poursuite de la cicatrisation. Une détersion incomplète favorise l’inflammation. C’est pourquoi la détersion mécanique peut être complétée d’une détersion autolytique par application de pansements ramollissants (type hydrogel) sur plaies sèches, ou de pansements absorbants (type alginate ou hydrofibre) sur plaies fibrineuses et très exsudatives.

→ Bourgeonnement : phase de prolifération cellulaire et de néoangiogenèse (formation de nouveaux vaisseaux), permettant la synthèse de tissu conjonctif et la formation d’un « bourgeon charnu » rouge vif. À ce stade, les pansements ont pour objectifs de maintenir un milieu chaud et humide favorable à la cicatrisation, de protéger la plaie et de contrôler les exsudats. Pansements recommandés en 2011 par la HAS en général pour les plaies à ce stade : hydrocellulaires, vaselinés et interfaces (bit.ly/2pP6tAN).

Le bourgeonnement ne doit pas être excessif, car un hyperbourgeonnement donne un aspect bombé à la plaie et entrave l’étape d’épidermisation qui consiste à refermer la plaie. Il nécessite l’application d’un dermocorticoïde de classe II, sous forme de crème, qui adhère mieux à la plaie que la pommade. Sur les plaies peu étendues et les bourgeons isolés, le crayon au nitrate d’argent peut aussi être utilisé.

→ Épidermisation : appelée également « épithélialisation », cette étape termine le processus de cicatrisation. Elle correspond à la prolifération et à la migration des cellules épidermiques depuis les berges jusqu’au centre de la plaie. Celle-ci devient rose et se ferme. L’application de pansements vise à favoriser l’épidermisation et à protéger le tissu épithélial nouvellement formé. À ce stade, les pansements recommandés par la HAS sont les hydrocolloïdes et les interfaces, mais en pratique les hydrocellulaires sont également utilisés, sur des plaies exsudatives notamment, ainsi que les films semi-perméables en l’absence d’exsudat.

Situations particulières

→ Plaies hémorragiques : la HAS recommande l’utilisation d’alginates.

→ Plaies infectées : une antibiothérapie est instaurée par voie générale. Les antiseptiques et les antibiotiques locaux sont à proscrire (risque de retard de cicatrisation). Les pansements à l’argent sont indiqués dans le traitement des escarres présentant un retard de cicatrisation dû à une surcharge bactérienne. La durée d’utilisation ne doit pas excéder quelques semaines pour éviter les résistances. Les alginates et les hydrofibres sont également utilisés sur les plaies infectées.

Info +

Retrouvez les pansements et le matériel anti-escarres prescriptibles par les infirmières dans notre Mémento annuel de la prescription.

Effets indésirables et contre-indications des principaux pansements

Hydrocolloïdes

→ Effets indésirables : dégagement d’une odeur “pus-like” due au gel formé au contact des exsudats, risque de macération, d’hyperbourgeonnement et d’eczéma de contact.

→ Contre-indications : plaies infectées, plaies diabétiques, eczéma périlésionnel, co-utilisation de Dakin ou d’eau oxygénée.

Hydrocellulaires

→ Effets indésirables : risque d’allergie (présentations adhésives).

→ Contre-indications : plaies sèches ou infectées, co-utilisation de Dakin ou d’eau oxygénée.

Alginates

→ Effets indésirables : risque d’adhésion à une plaie trop peu exsudative.

→ Contre-indications : plaies non exsudatives, nécrose noire, co-utilisation de Dakin.

Hydrogels

→ Effets indésirables : risque de macération des berges de la plaie et d’irritation de la peau périlésionnelle.

→ Contre-indications : plaies infectées ou très exsudatives.

Au charbon

Ils peuvent provoquer une sensation de brûlure (dans ce cas, interposer une interface).

Hydrofibres

→ Effets indésirables : dégagement d’une odeur nauséabonde par le gel formé au contact des exsudats.

→ Contre-indications : plaies peu exsudatives ou sèches.

À l’argent

→ Effets indésirables : démangeaison, réaction allergique, coloration transitoire du lit de la plaie.

→ Contre-indications : allergie à l’argent, examen ou traitement exposant à des radiations, femme enceinte ou allaitante.

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêts.