L'infirmière Libérale Magazine n° 346 du 01/04/2018

 

PARCOURS DE SOINS

Actualité

Sandra Mignot  

Malgré les critiques, la plateforme Inzee Care s’implante en région. Dans le Nord de la France, des établissements seront en mesure de solliciter des infirmiers par ce biais dans les semaines à venir.

Inzee Care, la plateforme de mise en relation patients (sortants d’hospitalisation)/infirmiers libéraux poursuit son lancement. Six Unions régionales de professionnels de santé (URPS)* ont été séduites, malgré les critiques énamant du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil).

Après s’être inquiétée du lien entre son principal concurrent, la Fédération nationale des infirmiers (FNI), et la société Idelyo, créatrice de l’application, le syndicat a émis des doutes, en décembre dernier, à propos de l’intérêt de ces plateformes, payantes ou gratuites, portées par des investisseurs ou par des infirmiers. Au point, qu’en région Ile-de-France, malgré un groupe de travail ayant étudié trois types de solutions, aucune n’a finalement été retenue.

Service gratuit

C’est pourtant à Paris qu’Inzee Care est née. D’abord expérimentée au sein d’une association adhoc, Assolidel. Le logiciel est activé par des établissements de santé avant la sortie de leur patient pour lui trouver une idel (préalablement inscrite via une application smartphone) si des soins sont prescrits. « Si le patient est déjà suivi par une infirmière, et que sa carte de coordination est à jour (un dispositif mis en place pour les URPS où sont enregistrés son médecin traitant, son Idel voire son kiné), on enverra la demande de soin à son équipe, qui aura le choix de refuser. Mais s’il n’y a personne, que le patient n’est pas suffisamment autonome pour chercher un professionnel de lui même, alors nous enverrons la proposition et les Idels enregistrés de sa zone répondrons. » Aucune donnée de santé n’est échangée. L’infirmier doit appeler l’établissement d’hospitalisation dans les vingt minutes qui suivent pour avoir les coordonnées du patient. Le service est gratuit pour toutes les parties, puisque financé par l’URPS.

80 % des Hauts-de-France couverts

Dans les Hauts-de-France, l’une des premières régions à avoir adopté la plateforme, l’URPS affiche déjà un taux de couverture de 80 % du territoire. Quelques 1 330 comptes ont été ouverts. Compte-tenu du fait que certains inscrits sont des cabinets, et non des infirmiers solo, Franck Pérez, chargé du projet à l’URPS Haut-de-France estime qu’environ 1 600 professionnels se sont connectés (pour 7 400 enregistrés dans le fichier Adeli). « Nous n’avons pas encore fait entrer les établissements hospitaliers dans la boucle, commente-t-il. Nous attendions d’avoir un nombre suffisant de comptes. Dans ce genre de projet, si vous vous lancez trop tôt, que les établissements échouent dans leur recherche une fois, deux fois, il risque de ne pas y avoir de troisième tentative. »L’URPS est en train de finaliser une convention avec cinq établissements pilotes.

Pour l’heure, la structure régionale enregistre les comptes des professionnels, les vérifie et les valide. « On s’assure que tout est bien rempli : type de soins, zone d’activité, numéro Adeli, etc. Parfois la zone n’a pas été définie, on en propose une par rapport à l’adresse du cabinet et l’Idel peut corriger mais la validation par l’équipe URPS est indispensable. » Ce contrôle permettra également de s’assurer que les établissements ne contactent pas toujours les mêmes professionnels.

« Tout cela est transparent »

Le Sniil semble s’inquiéter que la FNI cherche à promouvoir une initiative pour se verser des dividendes. Inzee Care est, en effet, détenue majoritairement par une société par actions simplifiée unipersonnelle ou SASU dont l’actionnaire majoritaire est la fédération. Une position légitime ? « Oui, dès lors que l’objectif de cette entreprise correspond à l’objet social du syndicat, à savoir protéger les intérêts de la profession », répond Daniel Guillerm, vice-président de la FNI. Et l’infirmier de souligner que les syndicats, dont la FNI, ont déjà des filiales dans le domaine de la formation ou du conseil juridique. « Cela devrait rassurer la profession que ce soit un syndicat derrière ce projet, plutôt que des actionnaires qui n’ont rien à voir avec les professions de santé. Les actionnaires minoritaires, infirmiers, ont en outre signé un pacte d’actionnaire leur interdisant de toucher le moindre dividende pendant trois ans. Tout cela est transparent et présenté aux URPS en même temps que l’appli. Rien ne nous empêchera d’avancer. »

* Hauts-de-France, Bretagne, Nouvelle Occitanie, Guadeloupe, Nouvelle Aquitaine, Centre Val-de-Loire.