L'infirmière Libérale Magazine n° 347 du 01/05/2018

 

AUTISME

Actualité

Isabel Soubelet  

Le quatrième plan autisme tant attendu par les familles et les associations a été annoncé le 6 avril, après six mois de concertation sur le plan national et territorial. Il place l’inclusion au cœur du dispositif pour les cinq années à venir.

Pendant sa campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait évoqué la lutte contre l’autisme comme une des grandes causes de son quinquennat. Le 6 avril, Édouard Philippe, son Premier ministre, a dévoilé la nouvelle feuille de route en la matière, « Stratégie nationale pour l’autisme au sein des troubles du neuro-développement »(1). Elle comporte cinq engagements : renforcer la recherche et les formations, mettre en place les interventions précoces prescrites par les recommandations, garantir la scolarisation effective des enfants et des jeunes, favoriser l’inclusion des adultes et soutenir les familles.

20 mesures phare

Sur le terrain, vingt mesures phare vont être déclinées. Le fil rouge est bien de « faire sa juste place au milieu de tous à l’enfant, à l’adulte différent », comme précisé en préambule du document par Sophie Cluzel, secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées. « Je suis ravie de l’orientation de ce plan, car tout ce qui peut être fait dans le sens de l’inclusion est positif, souligne Véronique Gropl, mère d’un enfant autiste, présidente de l’association Rencontres internationales de l’autisme et créatrice du Salon international de l’autisme. L’inclusion est la première étape pour l’apprentissage. C’est dans le milieu habituel, en voyant comment agissent et interagissent ses pairs, qu’un autiste peut progresser. Aujourd’hui, les parents sont à la recherche de solutions pour faire progresser leur enfant, notamment à l’école. Toutes les formations sont à revoir, aussi bien pour les médecins que pour les soignants et enseignants. Il va falloir une génération pour que tout le monde soit formé. Au quotidien, le système manque de concertation générale et de cohésion. En tant que parent, on se heurte à une sectorisation. On devrait avoir un boulevard de solutions et d’aides mais on n’a que des obstacles. Ce qui marche, c’est le système D. Pour ma part, j’ai fait l’école à la maison. Mon fils étant aussi dyspraxique, l’école n’en voulait pas. C’est un énorme gâchis d’avoir les capacités pour apprendre et d’être rejeté du système… » En février 2018 déjà, l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux et la Haute Autorité de santé indiquaient dans leurs recommandations(2) que « la vie en milieu ordinaire doit toujours être privilégiée afin de favoriser l’inclusion des adultes autistes dans la population générale et l’insertion dans la société ». Le diagnostic précoce est un autre élément clé dans le domaine de l’autisme, où les parents connaissent souvent des années d’errance avant de savoir de quoi souffre leur enfant et vers qui se tourner. En avril, Florent Chapel, père d’un enfant autiste et ancien président du Collectif autisme, a lancé, avec le comédien Samuel Le Bihan, Autisme info service. Cette plateforme gratuite sera opérationnelle à la rentrée 2018. Elle a pour but d’informer et d’aiguiller les personnes porteuses de troubles autistiques et leur entourage. Soutenu par treize administrateurs, un conseil scientifique présidé par Richard Delorme, responsable du Centre expert FondaMental Asperger et chef du service de pédo-psychiatrie de l’hôpital Robert-Debré, à Paris, et un comité interassociatif regroupant plusieurs grandes fédérations, le projet bénéficie d’un financement à hauteur de 500 000 euros.

400 millions d’euros

Quant à la stratégie annoncée par le Premier ministre, elle se voit allouer un budget de 344 millions d’euros, conjugué aux 53 millions d’euros de crédits 2018 issus du troisième plan autisme, soit au total près de 400 millions d’euros. Pour Hugo Horiot, comédien, réalisateur, conférencier et écrivain diagnostiqué autiste Asperger, « cette somme est dérisoire ! Ce qu’il faut, c’est réinvestir les 7 milliards cités dans le rapport de la Cour des comptes(3) qui sont imputés aux secteurs sanitaire et médico-social, afin de créer une véritable socialisation pour les autistes, qui est différente de la socialisation majoritaire. La société inclusive est un tournant salutaire, mais ne peut se faire sans une réelle volonté politique. Cela passe par un financement conséquent pour permettre les transformations nécessaires, accompagner les formations, pérenniser les auxiliaires de vie scolaire et aider les familles. » C’est une tâche immense qui attend les pouvoirs publics, mais aussi la société tout entière, pour pouvoir porter un nouveau regard sur l’autisme.

(1) bit.ly/2JMl20pb

(2) bit.ly/2w58Rtx

(3) bit.ly/2w5Qwg3